Union Internationale des Magistrats
2e commission d’étude
Droit civil et procédure
Réponses de la délégation italienne au
Questionnaire pour la réunion de 2009
Le traitement des litiges commerciaux
I. ORGANISATION / STRUCTURE
1.
Quel droit s’applique aux relations commerciales dans votre système
juridique ? Est-ce qu’il y a des règles spéciales qui s’y appliquent ? |
Le code civil italien de 1942 a réalisé ce que les
civilistes de mon Pays appellent la « commercialisation du droit
civil ». Plus exactement, le législateur italien avait décidé à l’époque
de fusionner le code de commerce et le code civil, à l’intérieur de ce dernier.
En fait, à partir de 1942 l’Italie n’a plus un code de commerce, les
dispositions qui formaient l’objet de celui-ci ayant été insérées dans le 5e
livre du code civil. La discipline de la faillite forme, par contre, depuis
1942, l’objet d’une loi à part, qui a été radicalement réformée en 2006 et en
2007. La « commercialisation » du droit civil dont on vient de faire
état a comporté avant tout un avantage majeur, puisqu’on a évité d’avoir des
contrats à la fois civils et commerciaux, comme c’était le cas auparavant.
Ainsi, il n’y a plus de clivage entre société
civile et société commerciale, du moment que, depuis le code de 1942,
toutes les sociétés sont forcément commerciales. Cela signifie que, pour qu’il
y ait une société en Italie, il faut que cet organe exerce une activité
« commerciale », c’est-à-dire une activité économique de production
de biens et/ou de services professionnellement adressée au public. D’autre
coté, il n’y a plus de « vente civile » et de « vente
commerciale » : le contrat de vente (tout court) est réglé aux
articles 1470 et suivants du code civil par des normes qui s’appliquent
indépendamment du fait que les parties soient ou ne soient pas des commerçants.
Le désavantage de ce système est représenté par un
manque de souplesse dans pas mal de solutions pratiques. Un exemple pour
tous : le fait qu’il n’y ait plus de société civile a empêché la formation
en Italie d’une jurisprudence permettant un partage du patrimoine accumulé
pendant la cohabitation dans le cadre d’un faux ménage, tandis que le recours
justement à la société (civile) de fait a été adoptée à plusieurs reprises dans
les systèmes (tels que p. ex. le système français, le système espagnol, le
système allemand, etc.) qui connaissent la société civile, aussi pour empêcher
l’enrichissement d’un concubin au détriment du partenaire qui a contribué
pendant des années, sans aucune récompense, à la gestion et à la vie de la
famille.
2.
Comment sont organisés les tribunaux compétents en matière commerciale ?
(p.ex., les litiges commerciaux sont-ils portés devant les tribunaux
ordinaires dans lesquels les juges traitent une vaste variété des cas, ou
sont-ils portés devant des juges ayant une expérience plus poussée en matière
commerciale ou sont-ils portés devant des tribunaux spéciaux dans lesquels
les juges traitent exclusivement des litiges commerciaux ?) |
En Italie il n’y a pas de tribunaux de commerce. Les
litiges touchant au droit commercial (p. ex. les affaires entre commerçants,
les affaires entre les associés d’une société de n’importe quel type, etc.)
sont tranchés par les tribunaux ordinaires, avec les autres litiges (en matière
de famille, successions, propriété, exécutions, etc.). Seulement les affaires
relatives à la faillite (déclaration de l’état de faillite, révocation des
contrats stipulés entre le commerçant ou l’entrepreneur qui été assujetti à la
faillite et un tiers, etc.) relèvent de la compétence d’une section spécialisée
du tribunal ordinaire et suivent les procédures prévues par la loi spéciale sur
la faillite.
3. Est-ce qu’il existe dans votre système
judiciaire des tribunaux spéciaux d’arbitrage pour les litiges commerciaux ? |
En Italie il n’y a pas de tribunaux spéciaux
d’arbitrage. Il y a, bien-entendu, des procédures d’arbitrage, qui se déroulent
devant des arbitres privés, mais cela peut se passer par n’importe quel litige,
touchant à des droit disponibles, même en dehors de la matière commerciale.
C’est pourtant vrai que pas mal d’affaires résolues par les collèges des
arbitres sont des différends qui concernent justement la matière commerciale.
C’est pour cela qu’il sera peut-être utile de donner quelques informations à ce
sujet.
L’arbitrage en droit
italien
L’arbitrage,
tout comme la conciliation, vise à éviter les formalités, les délais, les coûts
e la frustration reliés au processus judiciaire habituel ; il se conclut
cependant non pas par une conciliation, mais par une sentence susceptible
d’exécution forcée, selon les procédures prévues par la loi.
1.
L’arbitrage interne
Le droit italien reconnaît aux parties le droit de
soumettre à arbitrage, au moyen d’une clause compromissoire, un litige déjà né ou
à naître. L’effet principal de cet accord est représenté par la renonciation à
la juridiction ordinaire. Peut faire l’objet d’un arbitrage tout type de
litige, à l’exception des conflits relatifs au statut des personnes ou relevant
du droit du travail, de la validité des marques et brevets et, en général, les
conflits qui ne peuvent pas faire l’objet d’une transaction. La clause
compromissoire doit être rédigée en forme écrite et définir l’objet du
différend ; elle peut être insérée dans un contrat ou faire l’objet d’un acte
séparé (arts. 807 et 808 Code de Procédure Civile).
Le système italien connaît deux types d’arbitrage :
-
L’arbitrage
légal (« arbitrato rituale ») est
régi par les articles 806 à 831 du Code de Procédure Civile, qui aboutit à une sentence
arbitrale qui lie les parties et équivaut à un jugement, dans la mesure où elle
est susceptible d’acquérir la force exécutoire au moyen d’un décret émis par le
juge, après un contrôle de la régularité formelle de la décision des arbitres.
A défaut d’accord dérogatoire des parties, les arbitres prononcent leur
sentence (« lodo ») dans le délai
(normalement) de 240 jours à compter de la date d’acceptation de leur mission
(cf. art. 820 du Code de Procédure Civile).
-
L’arbitrage
contractuel (« arbitrato irrituale »)
a par contre la valeur d’un contrat et peut être annulé pour les mêmes motifs
que celui-ci. Dans ce type d’arbitrage, il n’est pas possible d’obtenir une
déclaration d’exécutivité et la partie qui veut obliger l’autre partie à
respecter les termes de la sentence arbitrale est obligée de saisir la
juridiction ordinaire. Les voies de recours sont ouvertes seulement dans des
hypothèses très limitées (cf. art. 808-ter
du Code de Procédure Civile).
Finalement l’arbitrato prévu par le Code de Procédure Civile ne doit pas être
confus avec l’arbitraggio, prévu par
le Code Civil. L’Art. 1349 du Code Civil italien au Titre « Des contrats en
général » pose un principe général, sous la rubrique « Détermination de l’objet
», en disposant comme il suit : « (1) Si la détermination de la prestation qui
fait l’objet du contrat a été laissée à un tiers, et s’il n’apparaît pas que
les parties aient voulu s’en remettre à la décision entièrement discrétionnaire
(mero arbitrio) de ce tiers, le tiers
doit procéder à une appréciation équitable. (2) Si la détermination par le
tiers fait défaut ou si elle est manifestement inique ou erronée, la
détermination est faite par le juge. (3) La détermination abandonnée à
l’entière discrétion du tiers ne peut être attaquée, si ce n’est en prouvant sa
mauvaise foi. (4) Si la détermination par le tiers fait défaut et que les
parties ne s’entendent pas pour remplacer le tiers, le contrat est nul de plein
droit ».
2.
L’arbitrage international et l’arbitrage
étranger
L’Italie a adhéré à la Convention de Genève du 21
avril 1961 sur l’arbitrage commercial international, laquelle précise,
notamment, tant la loi applicable à un litige soumis à un arbitrage
international que l’organisation de l’arbitrage lui même (lieu, collège, règles
de procédure, etc.). L’Italie a également adhéré à la Convention de New York
sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères du 10
juin 1958.
Selon la
définition fournie par l’article 1 de la Convention de New York du 10 juin
1958, l’arbitrage est étranger s’il est effectué dans le territoire d’un Etat
différent de celui où il doit être reconnu et exécuté. Selon la loi italienne,
l’arbitrage est étranger quand son siège n’est pas fixé en Italie.
La distinction entre sentences arbitrales nationales
et internationales est aujourd’hui moins importante qu’auparavant, dans la
mesure où la sentence interne est assujettie à une procédure de dépôt et de
contrôle de régularité (art. 825 du Code de Procédure Civile), tandis que la
sentence étrangère est assujettie à une procédure de reconnaissance (arts. 839
– 840 du Code de Procédure Civile). Mais le Code stipule que cette
reconnaissance de la sentence arbitrale, qui doit être demandée par recours au
Président de la Cour d’Appel italienne compétente, se déroule par un contrôle
de régularité formelle, qui aboutit à un décret.
La reconnaissance ne peut pas être accordée :
-
si la
décision du différend, selon la loi italienne, ne peut pas être attribuée à des
arbitres ;
-
si la
sentence arbitrale contient des dispositions contraires à l’ordre public.
La loi n° 218 du 31 mai 1995 portant réforme du
droit international privé prévoit que la juridiction italienne peut être
écartée au profit de l’arbitrage à condition que ce dernier fasse l’objet d’un
accord écrit et porte sur des droits « disponibles », laissés à la
disponibilité des parties, hors dispositions impératives.
3.
Les Institutions et le coût de l’arbitrage
La mission d’arbitre est confiée à un ou plusieurs
arbitres acceptés par toutes les parties, suivant les règles fixées par la
clause d’arbitrage. En cas de désaccord c’est le président du tribunal qui va
nommer l’arbitre ou les arbitres.
En Italie, il existe un réseau de Chambres
Arbitrales, situées dans chaque province, qui s’occupe des arbitrages et des
conciliations, tant en matière commerciale qu’en matière de consommation.
Afin de rendre ces services plus efficaces, un
règlement simplifié a été adopté par la plupart des Chambres Arbitrales, lequel
prévoit deux phases possibles : une première phase de conciliation et une
deuxième phase d’arbitrage.
Pour ce qui concerne l’arbitrage international, la
structure la plus importante demeure la Chambre Arbitrale auprès de la Chambre
de Commerce de Milan (« Camera Arbitrale
Nazionale ed Internazionale di Milano »).
3. … Y a-t-il des circonstances dans lesquelles un
litige doit passer par une médiation ou un arbitrage avant de pouvoir saisir
un tribunal ou avant de pouvoir continuer le litige après l’avoir entamé ? |
1.
La « culture » des MARL en Italie
Venant maintenant à traiter des
modes alternatifs de résolution
des litiges (MARL) il faut d’abord dire qu’en Italie il y a toujours eu une
certaine méfiance vis-à-vis ces nouveaux systèmes de résolution des différends.
A cet égard on doit d’abord mentionner la crainte des avocats de perdre (ou de
voir sensiblement réduits) les revenues d’un système des frais de procédure qui
au présent est essentiellement basé sur le nombre des mémoires écrits et
déposés aux actes du procès, ainsi que sur les activités accomplies
(participation aux audiences, présentation de requêtes au juge, etc.) dans le
cadre de la procédure judiciaire. D’ailleurs l’article 102 de la Constitution
italienne stipule que « La fonction juridictionnelle est exercée par des
magistrats ordinaires institués et régis par les règles sur l’organisation
judiciaire. Il ne peut être institué de juges extraordinaires ni de juges
spéciaux ». Or, la Cour constitutionnelle a déjà statué qu’un système
d’arbitrage obligatoirement imposé par la loi, sans aucune possibilité de
recours à l’autorité judiciaire en cas de désaccord, constituerait une forme de
juridiction spéciale, interdite par la même Constitution (cf. par exemple les
arrêts n° 127 du 1977, n° 54 du 1996, n° 381 du 1997, n° 325 du 1998). Bien que
conciliation et arbitrage soient deux instituts différents, on ne peut pas nier
que cette attitude négative de la Cour a beaucoup contribué à fomenter une
sorte de méfiance à l’encontre de toute méthode « non traditionnelle » de
résolution des litiges.
Cela dit, des procédures préalables
de conciliation sont prévues dans certains secteurs par devant des organes de
l’administration : c’est le cas, par exemple, du contentieux du travail,
où l’art. 410 du Code de Procédure Civile stipule que toute procédure découlant
d’un rapport de travail doit nécessairement être précédée par une tentative
obligatoire de conciliation auprès d’une commission provinciale, constituée
auprès des bureaux provinciaux du travail. Dans ce cadre on peut aussi
mentionner les conciliations par devant le difensore
civico, un organe institué auprès des communes italiennes pour résoudre à
l’amiable les disputes parmi les citoyens et la mairie. Il en est de même pour
les difensori civici installés auprès
des régions.
Il y a aussi, bien entendu, des
procédures de conciliation qui se déroulent devant les juridictions : on
pourra ici faire mention de la conciliation tentée par le président du tribunal
au début des procédures de séparation de corps et de divorce, ou encore de la
tentative de conciliation effectuée par le juge de paix sur la requête des
parties (cf. art. 322 du Code de Procédure Civile).
Pour
ce qui est, plus exactement, du juge de paix, qui a compétence aussi dans le
domaine des matières des litiges commerciaux, il faut dire que la procédure est réglementée par des
dispositions spéciales (article 316 et suivants du Code de Procédure Civile),
qui s’inspirent en partie des dispositions régissant la procédure devant
l’ancien « juge conciliateur » (abrogé depuis quelques années). Il
s’agit d’une procédure simplifiée, du moment que l’instance peut être
introduite par une simple déclaration faite au juge, qui fait rédiger un procès
verbal et convoque les parties (les délais de comparution sont réduits de la
moitié par rapport aux délais ordinaires) ; au moment de l’audience, le
juge écoute les parties et cherche à les concilier : si les parties parviennent
à un accord, celui-ci est constaté dans un procès verbal qui a force
exécutoire ; si la tentative de conciliation n’a pas réussi, le juge
invite les parties à préciser les faits, produire les documents et indiquer, le
cas échéant, les moyens de preuve une deuxième audience est fixée seulement si
l’instruction de l’affaire l’exige ; le jugement doit être déposé dans les
15 jours qui suivent la discussion.
La loi prévoit aussi que la demande de
conciliation « non contentieuse » (art. 322 du Code de Procédure
Civile), jadis prévue par les dispositions concernant le juge conciliateur,
peut être introduite aussi auprès du juge de paix, indépendamment du montant de
la valeur du litige ; néanmoins, le procès verbal qui constate l’accord des
parties n’aura force exécutoire que si le litige relève de la compétence du
juge de paix. La compétence ratione summae du juge de paix est fixée
normalement à € 2.582,28, qui deviennent € 15.493,71 pour les litiges qui
concernent la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules
automoteurs et des navires. Ces
montants viennent d’être élevés, respectivement, à € 5.000,00 et à € 20.000,
par une loi approuvée par le Parlement italien le 26 mai 2009.
A côté de cela il faut aussi
mentionner des formes de conciliation « privée » prévues au sein de certains groupements
économiques ou sociaux : on peut penser aux organes de conciliation prévus par
certaines grandes entreprises dans le secteur des télécommunications (p. ex. Telecom Italia), des postes (Poste Italiane) et des banques (p. ex. Banca Intesa). L’association des banques
italiennes (A.B.I.) a d’ailleurs
créé, en 1993, un ombudsman pour la
solution des litiges dont la valeur n’excède pas les € 10.000. Dans tous ces
cas, les procédures, qui n’ont pas caractère obligatoire, se déroulent
normalement selon des règles arrêtées par des protocoles d’intente stipulés
avec les associations des consommateurs.
2.
Dispositions législatives en matière de MARL
On assiste depuis quelque temps à un
phénomène de « structuration » des MARL dans certains secteurs. A ce propos il
faut dire que quelques lois ont remis la solution de certains types de
différends à des commissions arbitrales et de conciliation. C’est le cas, par
exemple, de l’art. 2, alinéa 4, de la Loi n° 580 du 29 décembre 1993, qui a
institué auprès des chambres de commerce, de l’industrie et de l’artisanat
(existantes à niveau provincial) des commissions pour la conciliation ayant
pour but de résoudre les différends parmi les entreprises, ainsi que parmi
celles-ci et les usagers.
L’art. 10 de la loi n° 192 du 18
juin 1998, sur le contrat de « sous-commande » prévoit le recours obligatoire
(dans le cas d’un litige concernant ce type de contrat) aux commissions pour la
conciliation des chambres de commerce, avant que toute action en justice ne
soit entamée. La loi n° 281 du 30 juillet 1998 stipule que les associations des
consommateurs, qui ont été autorisées à entamer des procédures dans l’intérêt
général des usagers, ont le droit de saisir les commissions de conciliations
créées auprès des chambres de commerce, avant de saisir l’autorité judiciaire.
De même, la loi sur le tourisme (n° 135 du 29 mars 2001) prescrit la mise en
place, auprès des chambres de commerce, de certaines commissions de
conciliation spécialisées dans le traitement du contentieux parmi les
entreprises touristiques, ainsi que parmi celles-ci et leurs clients.
Dans
le cadre de l’art. 1, alinéa 13, de la loi n° 249 du 31 juillet 1997, les
régions italiennes ont institué des organes régionaux appelés CORECOM (Comitato
Regionale per le Comunicazioni), dont la tâche est aussi celle d’effectuer
une tentative préalable (et obligatoire) de conciliation des différends en
matière de télécommunications.
Plus récemment encore les articles
38-40 du décret législatif n° 5 du 17 janvier 2003 (réforme du droit des
sociétés commerciales), en vigueur depuis le 1er janvier 2004, a accordé aux organismes privés et publics,
sous le respect de certaines conditions, la possibilité de mettre sur pied des organisations,
soumises à enregistrement auprès du ministère de la justice, dont la tâche
serait celle d’entamer une tentative de conciliation dans le cadre des litiges
des sociétés commerciales, des banques et des services financiers. Les
organisations intéressées doivent déposer auprès du ministère un « règlement de
procédure » et un tableau de leurs tarifs. La procédure de conciliation
est exempte d’impôts et l’accord de conciliation est exempté des taxes
d’enregistrement jusqu’à la valeur de € 25.000. Le procédé doit être
confidentiel et les actes soumis par les parties ne pourront pas être utilisés
en tant que preuves au sein d’une éventuelle procédure judiciaire. Le
conciliateur doit être impartial. Si les parties concluent un accord, cette
entente peut être homologuée par le président du tribunal ; suite à cette
homologation l’accord devient exécutoire. Si une des parties ne comparait pas
devant le conciliateur, le procédé se termine par un rapport de non
comparution. Si les deux parties comparaissent et elles ne concluent pas un
accord, le conciliateur publie une recommandation, et les parties expriment les
différentes conditions auxquelles elles auraient été disponibles à conclure une
transaction. La non comparution, ainsi que le non respect de la procédure
devant le conciliateur, en cas d’échec du procédé, sont évalués par le juge
dans la détermination des frais et des honoraires de la procédure judiciaire
qui va suivre.
L’art.
60 de la loi approuvée par le Parlement italien le 26 mai 2009 délègue le
Gouvernement à émaner un décret qui devrait rendre ces procédures de
conciliation applicables à toute sorte de litige civil et commercial.
3.
Appréciation du système italien des MARL
On peut affirmer que le Législateur
italien, surtout par les deux textes qu’on a mentionné (loi n° 580 du 1993 et
décret législatif n° 5 du 2003) a jeté les bases pur un système de MARL public
et privé. Malheureusement, dans la pratique l’adoption de ces instruments a été
jusqu’ici très insatisfaisante. Compte tenu du fait que les commissions de
conciliation existent auprès des chambres de commerce depuis plusieurs années,
il n’est pas exagéré de parler (au moins pour le moment) d’un échec. Pour
donner une idée de la gravité de la situation, il suffira tenir compte des données
fournies par l’Unioncamere,
c’est-à-dire l’organisme regroupant les chambres de commerce italiennes. Ici il
faudra remarquer que, malgré l’optimisme montré par cet organisme (et malgré
une certaine tendance positive à l’augmentation des chiffres au cours de ces
dernières années), l’Unioncamere a
admis qu’au cours de l’année 2003 les conciliations n’ont été que… 2.128 ;
en 2007 le nombre total des demandes de conciliation en Italie n’a été que
50.000, face à des chiffres du contentieux judiciaire qui atteignent plusieurs
millions d’unités !
Ce résultat si modeste ne doit
d’ailleurs pas étonner, si on pense aux suites aux Etats-Unis du Civil
Justice Reform Act de 1990. Cette réforme se fondait, entre autres, sur six
principes de case management, ainsi
que sur un emploi plus massif des ADR
(MARL). Malheureusement, comme il a été attesté par les analyses effectuées par
le prestigieux institut de la RAND
Corporation sur les données concernant l’application de cette loi, la
réforme de 1990 n’a pas apporté les fruits qu’on espérait. De surcroît, on doit
prendre note d’une hausse des temps de travail des avocats sur les cas, ce qui
entraîne nécessairement une augmentation de leurs coûts, puisque les avocats
américains sont payés par rapport au temps qu’ils emploient dans chaque
affaire.
Les données concernant les MARL
italiennes sont carrément plus encourageantes si on pense, par contre, à la
réduction des temps des procédures. Si on prend le cas, par exemple, de la
procédure de conciliation auprès de Telecom
Italia, on peut remarquer qu’en 2003 sur 854 demandes de conciliation, 626
se sont terminées par un accord. 39% de ces accords concernaient les connexions
Internet, 20% les factures et 12% un service appelé Audiotel. Le temps de définition de la procédure a été de moins de
45 jours pour le 57% des demandes.
4.
Quels sont les litiges commerciaux qui sont portés devant vos tribunaux
(contrats, propriété intellectuelle, garanties, insolvabilité/faillite, droit
des sociétés, etc.) ? |
Comme on vient de le dire, il n’y a en principe
aucune différence en Italie entre litiges civils et litiges commerciaux. Devant
nos tribunaux tout litige commercial ou non commercial peut être porté, en
principe, pourvu, bien sûr, qu’il ne s’agisse pas d’un litige qui tombe sous la
compétence des tribunaux administratifs ou d’autres juridictions spéciales
(tribunaux militaires, tribunaux spéciaux des eaux, tribunaux pour les affaires
en matière fiscale, etc.).
II. PROCES / PROCEDURE
1.
Est-ce qu’il existe dans votre système juridique des règles de procédure
spéciales pour des litiges commerciaux
comme p.ex. celles qui
concernent dans la phase avant le jugement l’obtention des pièces et les
mesures d’instructions ? Est-ce que ces dispositions sont d’origine
jurisprudentielle ou d’origine règlementaire ? Est-ce que ces dispositions
sont suffisantes pour permettre de traiter les litiges commerciaux ? |
Le 26 mai 2009 le Parlement italien a voté
l’abrogation des dispositions du décret législatif du 17 janvier 2003. Cette
loi (concoctée – comme trop souvent se passe en Italie – par des soi-disant
experts, qui normalement n’ont jamais mis leurs pieds dans une salle
d’audiences d’un palais de justice) avait prévu pour certaines affaires
commerciales, et notamment pour les affaires concernant les sociétés (décisions
en matière de délibérations des organes des sociétés, affaires relatives à la
vente et à l’achat de parts et d’actions de sociétés, litiges visant à obtenir
des dommages-intérêts à l’encontre de managers
de sociétés, etc.), ainsi que pour les affaires entre les particuliers et le
vendeurs de valeurs mobilières (actions, fonds d’investissement, obligations de
sociétés, etc.) une procédure spéciale par-devant les tribunaux ordinaires.
Il s’agissait d’un procès très
« sophistiqué » et compliqué, parsemé de véritables
« pièges » de procédure, qui était détesté à la fois par les avocats
(qui trop souvent perdaient leurs litiges, tout simplement parce qu’ils n’avaient
pas respecté un délai péremptoire pour le dépôt d’un acte de la procédure) et
par les juges. En fait, pour ces affaires il était prévu un « rite »
inutilement baroque et complexe, avec des multiples rebondissements entre la
formation collégiale (devant laquelle la procédure débutait) et le juge de la
mise en état (devant lequel le dossier devait forcement revenir pour l’enquête,
l’expertise ou toute autre acte d’instruction, pour devoir enfin retourner
devant le collège). Chaque passage de ce rite était abondamment
« arrosé » de centaines et centaines de pages d’actes écrits par les
avocats (très souvent par le biais d’un
simple « copier-coller » d’actes précédents), tout comme par
d’interminables discussions devant la formation collégiale. Ici, les avocats ne
faisaient que répéter ce qu’ils avaient déjà écrit et que tout le monde – après
des mois et des mois d’audiences, échanges de mémoires, etc. – connaissait déjà
par cœur… (mais, gare au juge qui aurait osé les en empêcher : il aurait
été immédiatement accusé de vouloir étouffer le contradictoire !).
A présent, à partir du moment de l’entrée en vigueur
de la nouvelle loi, ce véritable scandale touchera à sa fin et toute procédure
en matière de société et de valeurs mobilières sera ramenée à nouveau à la
procédure ordinaire.
Il s’agit d’un tout petit dans la bonne direction.
Bien sûr, il faudrait remanier complètement toute la procédure ordinaire (et
cela pour n’importe quel genre de matière, non seulement pour les litiges à
caractère commercial !) pour avoir finalement un procès civil digne de ce
nom, en donnant beaucoup plus de pouvoirs au juge et en l’enlevant aux avocats.
Mais je ne crois pas que cette réforme (qui se heurterait inévitablement à la
toute puissante lobby des avocats)
soit envisageable en ce moment en Italie.
Ici il me suffira de rappeler que cette perspective
d’un juge plus « interventionniste » semble être aussi envisagée au
niveau supranational. Ainsi, le Principe 3 de l’Annexe à la Recommandation n° R
(84) 5 adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe le 28 février
1984 (Principes de procédure civile propres à améliorer le fonctionnement de la
justice), établit que « Le juge devrait, au moins lors de l’audience
préliminaire, mais si possible à tous les stades de la procédure, jouer un rôle
actif afin d’assurer, dans le respect des droits des parties et du principe de
leur égalité, un déroulement rapide des procédures. Notamment, il devrait
avoir, d’office, les pouvoirs de demander aux parties toutes clarifications
utiles, de les faire comparaître personnellement, de soulever des questions de
droit, de rechercher les preuves au moins dans les cas où le fond du litige
n’est pas à la disposition des parties, de diriger l’administration des
preuves, d’exclure des témoins si leur déposition éventuelle manque de
pertinence par rapport à l’affaire, de limiter le nombre, s’il est excessif,
des témoins appelés à déposer sur les mêmes faits. Ces pouvoirs devraient être
exercés sans pour autant déborder l’objet de l’action ».
En
traitant toujours des procédures judiciaires dans le domaine commercial, il
faudra ajouter qu’un remède d’importance tout à fait extraordinaire est celui
de l’ « injonction de payer », qui permet au créancier d’une
dette, justifiée par une épreuve par écrit, d’obtenir par le juge un décret
ordonnant au débiter de payer. Le décret peut, le cas échéant, être muni de
force exécutoire et s’il n’est pas opposé par le biais d’une procédure
ordinaire entamée par le débiteur dans un délai très bref, il devient définitif
et irrévocable.
2.
Est-ce que les règles procédurales sont différentes en fonction de l’enjeu
monétaire de la demande ? Est-ce que le litige dont l’enjeu n’est pas
considérable est porté devant un autre tribunal ? |
L’enjeu monétaire de la demande relève par rapport à
n’importe quel tipe d’affaire civile (et parmi celles-ci, aussi les affaires
qui dans plusieurs systèmes étrangers seraient considérées comme affaires
commerciales). La loi approuvée le 26 mai 2009 par le Parlement italien et
qu’on a déjà mentionnée vient de porter à € 5.000,00 la limite en dessous de
laquelle une affaire « ordinaire » doit être instaurée devant le juge
de paix (et non pas devant le tribunal). Par exemple, une vente commerciale
(qui, de toute façon, et pour les raisons qu’on a déjà expliquée en Italie est
réputée « vente » tout court), de la valeur de € 2.000,00 relève donc de la compétence
du juge de paix, exactement comme n’importe quelle autre affaire de la même
valeur. L’appel, par contre, sera traité par le tribunal.
3.
a) Est-ce que votre système juridique prévoit que les litiges commerciaux
sont fixés pour plaidoiries en préférence aux autres litiges ? Dans
l’affirmative, est-ce que le rang de préférence s’applique aussi en matière
d’appel ? |
Il n’y a pas de dispositions en ce sens dans le
système juridique italien.
3.
b) Est-ce qu’en général dans vos
tribunaux, les audiences de plaidoiries sont fixées du jour au lendemain ou est-ce
que les délais entre les audiences sont longs ? Est-ce que la pratique est
différente pour les litiges commerciaux ? |
L’Italie détient malheureusement le record absolu
d’affaires entamées devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour non
respect du critère du délai raisonnable (art. 6 de la Conv. Europ. Pour la
protection des Droits de l’Homme). Le nombre des avocats (210.000), d’un coté,
et la complexité des procédures, de l’autre coté, n’aident pas à solutionner ce
véritable fléau. Dans quelques juridictions italienne, grâce à l’audace et à la
ténacité de certains chefs de cours, quelques initiatives ont été mises sur
pied. C’est justement le cas du Tribunal de Turin, où le « Programme
Strasbourg » a permis de réduire de façon sensible la durée des
procédures.
Le « Programme Strasbourg », à qui une mentionne
spéciale a été décernée dans le cadre du prix « La balance de cristal de la
justice » (institué par le Conseil de l’Europe et par la Commission de l’Union
Européenne) est la première expérience de case
management essayé en Italie, visant à obtenir une réduction importante de
l’arriéré judiciaire et l’accélération du traitement des affaires civiles.
L’initiative est née d’une idée du Président du Tribunal de Turin, M. Mario
Barbuto, qui l’a concrétisée d’abord par le biais d’une activité de monitorage
de l’arriéré, suivie en 2001 par la rédaction d’une circulaire par laquelle il
a donné des dispositions et mis en œuvre des initiatives concrètes pour
remédier à la violation du principe de la durée raisonnable du procès.
Sur le plan pratique:
·
On a
effectué le recensement de toutes les causes inscrites au rôle avant 1998 (et
donc avec déjà une durée triennale) et qui, dans les 8 sections ordinaires du
siège central (sans tenir compte, donc de la chambre du contentieux du travail,
ni des chambres détachées) se chiffraient à 2.354 à la date du 30 avril 2001
(52 de ces causes dataient d’une époque antérieure à 1990).
·
Ce
recensement a été comparé avec celui analogue ordonné par le CSM en avril 2000,
lorsque les causes ultra-triennales étaient au nombre de 2.225.
·
Un juge
a été chargé de mener une étude sur les raisons de la persistance des «
vieilles affaires », malgré les efforts prodigués dans la période biennale
1999/2000 en vue de diminuer les arriérés les plus anciens. Au cours de cette
enquête, ce collègue a pu découvrir qu’il a avait aussi 6.919 dossiers civils
pendants auprès des sections spéciales instituées pour éliminer l’arriéré
antérieur à la date du 30.4.1995 (et qui duraient donc depuis plus de trois
ans). On a pu alors calculer qu’à la moitié de l’année 2001, le nombre total
des affaires dont la durée était devenue intolérable se chiffrait en tout à
9.144 dossiers.
Dans le cadre des informations fournies au Procureur
Général en juillet 2001, le Président du Tribunal a annoncé une initiative de
nature opérationnelle (d’application immédiate) : la diffusion d’une sorte de «
décalogue » pour le traitement rapide et ciblé des causes très anciennes, à
répartir par catégories (par exemple ultra-décennales, ultra-quinquennales et
ainsi de suite, qui se distinguent selon une couleur différente de la
couverture ou par un « coupon » d’alerte).
Le « décalogue », sous forme de circulaire ou de
recommandation, contient des conseils pratiques et détaillés à l’intention de
tous les juges civils (par exemple l’interdiction des « renvois purs et simples
» par analogie avec la procédure du travail qui à l’art. 420 dernier alinéa
c.p.c. dispose que les « audiences de simple renvoi sont interdites » ; l’usage
rigoureux des pouvoir du juge prévus par l’art. 175 c.p.c., etc.) pour assurer
une pratique uniforme dans toutes les sections mais toujours en respectant la
complète autonomie de chaque juge chargé de la mise en état des dossiers.
Le Président a aussi communiqué à titre préliminaire
le projet de « circulaire » au Conseil du Barreau de Turin, soit pour obtenir
l’avis favorable d’un organe institutionnel fortement concerné par le cours de
la justice civile, soit pour éviter que les défenseurs de causes individuelles
interprètent le nouveau cours comme une vexation gratuite ou comme une
initiative inopinée et épisodique de tel ou tel autre magistrat.
La mise en œuvre du « Programme Strasbourg » a
immédiatement montré des résultats très positifs. Déjà les données relevées dix
mois après le recensement précédent indiquaient une diminution sensible des
affaires civiles pendantes depuis plus de trois
ans ; ces données prouvent le succès du « Programme Strasbourg » et
confirment que l’attention accrue accordée aux causes de plus longue date
détermine en soi une réduction des arriérés supérieure à celle qu’on peut
obtenir moyennant une approche casuelle vis-à-vis des causes pendantes ; la
concentration, en particulier sur les causes de plus longue date (celles «
pathologiquement anciennes ») est compatible, en principe, avec la définition
des affaires datant de plus de trois ans (celles « physiologiquement anciennes
»), ainsi qu’avec le traitement des affaires infra-triennales.
Pour donner une idée des résultats obtenus on pourra
faire référence au tableau suivant :
Affaires civiles de toutes
les chambres civiles (y compris la chambre du contentieux du travail et les
chambres détachées) |
Arriéré au 1er
janvier |
Pourcentage de réduction
de l’arriéré |
Au 1er janvier
2001 |
39.144 |
|
Au 1er janvier
2002 |
36.485 |
6,7% |
Au 1er janvier
2003 |
30.518 |
16,3% |
Au 1er janvier
2004 |
28.752 |
5,7% |
Au 1er janvier
2005 |
28.762 |
Inversion de tendance |
Au 1er janvier
2006 |
28.616 |
0,5% |
Pourcentage de réduction (5 ans) |
|
26,6% |
Moyenne de réduction de l’arriéré
par an |
|
5,36% |
On pourra finalement ajouter qu’au 31 décembre 2008
l’arriéré avait été ultérieurement réduit à 27.970 affaires.
Il est évident que dans ce cadre aucune spéciale
préférence n’a été accordée aux procédures « commerciales ». Le critère
de préférence n’a été que celui de l’ « ancienneté » des affaires.
4. Est-ce qu’il existe des délais pour les
prononcés de jugements (règles informelles internes, jurisprudentielles, ou
réglementaires) en matière commerciale ? |
Les délais pour les prononcés de jugements (règles
informelles internes, jurisprudentielles, ou réglementaires) en matière
commerciale sont exactement les mêmes que celles en toute autre matière
ordinairement traitée par nos juridictions.
5. Est-ce que vos tribunaux ont le pouvoir
d’imposer des délais pour l’instruction du dossier dans la phase préparatoire
ou durant l’audience des plaidoiries pour des litiges commerciaux ? (p.ex.
des délais pour instruire ou pour conclure sur un moyen, pour examiner les
témoignages, etc.) Quelles sont les conséquences en cas de non-respect de ces
délais, s’il y en a ? |
Non.
6. En cas de litige commercial présumé
particulièrement compliqué, est-ce qu’il y a plus qu’un juge qui est nommé en
charge du litige commercial? |
Non.
7. a) Est-ce qu’il y a des règles de preuve
spéciales en matière commerciale (p.ex. l’admissibilité, la valeur) |
Non.
7. b) Est-ce que les avis des experts et des témoins
ont une importance spéciale en matière de litige commercial ? |
L’importance de
l’expertise et de l’enquête ne dépend pas du caractère « civil » ou
« commercial » du litige. Prenons par exemple le problème de l’avis des
experts. Il me paraît évident qu’ici ce qui relève est surtout la question
pratique qui se pose à la base du différend. S’il s’agit d’une question
strictement technique on ne pourra pas se passer de l’avis d’un expert. On
pourra ajouter à ce sujet que, malgré le principe dispositif, le système
italien aménage un certain nombre de preuves dont l’initiative est laissée
d’office au juge. On pourra mentionner à cet égard justement l’expertise (art.
61, 191 à 201 c.p.c. it.), la comparution personnelle des parties (art. 117,
183, al. 1er à 3, 185, 420, al. 1er à 3, 421, al. 4,
c.p.c. it.), la descente sur le lieu et les vérifications personnelles du juge
(art. 118, 258 à 262 c.p.c. it.), la requête d’informations à une
administration publique (art. 213 c.p.c. it.), certains (d’ailleurs assez
limités) pouvoirs d’office en matière d’enquête, la production forcée des
pièces comptables et des documents des entreprises (art. 2711, al. 2, c.c.
it.), le serment supplétoire et celui d’estimation (art. 2736 et s. c.c. it.,
240 et s. c.p.c. it.).
Or, là aussi, il n’y a
aucune différence entre litiges « civils » et litiges
« commerciaux ». En ce qui concerne en particulier les mesures
d’instruction exécutées par un technicien, il faudra rappeler que le système
italien ne connaît pas la tripartition entre constatations techniques,
consultations techniques et expertise, mais une simple distinction entre
constat et expertise, dont le premier peut être demandé en référé aussi avant
tout procès, exactement comme en France, lorsqu’il existe un motif légitime de
conserver ou d’établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution du
litige.
Le rôle du juge italien dans l’expertise est réglé
par les mêmes principes caractérisant le système français, qu’on peut
synthétiser comme il suit :
·
Le juge
n’est pas lié par les conclusions du technicien (art. 246 nouv. C. pr. civ.
fr.) et doit conserver un esprit critique vis à vis du rapport déposé qui ne
constitue qu’un avis (cf. aussi les art. 61, 62, 194, 196, 197 c.p.c. it., aux
termes desquels l’expert n’est qu’un « assistant » du juge : on dit
chez nous que le juge est peritus
peritorum, voire l’ « expert des experts »).
·
Le juge
n’est pas dessaisi par la décision qui ordonne une mesure d’instruction (art.
153 nouv. C. pr. civ. fr. ; cf. aussi l’art. 194 c.p.c. it.).
·
Le juge
veille au bon déroulement de l’instance; il a le pouvoir, pour ce faire,
d’impartir des délais, d’ordonner les mesures nécessaires (art. 3 et 241 nouv.
C. pr. civ. fr.), d’accroître ou de restreindre la mission confiée au
technicien (art. 236 nouv. C. pr. civ. fr.), d’assister aux opérations
effectuées par celui-ci et lui demander des explications oralement à
l’audience, sur les lieux ou par écrit; il peut ordonner la communication de
tous documents aux parties et aux tiers sur la demande de l’expert (cf. aussi
les art. 194 et 196 c.p.c. it.).
·
Le juge
vérifie que le principe du contradictoire est respecté par le technicien. Si ce
n’est pas le cas, il fait refaire l’acte litigieux dont la nullité est ainsi couverte
par sa régularisation (art. 115 nouv. C. pr. civ. fr. ; cf. aussi l’art. 194
c.p.c. it. en relation aux art. 101 et 162 c.p.c. it.). Cette mission de
contrôle devra donc porter sur la qualité de l’expertise, mais aussi sur la
durée de la mission et sur le coût.
Il faudra encore ajouter à toutes ces règles que
l’expertise, comme tout moyen d’instruction, doit respecter le principe
dispositif. Cela signifie – surtout dans le système italien, où les pouvoirs
d’office du juge dans l’administration de la preuve sont tout à fait
exceptionnels – qu’elle ne pourra jamais être ordonnée pour rechercher des
faits que la partie aurait pu et dû alléguer et prouver.
III. INTERNATIONAL/TRANS-FRONTALIER
1. Est-ce que vous avez des tribunaux spéciaux pour
trancher des litiges commerciaux internationaux ? |
Non. Les litiges commerciaux dans les affaires
présentant un ou plusieurs éléments d’extranéité sont tranchés par les
juridictions (ordinaires) italiennes suivant les règles du droit international
privé, ainsi que les principes dictés par les règlements européens et les
conventions internationales. En particulier il faudra mentionner à cet égard
les dispositions du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000
concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des
décisions en matière civile et commerciale (Règlement dit « Bruxelles
I »).
Pour ce qui est en particulier des procédures
d’insolvabilité il faudra rappeler que, selon la loi italienne, les tribunaux
de la République sont compétents pour la déclaration de faillite des
entrepreneurs, italiens aussi bien qu’étranger, à la condition que l’entreprise
ait son siège principal en Italie (art. 9 de la loi n° 267 du 16 mars 1942,
modifié en 2006), ou que l’entrepreneur ait exercé son activité d’entreprise en
Italie, même s’il a son siège principal à l’étranger (art. 9, alinéa 3, de la
loi n° 267 du 16 mars 1942, modifié en 2006) ; cette règle s’applique aussi aux
entrepreneurs étrangers (Cass., 20 juillet 1977, n. 3237, Foro it., 1978, I, 2033). Une fois que la juridiction du juge
italien ait été reconnue, le tribunal italien sera compétent en ce qui concerne
tous les actes de la procédure.
Les experts de droit international soulignent la
nécessité d’une harmonisation, surtout au niveau européen, des différentes
législations. A cet égard il faudra mentionner le Règlement
(CE) nº 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures
d’insolvabilité. Le principal objectif de ce règlement est d’éviter que les
parties (l’entreprise en faillite, c’est-à-dire le débiteur, et ses créanciers)
ne soient incitées à déplacer leurs avoirs ou des procédures judiciaires d’un
Etat membre de l’U.E. à un autre pour bénéficier d’un traitement plus
favorable.
Les
dispositions de ce règlement sont directement applicables dans tous les Etats
membres à l’exception du Danemark, ce qui veut dire que les personnes peuvent
s’en prévaloir directement devant les tribunaux nationaux. Il ne s’applique pas
aux entreprises d’assurance et aux établissements de crédit et
d’investissement.
Pour
atteindre son objectif, le règlement prévoit des règles communes concernant la
compétence des tribunaux, la reconnaissance des décisions et la loi applicable,
ainsi qu’une coordination obligatoire des procédures qui seraient ouvertes dans
plusieurs Etats membres.
Le
règlement s’applique aux procédures d’insolvabilité, qui comprennent les
éléments suivants:
·
Le caractère collectif des
procédures d’insolvabilité ; en d’autre termes, le fait que les droits de tous
les créanciers sont examinés en même temps et par conséquent que les poursuites
individuelles sont suspendues.
·
L’insolvabilité du débiteur,
c’est-à-dire la constatation du fait qu’il lui est impossible de faire face à
ses obligations financières.
·
Le dessaisissement du débiteur :
ses pouvoirs de gérer de disposer de ses biens sont limités et contrôlés par un
syndic.
·
Les modes de désignation du syndic.
·
Les tribunaux compétents pour
ouvrir la procédure d’insolvabilité sont ceux de l’Etat Membre sur le
territoire duquel est situé « le centre des intérêts principaux du débiteur ».
Pour une société commerciale, il s’agit en principe de son siège social.
·
Des procédures secondaires peuvent
toutefois être ouvertes ultérieurement pour liquider des biens situés dans un
autre Etat Membre. La loi de l’Etat Membre dans lequel des procédures
d’insolvabilité sont ouvertes détermine tous les effets d’une telle procédure.
·
Les dispositions du règlement
prévoient que les procédures ouvertes dans plusieurs Etats membres font l’objet
d’une coordination entre elles, notamment par le biais d’une coopération active
entre les différents syndics.
·
Enfin, toute décision prise par le
tribunal d’un Etat Membre compétent pour la procédure principale est, en
principe, reconnue immédiatement dans les autres Etats Membres sans autre
examen.
2. Quelle est la proportion de litiges commerciaux
dans lesquels au moins une des parties réside dans un autre pays ? |
La proportion des litiges commerciaux dans lesquels au
moins une des parties réside dans un autre pays est très, très faible. Je peux
à cet égard donner un exemple tiré de mon expérience personnelle. Il y a
quelque semaine le Président du Tribunal de Turin m’a assigné la première
procédure européenne d’injonction de payer jamais déposée auprès dudit
Tribunal. Pourtant, le Règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du
Conseil, du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d’injonction
de payer est en vigueur depuis 2008 et, entre-temps, j’ai décidé des centaines
de procédures d’injonctions « internes ». Or, même en tenant compte
des procédures d’injonctions instaurées aux termes du code italien à l’encontre
de débiteurs étrangers (ce qui est tout à fait possible selon le droit italien),
on peut estimer que la proportion de litiges commerciaux dans lesquels au moins
une des parties réside dans un autre pays est inférieure à 1%.
3. Est-ce que dans les litiges commerciaux
internationaux les parties soulèvent la compétence territoriale d’un autre
tribunal ? Dans l’affirmative, dans quelle proportion la question de la
compétence est soulevée ? |
La devise de l’avocat italien, lorsqu’il se trouve
du coté du défendeur, est celle de soulever toutes les exceptions possibles et
imaginables, même les moins fondées. Cela signifie que, lorsqu’une possibilité
– même faible – existe de trouver un lien, n’importe lequel, avec une
compétence juridictionnelle étrangère, on peut être sûr que l’exception du
défaut de compétence sera soulevée. On peut donc dire que la proportion à
laquelle la question se réfère est très proche du 90% des affaires présentant
un élément quelconque d’extranéité dans un procès civil (ou commercial).
4. Est-ce que vos tribunaux disposent d’interprètes
professionnels ? |
Si par « interprète professionnel » on
entend une personne payée par l’Etat, dont la tache est celle d’assister
professionnellement est de façon stable le juge et d’être à la disposition de
la cour toutes les fois où une partie au procès ne parle pas italien, la
réponse est : bien sûr que non. Le juge italien se trouve au plein milieu…
du désert le plus désespérant pour ce qui concerne toute forme d’assistance ou
d’un aide quelconque, qui puisse le soulager dans la tache de porter la croix
d’un fardeau qui devient chaque jour plus lourd. L’interprète est un
professionnel indépendant qui doit être nommé par le juge chaque fois que le
juge l’estime nécessaire comme n’importe quel autre expert. Dans ce cas les
frais seront mises provisoirement à la charge de toutes les parties et ensuite,
par son jugement final, le juge va statuer laquelle des parties (normalement la
partie succombente) va devoir payer en entier ces frais.
5. Est-ce que vos tribunaux admettent la
comparution d’avocats étrangers en cas de litige international, et dans
l’affirmative quelles règles spéciales, s’il y en a, s’appliquent ? |
Il n’y a pas de règles spéciales dans ce domaine, du
moins à ma connaissance. Il faut tenir compte du fait que, pour plaider en
Italie, il faut bien-entendu être inscrit à un barreau italien. Les parties au
procès italien vont comparaître devant le juge italien par le biais de leurs
avocats (italiens), qui les représentent. Evidemment, dans le cas de parties
étrangères, c’est à l’avocat étranger de choisir son homologue italien, en le
mandatant de représenter le client devant le juge italien. La partie a le droit
d’assister personnellement aux audiences et si elle est assistée aussi par un
avocat étranger, le juge admettra normalement aussi cet avocat, s’il désire
assister à l’audience devant le juge italien. Parfois l’avocat étranger se
présente assisté par un interprète choisi (et payé) par celui-ci, s’il ne
comprend pas l’italien.
IV. DIVERS
1. a) Est-ce que vos tribunaux ont le pouvoir
d’allouer des frais et des honoraires d’avocat afin de décourager les parties
de se comporter de manière non raisonnable ? Dans l’affirmative, est-ce que
ce pouvoir est utilisé en matière de litige commercial ? b) Est-ce que vos
tribunaux recourent à ce pouvoir en général et dans l’affirmative, sur quelle
base les frais et les honoraires d’avocat sont alloués ? |
L’art. 116 du Code de Procédure Civile italien
permet au juge de tenir compte, au moment de la décision, du comportement des
parties, y compris des manœuvres dilatoires. Personnellement j’ai fait quelques
fois application de cette disposition, qui pourtant, à mon avis, est très peu
employée par les juges. Il faut ajouter aussi que l’article 96 du même code
permet au juge de condamner aux dommages-intérêts la partie qui perd un procès
après l’avoir initié (comme demandeur) ou après y avoir résisté (comme
défendeur) de mauvaise foi, ou étant dans une situation de faute grave.
Le problème le plus important de cette disposition
c’est qu’il est toujours difficile pour la partie gagnante au procès de prouver
le montant du préjugé subi à cause de la mauvaise foi ou de la faute de la
contrepartie. La loi qui vient d’être approuvée par le Parlement italien le 29
mai 2009 prévoit justement qu’à l’art. 96 du code l’alinéa suivant soit
ajouté : « En tout cas, lorsqu’il tranche sur les frais du procès aux
termes de l’article 91, le juge, même d’office, peut aussi condamner la partie
succombente à payer une somme d’argent déterminée de façon équitable ».
Cela veut donc dire que le juge n’aura plus besoin de la preuve du fait que la
partie gagnante ait subi un préjudice
concret. Le système italien vient ainsi à se rapprocher du principe des punitive damages du common law. J’espère vraiment qu’on pourra compter sur un peu plus
de courage de la part de nos collègues de première instance (et sur un peu
moins d’ « esprit de correction » de la part des collègues
« infaillibles » des cours d’appel…).
2. Est-ce que votre Cour Suprême connaît souvent de
litiges commerciaux ? Est-ce que parmi les juges composant la Cour Suprême,
il y a des juges spécialisés en droit commercial ? |
Les affaires
commerciales reçoivent le même traitement que les affaires civiles ordinaires
aussi pour ce qui est des pourvois, y compris le pourvoi en Cassation.
Normalement ces affaires sont traitées par la première chambre civile de la
Cour. Il faut ajouter que parmi les juges de la Cour Suprême il y a nombreux
véritables spécialistes du droit commercial.
3. Quelle est la place occupée par la technologie
dans les litiges commerciaux ? Par exemple, est-ce que vous avez des litiges
« sans papier » ou sont-ils envisagés pour le futur? Est-ce que les parties
peuvent comparaître par vidéo satellite ? |
Depuis plusieurs
années on discute de la « dématérialisation » du procès civil. Dans
ce cadre, pas mal d’initiatives ont été mises sur pied en Italie. Une des plus
importante touche à la dématérialisation de la procédure d’injonction de payer.
Dans de nombreuses juridictions il y a déjà la possibilité pour les avocats
d’envoyer la requête par le biais d’un réseau télématique sécurisé. La requête
doit être accompagnée par les documents scannerisés. Le juge pourra ainsi voir
sur son écran toutes les pièces nécessaires pour pouvoir décider si la demande
est oui ou non bien fondée. Le décret d’injonction sera donc émis par le biais
du même réseau et envoyé à l’avocat du créancier.
Cas pratique Jean, un citoyen de France mais résidant en Suisse est
l’actionnaire unique et le président général de Au moment de la commande, Jean a précisé que la
date de livraison était essentielle afin de permettre à Suite à une grève des syndicalistes en Suède,
l’outillage commandé n’a été pu être envoyé par mer le 1er juin et
le cargo suivant n’a pu quitter le port que le 1er août. Ce retard
a eu pour conséquence que Jean n’a pas respecté le contrat conclu avec Cette société a assigné |
Questions : 1. La société B. entend mettre en intervention la
société X. Ltd. Est-ce qu’une telle procédure est possible dans votre système
judicaire ? Dans l’affirmative, est-ce que la société Y. Ltd peut mettre en intervention
à son tour la société suédoise pour non respect de la date de livraison
prévue dans la commande ? |
En règle générale le défendeur dans un procès civil peut mettre en
intervention une troisième partie, lorsqu’il estime que l’affaire est commune
aussi à cette partie, ou bien lorsqu’il veut en être garanti (art. 106 du Code
de proc. civ.). On fait en ce dernier cas une distinction entre « garantie
propre » (c’est le cas, par ex., de l’auteur d’un préjudice qui veut être
garanti par son assureur) et « garantie impropre » (c’est le cas, par
ex., du défendeur qui prétend ne pas être l’auteur ou le responsable du
préjudice et qui veut que quelqu’un d’autre soit sommé en jugement et condamné
à sa place). Dans le cas d’espèce, si un litige entre la société D. Inc. et la
société B. Corporation avait lieu en Italie, la société B. Corporation pourrait
mettre en intervention à son tour la société suédoise pour non-respect de la
date de livraison prévue dans la commande. Aux termes de l’article 6, Nr. 2, du
Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la
compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en
matière civile et commerciale, une personne domiciliée sur le territoire d’un
État membre (la Suède, dans le cas d’espèce) peut être attraite, dans un autre
État membre (l’Italie) : (…) « 2) s’il s’agit d’une demande en garantie ou
d’une demande en intervention ». Dans ce cas, en effet, l’étranger peut
être sommé en jugement « devant le tribunal saisi de la demande originaire,
à moins qu’elle n’ait été formée que pour traduire hors de son tribunal celui
qui a été appelé ».
2. Si la société D. était une société enregistrée
dans votre Etat plutôt qu’aux Etats-Unis, est-ce que vos tribunaux
exigeraient de chaque partie demanderesse de traduire la demande,
respectivement l’assignation dans la langue du défendeur ? |
Aux termes de l’art. 5 du Règlement (CE) n° 1393/2007 du Parlement européen et du Conseil
du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les
États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou
commerciale (signification ou notification des actes), et abrogeant le
règlement (CE) n° 1348/2000 du Conseil,
« 1. Le requérant est avisé par l’entité d’origine à laquelle il remet
l’acte aux fins de transmission que le destinataire peut refuser de l’accepter
s’il n’est pas établi dans l’une des langues indiquées à l’article 8. 2. Le
requérant prend en charge les éventuels frais de traduction préalables à la
transmission de l’acte, sans préjudice d’une éventuelle décision ultérieure de
la juridiction ou de l’autorité compétente sur la prise en charge de ces frais
».
Aux termes de l’art. 8 dudit Règlement, le destinataire peut refuser
l’acte, sous le respect des conditions prévues par la norme qu’on va ci-dessous
citer :
« Article 8
Refus de réception de l’acte
1. L’entité requise informe le destinataire, au moyen du formulaire
type figurant à l’annexe II, qu’il peut refuser de recevoir l’acte à signifier
ou à notifier, au moment de la signification ou de la notification ou en
retournant l’acte à l’entité requise dans un délai d’une semaine, si celui-ci
n’est pas rédigé ou accompagné d’une traduction dans l’une des langues
suivantes:
a) une langue comprise du destinataire ou
b) la langue officielle de l’État membre requis ou, s’il existe
plusieurs langues officielles dans cet État membre, la langue officielle ou
l’une des langues officielles du lieu où il doit être procédé à la
signification ou à la notification.
2. Si l’entité requise est informée que le destinataire refuse de
recevoir l’acte conformément au paragraphe 1, elle en informe immédiatement
l’entité d’origine au moyen de l’attestation prévue à l’article 10 et lui
retourne la demande ainsi que les actes dont la traduction est demandée.
3. Si le destinataire a refusé de recevoir l’acte en vertu du
paragraphe 1, il est possible de remédier à la situation qui en résulte en
signifiant ou en notifiant au destinataire, conformément aux dispositions du
présent règlement, l’acte accompagné d’une traduction dans l’une des langues
visées au paragraphe 1. Dans ce cas, la date de signification ou de
notification de l’acte est celle à laquelle l’acte accompagné de la traduction
a été signifié ou notifié conformément à la législation de l’État membre
requis. Toutefois, lorsque, conformément à la législation d’un État membre, un
acte doit être signifié ou notifié dans un délai déterminé, la date à prendre
en considération à l’égard du requérant est celle de la signification ou de la
notification de l’acte initial, fixée conformément à l’article 9, paragraphe 2.
4. Les paragraphes 1, 2 et 3 s’appliquent également aux modes de
transmission et de signification ou de notification d’actes judiciaires prévus
à la section 2.
5. Aux fins du paragraphe 1, les agents diplomatiques ou consulaires,
lorsque la signification ou la notification est effectuée conformément à
l’article 13, ou l’autorité ou la personne, lorsque la signification ou la
notification est effectuée conformément à l’article 14, informent le
destinataire qu’il peut refuser de recevoir l’acte et que tout acte refusé doit
être envoyé à ces agents ou à cette autorité ou personne, selon le cas ».
3. Quelles sont les règles spéciales qui
s’appliquent éventuellement à la procédure en cas de litige mettant en cause
des parties de pays différents. |
Aux termes de l’art. 3 de la loi Nr. 218 du 1995 en matière de droit international
privé, la juridiction italienne subsiste lorsque le défendeur est domicilié ou
résident en Italie ou s’il a en Italie un représentant qui soit autorisé à
ester en jugement, ainsi que dans tout autre cas prévu par la loi. La
juridiction subsiste aussi aux termes de la Convention de Bruxelles du 27
septembre 1968. Il faut tout de suite ajouter que, puisque cette Convention a
été remplacée par des règlements de l’U.E., c’est à ces règlements qu’il faudra
s’adresser pour résoudre le problème de la détermination de la compétence
juridictionnelle des juges italiens. Il s’agit notamment des règlements
suivants :
·
Règlement
(CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence
judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et
commerciale ;
·
Règlement
(CE) n° 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la
reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en
matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) n°
1347/2000 ;
·
Règlement
(CE) n o 4/2009 du Conseil du 18
décembre 2008 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et
l’exécution des décisions et la coopération en matière d’obligations
alimentaires ;
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Règlement
(CE) nº 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures
d’insolvabilité ;
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Règlement
(CE) N° 861/2007 du Parlement Européen
et du Conseil du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne de
règlement des petits litiges ;
·
Règlement
(CE) n o 1896/2006 du Parlement européen
et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne
d’injonction de payer.
Il faut ajouter que ces règlements relèvent pour le droit italien non
seulement dans les rapports avec les systèmes juridiques des autres états membres
de l’U.E., mais aussi – grâce au renvoi contenu dans l’art. 3 de la loi du
droit international privé italien – pour ce qui est des rapports avec n’importe
quel autre système juridique étranger, bien entendu dans les secteurs de
compétence relatifs à chacun des règlements qu’on vient de mentionner.
On pourra encore mentionner l’art. 4 de ladite loi du 1995, stipulant
que le défaut de juridiction du juge italien ne peut plus être déclaré si le
prévenu a accepté cette juridiction en se constituant devant le juge italien
sans soulever aucune exception à cet égard. Normalement le juge italien ne peut
par relever ex officio le défaut de
sa compétence juridictionnelle internationale.
4. Est-ce que vos tribunaux accordent des délais supplémentaires
pour instruire les plaidoiries eu égard au fait que les parties résident dans
différents pays ? |
Malheureusement en Italie les juges n’ont pas le pouvoir d’accorder des
délais qui ne soient pas prévus par la loi. L’art. 163-bis du Code de procédure civile italien stipule qu’entre le jour de
la notification de l’acte de sommation en jugement et celui de l’audience de
comparution par-devant le juge, un délai de 90 jours doit être accordé (par le
demandeur, qui est celui qui arrête la date de l’audience devant le juge). En
cas de notification à l’étranger, ce délai est de 150 jours (cf. aussi les art.
415, 418, 419, 434 et 435 ; du même Code pour ce qui est des procédures
dans le domaine du droit du travail ; l’art. 644 pour la notification du décret
d’injonction et l’art. 641, deuxième alinéa, pour ce qui est du délai pour
l’instauration de la procédure ordinaire d’opposition au décret d’injonction ;
les art. 669-sexies - Art. 669-nonies pour les procédures d’urgence).
5. Est-ce qu’il existe des règles et procédures
spéciales dans votre système judiciaire afin de reconnaître des jugements
étrangers ? Quelles règles s’appliquent à la reconnaissance de sentences
arbitrales étrangères ? |
Les règles et les procédures spéciales afin de reconnaître des
jugements étrangers sont contenues aux art. de 64 à 68 de la loi Nr. 218
du 1995 en matière de droit international privé. D’autres règles sont contenues
dans les Règlements communautaires qu’on vient de mentionner ci-dessus (cf. la
réponse à la question Nr. 3).
Une distinction importante s’impose entre « reconnaissance »
et « exécution ». Tandis que la reconnaissance est normalement
produite de façon tout à fait automatique par la sentence étrangère, sans qu’il
soit nécessaire d’instaurer un recours devant un juge, la possibilité de se
servir en Italie de l’arrêt étranger dans le cadre d’une procédure d’exécution
est normalement soumise à une procédure d’exequatur
par-devant le juge (Cour d’appel) italien. Il faut encore ajouter que la
tendance de la législation communautaire est justement celle de réduire les cas
dans lesquels cette procédure est nécessaire. C’est justement le cas du
Règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la
compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière
matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement
(CE) n° 1347/2000, pour ce qui est des décisions judiciaires statuant en
matière de droit de visite du parent auquel la garde de l’enfant n’a pas été accordée,
ainsi que des décisions ordonnant le retour d’un mineur, en cas d’enlèvement
international d’enfants. C’est encore le cas des décisions qui retomberont sous
la compétence du nouveau Règlement (CE) n o
4/2009 du Conseil du 18 décembre 2008 relatif à la compétence, la loi
applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions et la coopération en
matière d’obligations alimentaires, lorsqu’il sera entré en vigueur.
Pour ce qui est de l’arbitrage international, l’art. 4 de la loi Nr. 218
du 1995 sur le droit international privé prévoit la possibilité que la
juridiction italienne soit dérogée par l’effet d’un accord non seulement en
faveur d’un tribunal étranger, mais aussi d’un arbitre étranger, lorsqu’il
s’agit de droits qui ne soient pas soustraits à la libre disposition des
parties. Aux termes de l’art. 839 du Code de Procédure Civile la partie qui
veut faire exécuter en Italie une sentence arbitrale étrangère doit faire
recours au Président de la Cour d’appel du ressort dans lequel l’autre partie a
sa résidence, ou bien au Président de la Cour d’appel de Rome si le défendeur
n’est pas résident en Italie. Le Président de la cour d’appel doit vérifier la
régularité formelle de la sentence arbitrale ; dans ce cas il la déclare
exécutoire en Italie. Cette déclaration ne peut pas être émise si l’affaire ne
pourrait pas former l’objet d’une décision arbitrale selon la loi italienne ou
si elle est contraire à l’ordre public italien. La décision du Président de la
Cour d’appel peut former l’objet d’une procédure d’opposition qui se déroule
aux termes de l’art. 840 du Code de procédure civile, par-devant la Cour
d’appel.
Turin, le 22 juin 2009.
Secrétaire
Général Adjoint |
de
l’Union Internationale des Magistrats |