N° 178
SÉNAT
SESSION
ORDINAIRE DE 2004-2005
Annexe au procès-verbal de la
séance du 8 février 2005
PROPOSITION DE LOI
instituant la fiducie,
PRÉSENTÉE
Par M. Philippe MARINI,
Sénateur.
(Renvoyée à la
commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du Règlement et d’administration générale, sous réserve de la constitution
éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le
Règlement.)
Mesdames, Messieurs,
Le code civil ne prévoit ni ne régit d’institution
équivalente au « trust » des pays de droit anglo-américain qui
permet, en particulier, à une personne, le constituant (settlor), de
transférer la propriété de droits lui appartenant à un « trustee »,
afin de les administrer, non dans l’intérêt propre de ce trustee mais
pour réaliser un objet déterminé.
Certains pays de tradition romano-germanique
parviennent à un résultat équivalent à celui du trust avec la pratique,
consacrée soit par la jurisprudence, soit par la loi, de la fiducie. On
peut noter que l’Ecosse, le Liechtenstein, l’Afrique du Sud, l’Ethiopie,
Israël, Puerto Rico, le Japon, ou encore
La France ne peut pas rester
insensible à la globalisation de cet instrument juridique. Il serait vain de mettre en
exergue le fait que le système français est déjà enrichi de certaines fiducies
« innommées », c’est-à-dire qui n’ont pas reçu de la loi cette
qualification mais qui en ont néanmoins les principales caractéristiques. En
effet, d’une part, il n’est pas souhaitable d’introduire des mécanismes en cachant
leur réalité juridique et en omettant de leur accorder la qualification qui
leur est appropriée. D’autre part, la loi doit pourvoir de manière générale aux
besoins des sujets de droit. Une loi permettra d’unifier le régime fiduciaire,
alors que la multiplication des fiducies innommées implique le risque que des
régimes multiples fleurissent, sans justification réelle derrière ces
différences. La multiplication de ces fiducies innommées au champ d’application
restreint illustre, de facto, la compatibilité de la fiducie et du
droit français. Mais la loi perd de son caractère d’application générale
dans de tels cas.
La concurrence accrue, phénomène économique
actuel, a eu des incidences sur les rapports juridiques qui se sont,
corrélativement, internationalisés. Ceci a entraîné une globalisation des
instruments juridiques.
Les principales applications futures de la fiducie s’exercent
sans doute dans la vie économique et pour le bénéfice de personnes en
difficultés. L’internationalisation de la vie économique a conduit les
praticiens du droit français à se familiariser avec cette pratique et à en
apprécier l’utilité, en particulier dans la vie des affaires. L’intérêt pour
des personnes « vulnérables » de recourir à la fiducie ne peut
pas non plus être négligé ; au contraire, il milite même fortement en faveur de
l’adoption de la fiducie.
L’ouverture des frontières a donné lieu à certaines délocalisations
d’opérations économiques vers des pays plus attrayants d’un point de vue fiscal
ou juridique. Au cours de ces dernières années, en effet, on a pu constater que
les entreprises françaises, lorsque le besoin s’en faisait sentir, n’hésitaient
pas à utiliser le mécanisme du trust, en effectuant, en toute légalité,
leurs opérations juridiques dans les États connaissant l’institution.
Ces délocalisations ne sont pas souhaitables
économiquement, car des richesses quittent la France, parfois exclusivement à
cause d’une lacune du système juridique. Le Président de la République, dans
son discours prononcé en mars 2004 dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne à
l’occasion du bicentenaire du code civil, a appelé de ses vœux une modernisation
ou un rajeunissement de certaines parties du code civil. L’introduction de la
fiducie dans ce code est une occasion idoine d’y contribuer.
Ces délocalisations ne sont pas non plus souhaitables
en ce qu’elles rendent plus difficilement contrôlables certains flux
économiques, dès lors que les richesses quittent le territoire français. La
fiducie permettra aux acteurs économiques de bénéficier en France d’un outil
qu’ils réclament, et ainsi les vérifications par certains services de l’État,
si certaines devaient avoir lieu, seront plus aisées. La fiducie n’a pas
vocation à servir d’instrument de blanchiment de capitaux ; bien au contraire, la
fiducie devrait produire, dans une certaine mesure, l’effet inverse. En
permettant aux acteurs économiques de bénéficier en France d’un instrument
aussi souple que le trust, il leur sera plus difficile de justifier le
recours à des structures hors France, en particulier dans certains pays hors
Union européenne. C’est ainsi que cette proposition propose d’étendre
l’application aux fiduciaires des dispositions relatives au blanchiment de
capitaux intégrées récemment dans le code monétaire et financier. En outre,
les dispositions du code pénal sanctionnant déjà de manière large le
blanchiment seront de plein droit applicables, sans qu’il soit nécessaire
de modifier ce code.
Outre les délocalisations, d’autres facteurs incitent
à fournir à la France un régime cohérent de fiducie, traduisant sous ces traits
le trust.
Le 15 novembre 2001, le Parlement européen a adopté
une résolution prévoyant une harmonisation des droits européens dans
divers domaines, dont celui du trust. Ceci pose à nouveau la question de
la réception du trust au travers de la fiducie.
Le 2 mai 2003, la Commission européenne a publié un
document intitulé Best practice guidelines for divestiture commitments in
merger cases, incluant un contrat-type de trust, ayant
vocation à s’appliquer lors de rapprochements entre sociétés soumises à
autorisation préalable de la Direction générale de la concurrence de la
Commission européenne et lorsque des cessions d’actifs seront exigées par cette
autorité. Cette réflexion amène également à s’interroger sur l’équivalent
possible au trust en France.
Les praticiens ont été nombreux à réclamer
l’introduction d’une fiducie, dont les applications de gestion ou de garantie
ont été vantées. C’est ainsi, par exemple, que des biens pourront être mis en
fiducie afin de garantir une ou plusieurs créances, au bénéfice d’un ou
plusieurs créanciers : le transfert de titularité offrira l’avantage de la
« propriété-sûreté » aux créanciers, ce qui devrait entraîner une
baisse du coût du crédit pour le débiteur, corollaire du risque réduit pour le
créancier. Ou encore, une ou plusieurs personnes pourront transférer des biens,
afin qu’ils soient gérés par autrui. Le recours au mandat pour ce genre de
situations a déjà montré ses limites, notamment à cause de la révocabilité qui le
caractérise.
La fiducie peut également constituer un moyen pour les
personnes qui le souhaitent de confier leurs biens à autrui, qui aura la charge
de les gérer pour leur compte. On pense notamment au recours à la fiducie par
des « personnes en difficulté » ou « personnes vulnérables »
(personnes ayant eu un accident, affectées par les séquelles d’une maladie ou
autre), mais qui ne bénéficient pas aujourd’hui de la possibilité de recourir à
la tutelle ou à la curatelle notamment. La fiducie, régime volontaire et
contractuel, permettra notamment à toute une série de catégories de personnes
d’être déchargée de la gestion de biens, tout en les attribuant à une personne
de confiance (le fiduciaire) qui devra les gérer avec loyauté et attention (ou
diligence) pour leur bénéfice. L’utilisation par des personnes physiques de cet
instrument pourra être d’un intérêt d’autant plus grand que le vieillissement
de la population française devient une réalité à prendre pleinement en compte,
certaines personnes étant susceptibles de préférer être déchargées de la
gestion de leurs biens en ayant recours à une personne de confiance. La fiducie
n’impliquera pas une surcharge pour les tribunaux, étant d’origine
contractuelle. Elle ne nuira pas à la protection des personnes en très grandes
difficultés, les régimes impératifs légaux (tutelle notamment) demeurant
applicables le cas échéant. En outre, seule une personne non-sujette à une
incapacité de transférer la propriété de biens, de disposer de sa propriété,
pourra valablement conclure une fiducie.
À l’origine, des difficultés de nature fiscale ont été
un frein à l’adoption du projet de loi instituant la fiducie déposé sur le
Bureau de l’Assemblée nationale le 20 février 1992. C’est alors qu’un nouvel
avant-projet a été préparé, limitant aux seules personnes morales la faculté
d’être constituants d’une fiducie. Une personne morale ne devant pas, en
principe et sous peine qu’un abus de bien social ou un acte anormal de gestion
soit commis, procéder à des mutations à titre gratuit, cette restriction devait
permettre de résoudre le problème fiscal. C’est alors que tant le Service de la
législation fiscale que son ministère de tutelle, celui du Budget, ont confirmé
qu’il n’y avait pas (ou plus) de blocage du texte sur la fiducie pour des
raisons fiscales. C’est dans cette perspective que cette proposition s’inscrit.
Afin d’éviter les difficultés fiscales et les risques de fraudes en cas de transmission,
il y est prévu que « la fiducie ne peut pas, à peine de nullité,
être utilisée aux fins de transfert à titre gratuit de droits du constituant à
un tiers ». Le risque de fraude aux droits de mutation en cas de
transfert à titre gratuit disparaît ainsi. Il semble également préférable
d’attendre une éventuelle refonte des barèmes des différents impôts applicables
lors des transmissions de biens à titre gratuit par des personnes physiques
pour, alors, leur étendre le bénéfice d’application de ce texte. Néanmoins,
cette condition permet d’éviter tout risque de fraude par le jeu de mutations à
titre gratuit et permet en outre l’utilisation par des personnes physiques de
cet instrument dans cette limite. Le principe fiscal retenu est celui de la transparence
: traiter le constituant comme s’il était encore titulaire des droits
transférés au fiduciaire.
Par contre, ce sont les difficultés suscitées par
la rencontre de la fiducie et du droit civil qui ont été avancées alors
pour expliquer l’absence d’adoption du projet de loi instituant la fiducie, et
ce tant par la Chancellerie que par le Service de la législation fiscale. Ces
difficultés semblent aujourd’hui pouvoir être surmontées, la réception du trust
au travers de la fiducie ayant été démontrée ainsi que la possible intégration
harmonieuse de la fiducie au sein du droit civil, aucun bouleversement du droit
civil lors de cette réception de la fiducie ne doit advenir.
La fiducie, comme le trust, implique en
principe trois acteurs, impliqués dans une relation triangulaire. La
pièce peut être schématiquement décrite ainsi : le premier acteur, le constituant
(settlor), va transférer des droits patrimoniaux à un fiduciaire (trustee),
qui va les détenir en vue de réaliser une affectation déterminée, en faveur du
ou des bénéficiaires (cestui(s) que trust). Les droits patrimoniaux
incluent les « biens » au sens commun. L’affectation pourra consister
en la création d’une garantie ou d’une charge de gestion.
Pour protéger les bénéficiaires, les droits mis en trust
ou fiducie sont détenus de façon séparée, dans un patrimoine d’affectation.
Cette seule caractéristique justifie le recours à une loi pour introduire la
fiducie, afin de prévoir une exception aux articles 2092 et 2093 du code civil.
De manière plus générale, si certaines applications du
mécanisme fiduciaire violent des règles d’ordre public, ce n’est pas la nature
même de l’institution qui est en cause, mais l’application qui en est faite. Et
dans de tels cas, la violation devra, comme toute violation de l’ordre
public, être sanctionnée.
Il est, sans doute, préférable que la loi consacrant
la fiducie en droit français se limite à disposer des seuls éléments
fondamentaux permettant de régir les aspects principaux de la fiducie, afin
d’éviter d’encadrer trop strictement les diverses situations pouvant advenir. Le
texte se doit de rester un texte général, « de droit commun » ;
sa physionomie offre une grande liberté contractuelle aux personnes qui
auront recours à cet instrument. Ceci conduit à préférer, comme proposé par
certaines doctrines, l’insertion d’un régime de fiducie au sein du code civil
(ainsi que le législateur québécois a procédé et ainsi que ceci était proposé
au législateur français), afin d’insister sur l’intégration de cet instrument
dans le droit commun, plutôt qu’en ayant recours à un texte spécial (solution
retenue par le législateur libanais ou luxembourgeois). Des analogies avec les
régimes relatifs en particulier aux modalités de propriété, à la stipulation
pour autrui ou encore aux obligations (notamment de loyauté et de diligences)
des mandataires, permettront de répondre aux éléments qui ne sont pas
explicitement prévus par le texte.
La proposition de loi se compose de
cinq chapitres,
consacrés respectivement aux dispositions générales, aux dispositions relatives
à la lutte contre le blanchiment de capitaux, aux dispositions comptables, aux
dispositions fiscales et à des dispositions diverses, de manière analogue au
projet de loi déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale le 20 février 1992
et qui n’a malheureusement jamais été discuté au Parlement.
Le chapitre I du projet formera au livre troisième du
code civil intitulé « Des différentes manières dont on acquiert la propriété
» un titre XVI bis intitulé « De la fiducie ». Il prévoit
les dispositions applicables aux contrats de fiducie, quel qu’en soit l’objet.
La fiducie est définie comme la relation résultant
d’un contrat par lequel un constituant transfère tout ou partie de ses droits à
un fiduciaire, à charge pour celui-ci d’agir, dans un but déterminé, au profit
de bénéficiaires. La fiducie créera donc un nouveau type de contrat spécial.
Cette définition prévoit en outre que le transfert aura lieu dans un patrimoine
séparé du patrimoine personnel du fiduciaire et que les biens transférés seront
grevés d’une charge de gestion. La fiducie crée une forme de propriété modelée.
Elle n’est donc pas la création d’un nouveau droit réel ; on ne pourra
pas lui objecter une éventuelle atteinte à un numerus clausus des droits
réels. La propriété fiduciaire, contrairement au droit anglais, n’implique pas
de dédoublement de la propriété, aucun droit réel n’étant conféré au
bénéficiaire de la fiducie.
La proposition ne précise que les particularités
propres de ce contrat qui sera, s’il n’en est disposé autrement, soumis aux
principes généraux du droit des obligations. Les règles relatives à la
stipulation pour autrui pourront ainsi avoir vocation à jouer, sauf disposition
contraire, lors de fiducies pour le bénéfice de tiers. La fiducie doit en effet
s’intégrer dans l’ordre juridique préexistant, dont elle ne saurait bouleverser
la cohérence. Il n’est donc pas nécessaire que la loi rappelle, de façon
expresse, que la fiducie ne doit pas déroger aux règles impératives ou d’ordre
public, ou encore qu’elle ne saurait constituer une fraude ; ceci va de soi
et sera automatiquement sanctionné par le recours aux règles de droit commun.
Il n’est donc pas nécessaire que la proposition de loi le rappelle.
Le contrat de fiducie est passé entre un constituant
et un fiduciaire.
À la différence des pays de common law où le constituant
(settlor) peut devenir trustee, un tel cumul de fonctions ne
sera pas possible : ceci évitera tout doute sur une éventuelle mise
à l’abri des créanciers dans un patrimoine d’affectation détenu par le
constituant de certains droits de ce même constituant.
Il est en revanche admis que le constituant peut réaliser
une fiducie à son profit et être par conséquent le seul bénéficiaire. Il est
également admis que le fiduciaire pourra être le seul bénéficiaire. Ceci
permettra notamment de recourir à des fiducies-garanties.
En ce qui concerne les bénéficiaires, le contrat peut
les désigner de façon précise ou prévoir seulement les règles de leur
désignation ; afin que la fiducie soit aussi souple que le trust, il est
prévu que le contrat peut stipuler que le fiduciaire a l’option, y compris
discrétionnaire, de transférer des droits à une partie seulement des
bénéficiaires. Le ou les bénéficiaires du contrat ne sont pas parties à
celui-ci. Le droit commun de la stipulation pour autrui aura vocation à s’appliquer.
Le fiduciaire, pivot de l’institution, peut
être une personne physique ou une personne morale. Il ne doit pas avoir subi
certaines condamnations pénales ou disciplinaires, qui feraient suspecter
sa capacité à gérer des biens pour le compte d’autrui ou qui seraient
incompatibles avec la confiance que le constituant place en lui. C’est ainsi
que tant la faillite personnelle (au sens de l’article L. 625-2 du code de commerce),
qu’une interdiction « d’exercer une activité professionnelle »
au sens de l’article 131-28 du code pénal (à condition d’être relative à la
gestion de droits d’autrui, que ce soit leurs biens ou leurs intérêts), ou
encore que l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler une
entreprise (au sens de l’article 6 du décret-loi du 8 août 1935 ou de
l’article L. 625-8 du code de commerce) sont spécifiquement visés. Il y
est aussi prévu que nul ne peut être fiduciaire en cas de « condamnation
pénale ou (de) sanction professionnelle pour des faits contraires à l’honneur,
à la probité ou aux bonnes mœurs », permettant d’écarter également ces
personnes de l’accès à la fonction de fiduciaire (la « probité »
implique en particulier une absence de condamnation au titre du blanchiment).
Est également prévu que l’interdiction sera étendue en cas de non respect des
dispositions sur le blanchiment de capitaux. Les dirigeants de personnes
morales fiduciaires ne devront pas non plus avoir été soumis à de telles
peines.
Le fiduciaire, conformément au droit commun, devra, le
cas échéant, faire l’objet des autorisations spécifiques à certains
domaines. C’est ainsi, par exemple, que conformément à l’alinéa premier de l’article
L. 313-1 du code monétaire et financier, « constitue une opération
de crédit tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou
promet de mettre des fonds à la disposition d’une autre personne ou prend, dans
l’intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu’un aval, un
cautionnement ou une garantie ». Le texte ne distinguant pas les
qualités d’une « personne », une activité de fiduciaire pourra être ainsi
qualifiée d’opération de crédit et le fiduciaire devra dès lors se soumettre à
la réglementation applicable.
La confiance nécessaire entre les
contractants est inhérente à ce contrat. Le corollaire de cette confiance
est que le fiduciaire doit réaliser lui-même les tâches qui lui sont
confiées, sauf certains actes précis – mais pour lesquels il demeurera
responsable. Les parties pourraient déroger à cette règle et interdire toute
forme de délégation. Ces tâches doivent être réalisées avec loyauté et
diligence (ou attention), deux facettes des obligations fiduciaires,
traduction française des fiduciaries duties (duty of loyalty, duty
of care) du droit anglais. Le fiduciaire doit éviter tout conflit d’intérêt
entre son intérêt personnel et l’intérêt de la fiducie (ou des bénéficiaires de
la fiducie). En particulier, le fiduciaire ne peut pas se rendre adjudicataire
des biens fiduciés, sans préjudice de la possibilité d’être bénéficiaire
(l’article 1596 du code civil est ainsi modifié). Le contrat pourra, sauf en ce
qui concerne l’interdiction pour le fiduciaire d’acquérir les biens de la
fiducie, déroger à cette interdiction de principe. La dérogation contractuelle
offrira une certaine souplesse (permettre au fiduciaire qui est affilié à un
groupe bancaire par exemple, de procéder à certains placements de liquidités du
patrimoine fiduciaire au sein des OPCVM de ce groupe), tout en offrant la
protection nécessaire du constituant, puisque la dérogation devra être
approuvée contractuellement par ce dernier. Un conflit d’intérêt, soit entre
une fiducie et une autre fiducie, soit entre bénéficiaires, n’entraîne pas une
interdiction d’agir pour le fiduciaire. Le fiduciaire conserve ses
prérogatives, qu’il doit seulement exercer « en bon père de famille »,
formule déjà employée par le code civil, et qui permettra qu’il pèse
soigneusement les intérêts en présence avant de prendre une décision.
Le fiduciaire doit rendre compte de
l’accomplissement de ces tâches.
En cas de pluralité de fiduciaires, le droit commun de
l’indivision jouera. Cette règle est toutefois supplétive de volonté et les
parties peuvent y déroger si elles le souhaitent.
Si les activités que le fiduciaire est appelé à
exercer en cette qualité sont réglementées, le fiduciaire est soumis à cette
réglementation.
En cas de décès du fiduciaire personne physique, les
biens fiduciés ne font pas partie de sa succession. De même, en cas de
dissolution du fiduciaire personne morale, les biens fiduciés ne sont pas
inclus dans l’actif partageable ou transmissible.
Elles sont au nombre de six et concernent :
Le constituant peut transférer au fiduciaire tout type
de droits (en ce compris « des biens » et céder des contrats). Pour
éviter tout doute, la proposition prend la peine de rajouter « de quelque
nature ».
La mention de la finalité de la fiducie est obligatoire.
À peine de nullité, la fiducie ne peut pas être utilisée aux fins de transfert
à titre gratuit de droits du constituant à un tiers. Il s’agit donc d’une
mention impérative. Cette seule mention ne créera pas une présomption de
légitimité ; le juge aura notamment, le cas échéant, le devoir de s’assurer que
les parties démontrent que la finalité réelle n’est pas celle d’un tel
transfert à titre gratuit, nonobstant cette stipulation.
Les prérogatives conférées au fiduciaire pourront être
très variées, permettant de mettre en place tant des fiducies-gestion
que des fiducies-garanties. L’étendue des prérogatives du fiduciaire
devra être précisée dans le contrat et sera laissée à la libre appréciation des
parties, dans les limites évidentes et naturelles de l’ordre public et des
règles impératives.
La finalité de la fiducie et l’étendue des
prérogatives du fiduciaire seront des éléments qui permettront au juge
d’apprécier plus commodément la responsabilité du fiduciaire, en vérifiant
que les actes qu’il accomplit sont bien conformes à cette mission.
Les stipulations limitant le champ de prérogatives ne
sont, ainsi que la doctrine l’a démontré, que l’expression de la liberté
conventionnelle qui doit prévaloir en droit français.
La désignation des pouvoirs de disposition du fiduciaire
permettra, notamment en cas de fiducie conclue à des fins de garantie, d’éviter
que le patrimoine fiduciaire soit statique. Il permettra, si les parties le
souhaitent, que la garantie porte, en quelque sorte, sur un flux de biens, de
nature à assurer une meilleure gestion. L’exemple du gage de compte
d’instruments financiers vient conforter la réalité de cette utilité
potentielle.
Le fiduciaire, bien que propriétaire, gère les biens
transférés non pas dans son intérêt mais dans celui assigné à la finalité de la
fiducie, dont le résultat reviendra aux bénéficiaires. Il est donc nécessaire
que le contrat permette d’identifier ou fixe les règles de détermination des
bénéficiaires. Le contrat pourra même prévoir, selon une souplesse équivalente
à celle du droit anglais, que le fiduciaire procède de manière discrétionnaire
à la distribution des biens au sein du groupe des bénéficiaires. Le droit du
bénéficiaire est également cessible, permettant de maximiser la flexibilité
pour le bénéficiaire de profiter de la valeur représentée par ce droit
« dans » la fiducie (en cédant son droit à autrui).
Il est nécessaire que soit clairement établi le fait que
les droits reviennent au constituant en fin de contrat ou sont attribués à des
tiers bénéficiaires. Il est essentiel de savoir à quel titre les biens seront
transférés selon les stipulations du contrat.
En tout état de cause, les obligations du fiduciaire
étant des obligations personnelles, et non pas propter rem, elles ne se
transmettent pas au bénéficiaire. La titularité affectée redevient alors,
une fois transférée, une titularité ordinaire.
En droit anglais, le trust ne peut excéder 80
ans ou la durée de vie de l’une des personnes mentionnées à l’acte, à laquelle
on ajoutera 21 ans après son décès. Cette règle permet de ne pas favoriser le
gel des patrimoines pendant une durée qui excèderait deux générations.
Il s’agit d’empêcher l’inaliénabilité
de droits durant une période excessive, afin de permettre la libre
circulation des biens, principe d’ordre public. La durée de 99 ans prévue par la
présente proposition de loi est identique à la durée maximale des sociétés
(sauf prorogations). Un contrat de fiducie ne pourra pas être prorogé une fois
arrivé à son terme. Cependant rien n’empêchera, une fois les droits transférés
aux bénéficiaires, que les bénéficiaires décident d’une nouvelle fiducie ayant
le même objet que la précédente.
Le contrat est passé sous forme solennelle :
ceci implique, selon la présente proposition, la rédaction d’un écrit afin d’en
assurer validité.
Le projet de loi instituant la fiducie de 1992
prévoyait que la fiducie devait être expresse, afin, selon son exposé des
motifs, d’en faciliter la preuve, ce qui sous-entendait que l’écrit n’était
requis qu’à titre probatoire. La présente proposition préfère imposer qu’un
écrit soit nécessairement requis, afin que les parties désireuses de se
prévaloir du régime spécial de la fiducie soient dans l’obligation de passer un
contrat par écrit, lequel pourra être exigé lors de certaines vérifications par
les autorités de l’État, évitant ainsi des risques d’abus.
Il va de soi lorsque la fiducie implique des formes
spéciales selon l’objet des droits (par exemple en cas de transmission d’un
immeuble du constituant au fiduciaire), les règles propres à ce domaine devront
en outre être respectées. La proposition de loi ne rappelle pas expressément ce
principe, puisqu’il n’est qu’une application du droit commun, mais il va de soi
qu’il conviendra de s’y conformer.
L’objet du contrat est un transfert de droits
(lesquels incluent nécessairement les « biens »), accompagné d’une charge de
gestion, telle que définie dans le contrat. Les droits susceptibles d’être cédés
peuvent être des contrats ; dans un tel cas, les aspects actifs et passifs
du contrat sont transférés. Le droit commun de la cession de contrat a vocation
à s’appliquer en principe ; la proposition prévoit, de manière analogue à
ce qui existe en matière de fonds commun de créances, que la cession de
créances sera opposable aux tiers de manière simplifiée.
Le recours à la fiducie permettra bien souvent
d’éviter de recourir à des institutions juridiques plus formalistes ou à des
montages complexes et fragiles. Elle constituera un cadre juridique adapté à
des opérations, telles que le portage de titres, qui n’ont pas à ce jour reçu
de définition légale.
Les droits transférés vont former un « patrimoine
séparé », distinct du patrimoine personnel du fiduciaire. Les droits
ne pourront être saisis ni par les créanciers du constituant, ni par ceux, personnels,
du fiduciaire. La « faillite » personnelle du fiduciaire ne permettra
pas de mettre ces biens fiduciés à la portée des organes de la procédure
collective ou des créanciers au titre du patrimoine personnel du fiduciaire. Il
s’agit donc d’un patrimoine d’affectation. Contrairement à la pratique
anglo-saxonne, un compte-titre fiduciaire global, sur lequel serait inscrit
l’ensemble des valeurs mobilières fongibles d’un même émetteur gérées par un
fiduciaire dans le cadre de différentes fiducies, ne sera pas autorisé. La
séparation entre les patrimoines doit en effet être stricte. La traçabilité
des flux économiques n’en sera que facilitée.
Si le patrimoine demeure unique, une confusion des
droits en résultera, puisqu’aucun ne pourra être distingué. Par opposition, si
différentes masses de droits peuvent être formées, alors une séparation des
différents droits peut être atteinte. L’enjeu de l’obtention de cette séparation
est évident. Elle permet d’assurer la protection du bénéficiaire-cestui que
trust et offre une meilleure garantie quant à la réalisation effective de
l’affectation. Cette protection résulte de la séparation obtenue entre les
intérêts en présence, intérêts personnels d’un côté, intérêts fiduciaires de
l’autre. Les créanciers de l’un de ces intérêts exerceront un recours
uniquement à l’encontre du patrimoine correspondant, et la cessation des
paiements de l’un n’aura pas de conséquence sur l’autre.
La séparation qui est opérée entre les différents
groupes de droits permet de garantir aux bénéficiaires une autonomie complète
entre les différentes universalités. Les droits n’étant pas confondus, les
créanciers de l’un des patrimoines n’auront comme droit de gage qu’un seul
patrimoine et non l’ensemble.
La mise en place d’un mécanisme fiduciaire n’a pas
comme corollaire de créer une interdiction d’aliénation des droits composant la
masse fiduciaire. Précisément, le mécanisme fiduciaire ne peut exister qu’en
vue de l’accomplissement d’une mission. Or, l’accomplissement de la mission
impliquera fréquemment que certains des droits fiduciés soient cédés et
remplacés. En tout état de cause, lors de la survenance du terme de la fiducie,
les droits seront transférés au bénéficiaire qui pourra en disposer. Une
éventuelle crainte au titre d’une atteinte à la libre circulation des richesses
est donc infondée.
En outre, le contrat pourra prévoir que des biens ou
droits supplémentaires viendront à être transférés au fiduciaire
postérieurement à l’entrée en vigueur de la fiducie ; ceci permettra au
constituant de profiter de la fiducie existante pour augmenter les éléments
d’actifs s’il le souhaite.
Ainsi que certaines doctrines l’avaient noté, le
transfert de la propriété fiduciaire ne met pas la chose aux risques du
fiduciaire. Afin d’éviter tout débat, la présente proposition de loi le prévoit
expressément. La conséquence devrait notamment être que le fiduciaire ne pourra
pas être tenu de la perte fortuite de la chose qui lui avait été confiée. Par
voie de conséquence, sa responsabilité sera engagée en cas de perte non
fortuite.
Le constituant ou le bénéficiaire pourra mettre en
œuvre l’action paulienne prévue par l’article 1167 du code civil en cas
de fraude à ses droits. Le résultat de l’action paulienne bénéficiera au
« patrimoine fiduciaire ».
Afin d’éviter tout abus, il est prévu une présomption
d’action de concert à la charge du constituant en cas de fiducie portant
sur des droits de vote.
La finalité de la fiducie pourra en outre être variée.
Un constituant pourra ainsi confier une gestion
de ses biens à un fiduciaire. Ainsi une personne vulnérable pourra confier des
biens à un fiduciaire, qui les gérera dans son intérêt, en lui reversant
périodiquement les revenus par exemple.
Un constituant pourra aussi avoir recours à la fiducie
pour créer une garantie. On sait que le recours à la réserve de
propriété est très fréquent en pratique ; la fiducie-garantie permettra
d’utiliser sous une nouvelle forme la propriété à titre de garantie. Cette
garantie n’est pas accessoire à la créance garantie. Ceci permettra au
constituant d’affecter en garantie des biens, garantie qui ne s’éteindra pas
automatiquement avec l’extinction de la créance initiale. Cette même garantie
pourra alors jouer au profit d’une nouvelle créance postérieure, sans qu’il
soit nécessaire de créer une nouvelle fiducie, à la condition que le contrat
soit suffisamment précis ; le retransfert des biens mis en fiducie-garantie ne
s’opérera qu’une fois toutes les créances payées, selon les conditions ou modalités
prévues par le contrat. Si la créance garantie est cédée, le bénéfice de la
fiducie-garantie n’est pas transmis de plein droit, mais les parties peuvent
déroger à cette règle. Ne pas rendre la fiducie-garantie accessoire d’une
créance permettra, si les parties le souhaitent, de doubler cette forme de
fiducie d’une fiducie-gestion, en permettant, par exemple, de gérer un ensemble
de biens, tels que des instruments financiers, qui seraient affectés à la garantie
d’une créance. La fiducie-garantie pourra porter sur des créances existantes ou
futures, de manière analogue à ce qui est permis en matière de « cession
Dailly ».
La fiducie-garantie permettra ainsi
de garantir des flux de créances, et que les biens objets de la garantie ne
demeurent pas statiques (via des cessions d’instruments financiers par
exemple). Le contrat de fiducie devra prévoir les modalités d’évaluation des
biens garantis devant être transférés au bénéficiaire en cas de défaillance du
débiteur, afin de limiter les risques d’abus, ce qui interdit de prévoir que le
créancier devienne automatiquement propriétaire du bien garanti. Cette
évaluation pourra par exemple reposer sur la vente amiable du bien par le
fiduciaire. En l’absence de stipulation contractuelle prévoyant les modalités
d’évaluation, le recours à un expert est prévu, sauf pour les biens dont
l’évaluation ne pose pas de difficultés (sommes d’argent, instruments
financiers, créances) et pour lesquels le risque d’abus dans l’évaluation (et donc
l’appropriation) est inexistant.
Le contrat de fiducie peut prévoir
l’éventuelle rémunération du fiduciaire ; la fiducie est sinon
« gratuite », de manière analogue aux dispositions applicables au
mandat.
Pour des biens dont la mutation est soumise à
publicité, celle-ci sera réalisée selon le droit commun au nom du
fiduciaire ès qualités. Ceci
s’appliquera en particulier :
- aux droits transmis du constituant au fiduciaire.
Il peut s’agir par exemple du transfert d’un bien immobilier du constituant au
fiduciaire, ou encore d’une marque, voire même du transfert d’un aéronef ou
navire qui nécessiterait une immatriculation ou inscription sur le registre
dédié. On peut également relever le transfert de la créance gagée d’un vendeur
à crédit de véhicules automobiles, dont la conservation du gage impliquerait la
mention sur un registre spécial conformément au décret du 30 septembre
1953 ;
- aux droits nouveaux - et dont la mutation est
soumise à publicité - acquis par le fiduciaire dans le cadre de sa gestion de
la fiducie ;
- aux garanties prises par le fiduciaire dans
le cadre de sa gestion et qui impliqueraient une publicité : prise d’une
hypothèque par le fiduciaire pour garantir des droits fiduciés impliquant une
publicité, d’un nantissement de fonds de commerce, d’un nantissement de droits
d’exploitation d’un logiciel devant être inscrit sur le registre national
spécial des logiciels, ou encore de warrants impliquant l’inscription sur un
registre à souche ;
- aux droits « constitués » par le
fiduciaire, comme l’acquisition d’un fonds de commerce, ou encore
l’obtention d’un droit de propriété industrielle (brevet, marque, dessin ou
modèle), qui nécessitent un dépôt ou une inscription de son titulaire.
La sanction est l’inopposabilité : inopposabilité aux
créanciers du constituant si le nom du constituant est toujours inscrit,
inopposabilité aux créanciers personnels du fiduciaire si le nom du fiduciaire
n’a pas été inscrit ès-qualité.
Le fiduciaire est réputé, vis-à-vis des tiers de bonne
foi, disposer des pouvoirs les plus étendus sur les biens transférés. La seule
connaissance de la fiducie ne suffira pas à mettre en cause l’étendue de cette
présomption de pouvoirs ; des éléments supplémentaires seront nécessaires. Cette
règle permettra de protéger les tiers qui traiteront avec le fiduciaire.
Les créanciers du constituant qui seraient lésés par
le transfert en fiducie des biens de leur débiteur pourront recourir à l’action
paulienne de l’article 1167 du code civil qui, selon la jurisprudence de la
Cour de cassation favorable à la victime de la fraude, n’exige pas que le
créancier apporte la preuve de la mauvaise foi de son débiteur.
Ces mêmes créanciers pourront également faire annuler
le contrat lorsqu’il aura été passé pendant la période qui sépare la date de
cessation des paiements de celle de l’ouverture d’une procédure collective, dite
période « suspecte ». L’article L. 625-107 du code de commerce est
aménagé pour faciliter le succès de cette action. Cette disposition permettra
de soumettre aux nullités de la période suspecte non seulement les fiducies qui
seraient créées en vertu du nouveau titre du code civil prévu par la présente
proposition de loi, mais aussi les « fiducies » innommées d’ores et
déjà existantes, qui disposent déjà d’un régime analogue sans être qualifiées
de fiducies, et qui jusque là échappaient à ces nullités.
Les créanciers titulaires de sûretés publiées
préalablement au contrat de fiducie ne verront pas remises en cause leurs
garanties.
En cas de changement de fiduciaire, la proposition
prévoit que les créanciers conservent leur droit d’action à l’encontre du
nouveau fiduciaire.
Des intérêts concurrents sur un même patrimoine
fiduciaire conduisent à organiser, en cas de conflit, un contrôle
juridictionnel. La finalité assignée à un droit permet de justifier l’existence
d’un système de contrôle de ces droits. Le titulaire des droits finalisés - le
fiduciaire - devra rendre compte de l’exercice des prérogatives qui lui ont été
conférées.
En cas de faute du fiduciaire, sa responsabilité doit
être appréciée de manière semblable à celle d’un mandataire.
En cas de manquements graves du fiduciaire à ses
obligations, le juge pourra être saisi par les bénéficiaires ou le constituant.
La proposition donne le pouvoir au juge de :
- désigner un administrateur provisoire ;
- remplacer le fiduciaire ;
- ou de mettre fin à la fiducie.
Le texte prévoit l’extension de l’incrimination pénale
relative à l’abus de confiance au fiduciaire. C’est là le corollaire de
la nature particulière du fiduciaire.
La présente proposition de loi renvoie aux articles
900-1 à 900‑8 du code civil, afin de permettre au juge de modifier le
contrat lorsque l’exécution de celui-ci serait rendue difficile ou impossible
par suite d’un changement de circonstances. Il y est toutefois prévu une
dérogation à l’article 900-5 du code civil afin de prévoir que le délai de 10
ans applicable court à compter de la date de signature du contrat.
Outre la survenance du terme ou la réalisation du but
poursuivi, le contrat pourra prendre fin par décision de justice pour les
motifs mentionnés dans la proposition, par exemple la liquidation judiciaire du
fiduciaire. Si tous les bénéficiaires renoncent à leurs droits, le contrat
prend également fin, devenant en réalité caduc. Une exception est toutefois
prévue dans le cas où le constituant est le seul bénéficiaire : sa
« renonciation » ne met pas fin au contrat de fiducie s’il est établi
qu’il n’est plus sain d’esprit. Ceci devrait en particulier permettre d’éviter
qu’une personne « vulnérable » ne mette un terme de manière
impromptue au contrat de fiducie.
Ce terme de la fiducie est cependant supplétif de la
volonté des parties, le contrat pouvant prévoir les conditions de sa poursuite.
En outre, à la demande du constituant ou de l’un des bénéficiaires, le juge
pourra prendre les mesures permettant la poursuite du contrat.
En cas de fin du contrat et d’absence de
bénéficiaires, les droits fiduciés font retour au constituant ou au successeur
de son patrimoine.
Ce chapitre étend au fiduciaire les principales
dispositions du code monétaire et financier relatives à la lutte contre le blanchiment
de capitaux.
En particulier, outre les obligations devant incomber
au fiduciaire, l’établissement de crédit ouvrant un compte au nom du
fiduciaire devra s’assurer de l’identité réelle des bénéficiaires et de la
licéité de certaines sommes, en application notamment des articles L. 563-1 et
L. 562-1 du code monétaire et financier, rajoutant là un degré supplémentaire
de vigilance.
En outre, les dispositions du code pénal sur le
blanchiment seront automatiquement applicables.
La fiducie n’a naturellement pas vocation à être un
moyen de faciliter les blanchiments. L’application de ces dispositions
permettra d’exercer un contrôle opportun.
Le maintien en France de fonds, y compris au sein de
fiducies gérées par des fiduciaires domiciliés en France, permettra de contrôler
plus aisément et efficacement ces flux. On peut supposer qu’il sera
beaucoup plus difficile pour des personnes, quelle qu’elles soient, de
justifier le recours à des structures offshore,
du type partnerships occultes ou autres, alors que la souplesse de
l’instrument fiduciaire devrait permettre de remplir des fonctions équivalentes
en terme d’effets. La différence principale - et de taille - est que le
fiduciaire pourra aisément être contrôlé en France. Il en résultera,
corrélativement, une présomption défavorable au recours aux structures offshore, dès lors que le nouveau régime
de fiducie sera disponible.
L’introduction en droit français de la fiducie sous
forme nommée que prévoit cette proposition de loi implique la définition de son
régime fiscal, ce que précise le chapitre III.
Dans un souci de simplicité et de sécurité, cette
proposition dispose de rendre l’institution totalement transparente sur le
plan fiscal. Le constituant est en quelque sorte toujours réputé
fiscalement titulaire des droits mis en fiducie, et est donc redevable de
l’impôt à ce titre. Ceci évitera en outre le risque d’utilisation de la fiducie
à fins d’évasion fiscale.
Les exceptions au principe fiscal de
transparence sont limitées au cas où l’impôt frappe une activité autonome (TVA, taxe professionnelle)
qui se trouve constituée au sein du patrimoine fiduciaire.
La section 1 définit le régime applicable en matière
de droits d’enregistrement.
Les droits (qui sont des actifs) mis en fiducie sont
considérés, pour l’application des droits de mutation, de l’impôt de solidarité
sur la fortune et des droits de succession, comme demeurant la propriété du
constituant.
Les droits d’enregistrement seront dus en cas de
transfert des droits à des tiers ou au bénéficiaire de la fiducie ou en cas de
transmission du contrat de fiducie par le constituant. En revanche, si les
droits mis en fiducie reviennent au constituant, en sa qualité de bénéficiaire,
les droits de mutation à titre onéreux ne sont pas dus.
L’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration
constatant la formation d’une fiducie est réalisé moyennant la perception d’un
droit fixe de 75 euros.
La section 2 traite des impôts directs.
La rémunération du fiduciaire est imposable dans la
catégorie des bénéfices industriels et commerciaux selon le régime réel. Le
fiduciaire sera tenu aux obligations qui incombent normalement aux exploitants
individuels.
Les résultats de la fiducie sont
compris dans le résultat du constituant. En la matière, le régime applicable
se veut totalement transparent fiscalement. Les résultats de la fiducie sont
déterminés et imposés selon les règles applicables à la nature de l’activité
afférente aux biens ou droits en fiducie. Toutefois, lorsque le bénéficiaire
est une entreprise, le résultat est déterminé selon le régime qui lui est
applicable (impôt sur les sociétés, bénéfices industriels et commerciaux,
bénéfices non commerciaux, bénéfices agricoles).
La mise en fiducie de droits n’entraîne pas
l’imposition des gains ou pertes afférents à la valeur réelle des droits dans
le résultat de l’exercice du transfert. En revanche, ces gains ou pertes sont
imposables lors de la transmission du contrat de fiducie par le constituant, ou
lors de la cession des biens par le fiduciaire.
La section 3 concerne la taxe sur la valeur ajoutée.
Pour l’application de cet impôt, il est pleinement
tenu compte des conséquences du transfert de propriété. Le fiduciaire est
donc regardé comme l’exploitant du bien, éventuellement imposable à ce
titre. En outre, le fiduciaire est considéré comme un prestataire de service
imposable sur sa rémunération.
Lors de la mise en fiducie des actifs, l’obligation de
régularisation éventuelle de la déduction antérieure de TVA peut être
transférée au fiduciaire. Le régime de dispense de taxation en cas de
transmission d’une universalité de biens est applicable si le fiduciaire prend
l’engagement dans le contrat de soumettre à la TVA les cessions ultérieures de
biens et de procéder, le cas échéant, aux régularisations.
La section 4 précise que la taxe professionnelle,
lorsqu’elle est due au titre d’une activité mise en fiducie, est acquittée par
le fiduciaire, chaque fiducie faisant l’objet d’une imposition autonome.
L’activité de fiduciaire est par ailleurs assujettie à la taxe professionnelle.
La section 5 traite de diverses dispositions à
caractère fiscal.
C’est ainsi qu’il est prévu que les fiducies sûretés
entraînent la perception des impôts et taxes qui seraient dus en cas de cession
à titre onéreux.
Les règles de recouvrement de l’impôt, et notamment
celles relatives à la solidarité entre le fiduciaire et le constituant, sont
précisées afin que la fiducie ne puisse pas permettre d’organiser une
insolvabilité.
Par ailleurs, afin de faciliter l’action de contrôle
et de recouvrement de l’administration, le fiduciaire domicilié à l’étranger
devra accréditer un représentant fiscal en France, tenu aux mêmes obligations
et passible des mêmes sanctions.
Ce chapitre prévoit les règles comptables particulières
qu’implique la nature de la fiducie. Au-delà de ces dispositions spécifiques, les
règles comptables habituelles s’appliqueront.
Le mécanisme du transfert de droits au fiduciaire doit
faire l’objet de règles qui en assurent la transparence : pour la sécurité des
tiers comme pour celle des bénéficiaires, il doit être possible d’assurer une traçabilité
des biens fiduciés et d’apprécier les opérations qu’engendre leur gestion.
Ainsi, ce chapitre prévoit que tous les fiduciaires
devront établir, pour chaque contrat de fiducie, deux états : le premier
décrivant les droits transférés ainsi que les créances et les dettes liées à la
réalisation du contrat, le second les produits et les charges afférents à ce
contrat.
Lorsque le constituant est soumis aux dispositions des
articles L. 123-12 et suivants du code de commerce applicables aux
commerçants, il constate une créance à l’égard du fiduciaire lors du transfert
des droits à ce dernier.
Aux termes de la présente proposition de loi, le chapitre
« Dispositions diverses » adapte diverses dispositions
existantes du code civil.
Il modifie également le code pénal afin de
soumettre expressément le fiduciaire aux dispositions régissant l’infraction
d’abus de confiance.
Il modifie aussi le code de commerce afin,
d’une part, de soumettre aux nullités de la période suspecte tout contrat de
fiducie conclu par le débiteur à des fins de garantie pour des dettes
antérieurement contractées, et d’autre part, de prévoir une présomption
d’action de concert dans le cas où la fiducie porte sur des droits de vote et où
le constituant est bénéficiaire de cette fiducie.
Ce même chapitre adapte enfin, en conséquence de
l’obligation de publication du nom du fiduciaire ès qualité, certaines dispositions relatives à la publicité de
droits en cas de constitution, mutation ou extinction de la fiducie, telles
celles relatives à la publicité foncière. Ces dispositions permettront de mieux
mettre en exergue les modalités de cette obligation générale de publication du
nom du fiduciaire ès qualité,
obligation qui s’impose indépendamment de la modification de ces textes.
PROPOSITION DE LOI
Chapitre Ier
Dispositions générales
Article 1
Il est inséré dans le Livre troisième du code civil un
Titre seizième bis intitulé « De
la fiducie » et comprenant les articles 2062 à 2070-7 rédigés comme suit :
« TITRE XVI BIS
« DE LA FIDUCIE
« Art. 2062. – La fiducie résulte d’un contrat par
lequel un constituant transfère des droits de toute nature à une personne
physique ou morale dénommée fiduciaire, à charge pour elle de les administrer
ou d’en disposer au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires conformément aux
stipulations du contrat à des fins de gestion, de garantie ou de transmission à
titre onéreux, exclusivement ou cumulativement. Le transfert s’opère dans un
patrimoine d’affectation, appelé patrimoine fiduciaire, distinct du patrimoine
personnel du fiduciaire et de tout autre patrimoine fiduciaire, le fiduciaire
devenant titulaire ou propriétaire fiduciaire des droits transférés.
« Art. 2063 – La fiducie ne peut pas, à peine de
nullité, être utilisée aux fins de transfert à titre gratuit de droits du
constituant à un tiers.
« Le constituant peut être le bénéficiaire ou l’un
d’eux.
« Lorsque la fiducie est conclue à des fins de garantie,
le fiduciaire peut être le bénéficiaire ou l’un d’eux.
« Lorsque plusieurs personnes sont fiduciaires, sauf
stipulation contraire du contrat de fiducie, les dispositions relatives aux
prérogatives des indivisaires prévues aux articles 815-2 et suivants
s’appliquent et les obligations sont solidaires.
« Les créances du constituant et du bénéficiaire sur
le fiduciaire sont cessibles.
« Art. 2064. – Le contrat de fiducie est conclu par
écrit et détermine ou rend déterminables, à peine de nullité :
« 1° les droits faisant l’objet du transfert ;
« 2° la finalité de la fiducie ;
« 3° les prérogatives d’administration et de
disposition dont le fiduciaire est titulaire ;
« 4° le ou les bénéficiaires ;
« 5° les conditions dans lesquelles les droits
doivent être transmis aux bénéficiaires ;
« 6° la durée de la fiducie, qui ne peut excéder quatre-vingt-dix-neuf
ans à compter de la date d’entrée en vigueur du contrat.
« Le contrat peut prévoir qu’après son entrée en
vigueur le constituant pourra transférer des droits supplémentaires au
fiduciaire, sans pour autant créer une nouvelle fiducie, à condition que ces
droits soient déterminés ou déterminables et qu’un écrit soit rédigé à
l’occasion du transfert.
« Le contrat peut également prévoir que le fiduciaire
a l’option, y compris discrétionnaire, de transférer des droits à une partie
seulement des bénéficiaires ou de déterminer leur part.
« Le contrat prévoit la rémunération du fiduciaire.
En l’absence de stipulation, la fiducie est gratuite.
« Art. 2065. – Le contrat de fiducie conclu à des
fins de garantie peut stipuler que des créances futures font l’objet de la
fiducie, à condition de leur suffisante identification.
« Si le contrat de fiducie conclu à des fins de
garantie n’a pas prévu les modalités de l’évaluation de la valeur du droit
transféré au créancier bénéficiaire de la fiducie en cas de défaillance du
débiteur, cette valeur doit être déterminée à dire d’expert, sauf s’il s’agit
de sommes d’argent, de créances ou d’instruments financiers admis aux négociations
sur un marché réglementé. Est réputée non écrite toute stipulation autorisant
le fiduciaire à s’approprier à titre personnel la différence entre la valeur
des droits constitutifs de la garantie et celle des créances garanties.
« Art. 2066. – Le transport de créances du
constituant au fiduciaire est opposable aux tiers à la date stipulée dans le
contrat de fiducie, à condition que le débiteur ait été informé de cette
cession par lettre recommandée par voie postale ou électronique dans un délai
de huitaine.
« Le transfert des droits au fiduciaire n’en met pas
les risques à sa charge.
« Art. 2067. – Nul ne peut être fiduciaire s’il a été
l’objet d’une mesure d’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler
une entreprise, d’une mesure d’interdiction d’exercer une activité
professionnelle de gestion de droits d’autrui, d’une mesure de faillite
personnelle, s’il a violé des obligations prévues au titre VI du livre V du code
monétaire et financier, ou s’il a subi une condamnation pénale ou une sanction
professionnelle pour des faits contraires à l’honneur, à la probité ou aux
bonnes mœurs. Une personne morale ne peut pas être partie à des contrats en
qualité de fiduciaire si l’un de ses mandataires sociaux a été soumis à de
telles peines.
« Art. 2068. – Le fiduciaire doit prendre toutes
les mesures propres à préserver la séparation des patrimoines afin d’éviter la
confusion des droits transférés dans le patrimoine fiduciaire ainsi que des
obligations y figurant, avec les droits ou obligations, soit de son patrimoine
personnel, soit d’autres patrimoines fiduciaires. À cette fin, le fiduciaire
doit notamment ouvrir ès-qualité, auprès d’un établissement de crédit, un
compte dédié aux opérations liées à chaque contrat de fiducie.
« Sans préjudice des droits des créanciers du
constituant titulaires d’un droit de suite attaché à une garantie publiée
antérieurement au contrat de fiducie et hors le cas de fraude aux droits des
créanciers du constituant, les droits transférés ne peuvent être saisis que par
les titulaires de créances nées de la gestion, en ce compris de la
conservation, de ces droits par le fiduciaire.
« Art. 2069. – Lorsque le fiduciaire acquiert un
droit ou constitue une garantie, soumis à dépôt, inscription, enregistrement,
ou publicité, ou lorsque la fiducie porte sur un droit, y compris une garantie,
dont la mutation y est soumise, celui-ci doit mentionner le nom du fiduciaire ès qualités, à peine d’inopposabilité
aux créanciers de la personne inscrite.
« Art. 2070. – Le fiduciaire doit réaliser
personnellement l’objet de la fiducie. Le fiduciaire peut néanmoins confier par
acte écrit l’accomplissement de certaines tâches matérielles ou de certains
actes juridiques à une ou plusieurs personnes restant sous son contrôle et sa
responsabilité. Le constituant ou le bénéficiaire peut agir directement contre
la personne que le fiduciaire s’est substituée, sans préjudice d’un recours
contre le fiduciaire.
« Le fiduciaire exerce ses prérogatives avec diligence
et loyauté. Le fiduciaire doit éviter tout conflit d’intérêt personnel, sauf
stipulation expresse du contrat de fiducie mais sans qu’il soit possible de
déroger à l’article 1596. Le conflit d’intérêt entre bénéficiaires d’une
fiducie ou entre plusieurs fiducies n’empêche pas le fiduciaire d’exercer ses
prérogatives, à condition qu’il agisse en bon père de famille.
« Le fiduciaire
doit rendre compte de l’état de la réalisation de l’objet de la fiducie au
moins une fois par an au constituant et au bénéficiaire.
« Art. 2070-1. –
S’il n’y a convention contraire, le constituant doit indemniser le
fiduciaire des pertes que celui-ci a essuyées à l’occasion de la réalisation de
l’objet de la fiducie, sans imprudence qui lui soit imputable.
Le fiduciaire répond non seulement du dol, mais encore
des fautes qu’il commet dans la réalisation de l’objet de la fiducie.
Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins
rigoureusement au fiduciaire qui exerce à titre gratuit qu’à celui qui reçoit
une rémunération.
« Si l’un des
fiduciaires manque gravement à ses obligations ou met en péril les intérêts qui
lui sont confiés, le constituant ou l’un des bénéficiaires peut demander en
justice la nomination d’un administrateur provisoire, le remplacement du
fiduciaire ou la résiliation de la fiducie.
« Les dispositions de l’alinéa précédent sont
applicables en cas de violation des dispositions de l’article 2067.
« La décision judiciaire de remplacement du fiduciaire
ou de résiliation de la fiducie emporte de plein droit le dessaisissement du
fiduciaire. En cas de remplacement du fiduciaire, les créanciers ayant un droit
d’action sur le patrimoine fiduciaire conservent ce droit contre le nouveau
fiduciaire ès qualité. En cas de
résiliation de la fiducie, ces créanciers conservent leur droit contre les bénéficiaires
ou le constituant selon que les droits du patrimoine fiduciaire sont transférés
aux premiers ou au second. Les mêmes règles s’appliquent à l’égard des
débiteurs contre lesquels le fiduciaire avait un droit d’action au titre du
patrimoine fiduciaire.
« Art. 2070-2. – Dans ses rapports avec les
tiers, le fiduciaire est réputé disposer des pouvoirs les plus étendus sur les
droits compris dans le patrimoine fiduciaire, à moins qu’il ne soit démontré
que les tiers avaient connaissance de la limitation de ses pouvoirs. La seule
connaissance de la fiducie est insuffisante à renverser cette présomption.
« Art. 2070-3. – Le fiduciaire peut demander la
résiliation ou la révision du contrat de fiducie dans les conditions des
articles 900-1 à 900-8 à compter du dixième anniversaire de la signature du
contrat.
« Art. 2070-4. – Si une action est intentée sur
le fondement de l’article 1167 par le constituant ou le bénéficiaire et par
dérogation à cet article, l’inopposabilité de l’acte attaqué bénéficie au fiduciaire
ès qualité.
« Art. 2070-5. – En cas de redressement ou de liquidation
judiciaire du fiduciaire, les droits compris dans le patrimoine fiduciaire ne
sont pas sujets à cette procédure.
En cas de décès du fiduciaire, les droits compris dans
le patrimoine fiduciaire ne font pas partie de sa succession. En cas de
dissolution d’une personne morale ayant la qualité de fiduciaire, ces droits ne
font pas partie de l’actif partageable ou transmissible à titre universel.
« Art. 2070-6. – La fiducie prend fin par la
survenance du terme fixé ou la réalisation du but poursuivi, quand celle-ci a
lieu avant ce terme. La seule extinction des créances objets d’une fiducie
conclue à des fins de garantie n’entraîne pas de plein droit sa fin.
« En l’absence de stipulations prévoyant les
conditions dans lesquelles le contrat se poursuivra et à défaut pour le juge, à
la demande du constituant ou de l’un des bénéficiaires, de prendre toutes
mesures permettant la poursuite du contrat, la fiducie prend également fin par
une décision de justice lorsque se produit l’un des événements ci-après, sauf à
ce qu’une stipulation ait prévue une telle fin de plein droit :
« 1° la renonciation de la totalité des
bénéficiaires, sauf si le constituant est le seul bénéficiaire et qu’il est établi
qu’il n’est plus sain d’esprit ;
« 2° le décès de l’un des fiduciaires ;
« 3° la liquidation judiciaire de l’un des
fiduciaires ;
« 4° la dissolution de l’une des personnes
morales partie au contrat en qualité de fiduciaire, le contrat pouvant cependant
se poursuivre jusqu’à la clôture des opérations de liquidation ;
« 5° la disparition de l’une des personnes
morales partie au contrat en qualité de fiduciaire, par suite d’une absorption
ou d’une cession prononcée dans le cadre d’un redressement ou d’une liquidation
judiciaire.
« En cas de disparition ou de perte de capacité du
fiduciaire, tout intéressé peut demander en justice la nomination d’un
administrateur provisoire en l’attente d’une décision au fond.
« Art. 2070-7. – En cas de fin de la fiducie par
renonciation du bénéficiaire, les droits font retour au constituant. En cas de
fin de la fiducie préalablement à la survenance du terme fixé ou à la
réalisation du but poursuivi pour une cause autre que la renonciation du
bénéficiaire, les droits font retour au constituant, sauf à ce que le contrat
prévoie leur transmission au bénéficiaire.
« Lorsque la fiducie prend fin, et en l’absence
de bénéficiaires pour quelque cause que ce soit, les droits et le passif du
patrimoine fiduciaire font retour au constituant par l’effet d’une transmission
universelle. Si le constituant est décédé, la transmission accroît la
succession. Si le constituant a disparu par l’effet d’une dissolution, la
transmission s’opère auprès du successeur de son patrimoine en cas de transmission
universelle ou des ayants droit au prorata de leurs droits dans le partage du
constituant. »
Chapitre II
De
Article 2
Les modifications suivantes sont insérées dans le
Titre sixième intitulé « Obligations relatives à la lutte contre le blanchiment
de capitaux » du Livre cinquième du code monétaire et financier :
I. L’article L. 562-1 est complété par un 15. ainsi rédigé
:
« 15. Aux fiduciaires régis par le titre XVI bis
du Code civil et plus largement, à toute personne gérant par quelque moyen que
ce soit, une fiducie. ».
II. Le 6. de l’article L. 562-2-1 est ainsi rédigé :
« 6. La constitution, la gestion ou la direction
de fiducies de droit français, régies ou non par le titre XVI bis du Code
civil, ou étranger ou de toute autre structure similaire. ».
Chapitre III
Dispositions fiscales
Section 1 - Enregistrement,
publicité foncière et impôt sur la fortune
Article 3
Il est inséré dans le A du I de
« 5. REGIME PARTICULIER À
« Art.
« Art. 649 B – Si le contrat de fiducie est
transmis par le constituant, à titre onéreux ou à titre gratuit, entre vifs ou
à cause de mort, les droits de mutation seront exigibles en fonction de la
nature et de la valeur des droits en fiducie.
« Lorsqu’elles donnent lieu au paiement de la
taxe sur la valeur ajoutée en vertu des dispositions du dernier alinéa du 1 du
7° de l’article 257, les cessions du contrat de fiducie sont soumises à la taxe
de publicité foncière ou au droit d’enregistrement au taux de 0,60 %.
« Art.
« Art. 649 D – Les actes ou déclarations
énumérées à l’article
« Art. 649 E – Lors de l’enregistrement d’un acte
ou d’une déclaration constatant la formation d’une fiducie ou encore lors de
l’enregistrement des autres actes ou déclarations visés à l’article
Section 2 - Impôts directs
Article 4
Il est inséré dans le Titre premier de la première
partie du Livre premier du code général des impôts, un chapitre V intitulé «
Régime particulier à la fiducie » et comprenant les articles 249 à
« CHAPITRE V
« REGIME PARTICULIER A LA
FIDUCIE
« Art. 249 – La rémunération du fiduciaire est
imposable annuellement, selon les cas, à son nom dans la catégorie des
bénéfices industriels ou commerciaux selon un régime de bénéfice réel ou à
l’impôt sur les sociétés.
« Le fiduciaire est, en outre, tenu aux
obligations qui incombent, selon les cas, normalement aux exploitants
individuels ou aux contribuables soumis à l’impôt sur les sociétés.
« Art. 249 A – Le fiduciaire détermine, pour
chaque contrat de fiducie, le ou les résultats de l’exploitation des droits en
fiducie. Il exerce seul les options éventuelles.
« Les résultats de la fiducie sont compris dans
le revenu ou le résultat imposable du constituant pendant la durée de la
fiducie, aussi longtemps que les droits ne sont pas transmis, en tout ou
partie, à titre onéreux par le fiduciaire à un tiers ou au bénéficiaire. Dans
ce dernier cas, ils sont compris, à dû concurrence, dans le revenu ou le
résultat du tiers ou du bénéficiaire.
« Si le contrat de fiducie est transmis, en tout
ou partie, à titre onéreux ou à titre gratuit, entre vifs ou à cause de mort,
les résultats réalisés après la cession sont compris, à due concurrence, dans
le revenu ou le résultat imposable du cessionnaire des droits ou, en cas de
nouvelles cessions, des cessionnaires successifs.
« Art. 249 B – I. Les résultats de la fiducie
sont constitués par les produits nets de la gestion des droits en fiducie et
par les plus-values résultant de leur cession. Ils sont déterminés et imposés
selon les règles applicables à la nature de l’activité afférente aux droits en
fiducie.
« Toutefois si, en application des dispositions
de l’article 249 A, ces résultats sont imposables au nom d’une
personne morale passible de l’impôt sur les sociétés dans les conditions de
droit commun, ou d’une personne qui exerce une activité industrielle,
commerciale, artisanale, agricole ou non commerciale et qui est passible de l’impôt
sur le revenu selon un régime de bénéfice réel, ils sont déterminés selon les
règles applicables au bénéfice réalisé par cette personne.
« Les dispositions de l’article 238 bis K s’appliquent
aux droits mentionnés à cet article qui sont en fiducie par référence à la
qualité du redevable de l’impôt désigné à l’article 249 A.
« II. Pour l’application du présent article, les
amortissements et les provisions pratiqués par le fiduciaire ne sont pris en
compte pour la détermination de la quote-part de résultat revenant au redevable
de l’impôt que si, en application du contrat de fiducie, ce redevable supporte
la charge effective de la dépréciation ou de la perte qu’ils sont censés
couvrir.
« Les amortissements et provisions déductibles
pour la détermination des résultats imposables résultant de l’exploitation de
ces droits par le fiduciaire ne peuvent pas excéder ceux que le constituant
aurait pu lui-même déduire en l’absence de fiducie.
« III. Toute variation ou dépréciation du montant
de la créance ou des créances sur le fiduciaire demeure sans incidence sur le
résultat imposable du redevable de l’impôt désigné à l’article 249 A.
« IV. Les bénéfices professionnels sont soumis à
un régime réel d’imposition.
« V. Les résultats déterminés selon les modalités
prévues au présent article sont imposés, au titre de chaque année ou de chaque
exercice, au nom du redevable de l’impôt désigné à l’article 249 A. Dans la
situation visée au deuxième alinéa du I du présent article, les résultats à
prendre en compte sont ceux des exercices clos au cours de l’exercice du
redevable de l’impôt désigné à l’article 249 A ou de l’année au titre de
laquelle il est imposé. Ils demeurent sans incidence sur les revenus ou les
résultats imposables personnels du fiduciaire.
« VI. Le chiffre d’affaires qui provient de la
gestion des droits en fiducie s’ajoute à celui qui est réalisé par le redevable
de l’impôt désigné à l’article 249 A, pour l’application des articles 69, 69A,
72 et 96.
« Le chiffre d’affaires qui provient de la
gestion des droits en fiducie s’ajoute à celui qui est réalisé par le redevable
de l’impôt désigné à l’article
« Art. 249 C – I. Le transfert des droits à une
fiducie, ou leur retour, n’est pas un fait générateur d’impôts. Les droits en
fiducie sont réputés exploités par le fiduciaire pour le compte du constituant.
« II. Lorsque le constituant transfère à un
fiduciaire des droits, qu’ils soient ou non inscrits à l’actif d’un bilan, les
plus ou moins values et, plus généralement, les gains ou pertes afférents à la
valeur réelle des droits ne sont pas compris par le constituant dans le
résultat imposable de l’année ou de l’exercice de transfert.
« III. Si le contrat de fiducie est transmis à
titre onéreux ou à titre gratuit, entre vifs ou à cause de mort, les plus ou
moins values et, plus généralement, les gains ou pertes correspondants à la
valeur réelle des droits à la date du transfert par référence à la valeur
d’acquisition des droits par le constituant ou, dans le cas d’une entreprise, à
leur valeurs nettes comptables, sont calculés selon les règles applicables aux
transmission à titre gratuit ou onéreux entre vifs ou à cause de mort des
droits considérés et sont compris dans le résultat de l’année ou de l’exercice
de transfert.
« IV. En cas de cession à titre onéreux des
droits en fiducie par le fiduciaire au bénéficiaire de la fiducie ou à un
tiers, les mêmes règles exposées au III s’appliquent.
« Art. 249 D – I. Le fiduciaire produit au
service des impôts dont il relève, avant le 31 mars, une déclaration qui
mentionne l’appellation de la fiducie et son activité, la nature et la
consistance des droits en fiducie ainsi que le montant, la nature et, le cas
échéant, la répartition par redevable des résultats de la fiducie.
« II. Le fiduciaire produit également au
constituant, dans le même délai, en vue de l’établissement de l’impôt de
solidarité sur la fortune, une déclaration faisant apparaître, au premier
janvier de chaque année, la nature et la consistance des droits en fiducie.
« Art. 249 E – Le fiduciaire tiendra les états
mentionnés à l’article 23 de la présente loi lorsque le redevable n’est pas une
personne morale passible de l’impôt sur les sociétés dans les conditions de droit
commun ou une personne qui exerce une activité industrielle, commerciale,
artisanale, agricole ou non commerciale et qui est passible de l’impôt sur le
revenu selon un régime de bénéfice réel. Pour l’application des dispositions du
code général des impôts et du livre des procédures fiscales, lesdits états
tiennent lieu de bilan et de compte de résultat pour chaque patrimoine
fiduciaire.
« Dans le cas contraire, le fiduciaire tient une
comptabilité correspondante aux règles de détermination du résultat auxquels
est soumis le redevable de l’impôt désigné à l’article 249 A.
« Art.
« II. Le constituant est considéré comme
propriétaire des droits en fiducie ou réputé exercer directement l’activité en
fiducie pour l’application de toute disposition du présent code faisant
référence à cette qualité ou à l’exercice d’une telle activité, sauf
disposition expresse contraire.
« Toutefois, l’engagement mentionné au c) du 1°
de l’article 145 est pris par le fiduciaire pour les titres acquis en fiducie.
Si cet engagement a été pris par le constituant pour les titres transférés en
fiducie, le fiduciaire s’engage à conserver ces titres jusqu’à la fin du délai
de deux ans pour lequel s’était obligé le constituant. »
Section 3 - Taxe sur la
valeur ajoutée
Article 5
Il est inséré dans le code général des impôts un
article
« Art. 285 A – Pour les opérations relatives à
l’exploitation de droits constitués en fiducie, le fiduciaire est considéré
comme un redevable distinct pour chaque contrat de fiducie, sauf pour
l’application des limites de régimes d’impositions et de franchises pour
lesquelles est retenu le chiffre d’affaires réalisé par l’ensemble des fiducies
ayant un même constituant. »
Article 6
I. Le premier alinéa du III de l’article 210 de
l’annexe II au code général des impôts est ainsi rédigé :
« L’obligation prévue au présent article peut
être transférée à une société absorbante, à une société bénéficiaire de
l’apport du bien ou au fiduciaire. »
II. L’article 210 de l’annexe UU au code général des
impôts est complété par un V. ainsi rédigé :
« V. En cas de transfert à un fiduciaire ès
qualité d’immeubles, le constituant est dispensé des régularisations prévues au
présent article si le fiduciaire s’engage, dans le contrat de fiducie, à
effectuer, s’il y a lieu, les régularisations auxquelles le constituant aurait
dû procédé lui‑même s’il avait continuer à utiliser
l’immeuble.
« Les transferts à titre fiduciaire de biens
mobiliers d’investissement effectués dans le cadre de la transmission d’une
universalité d’une universalité de biens sont dispensés de l’imposition à
Article 7
Le 1° du IV de l’article 256 du code général des
impôts est ainsi rédigé :
« 1° Les opérations autres que celles qui sont
définies au II, notamment la cession ou la concession de biens meubles
incorporels, le fait de s’obliger à ne pas faire ou à tolérer un acte ou une
situation, les opération à façon, les travaux immobiliers et l’exécution des
obligations de fiduciaire, sont considérées comme des prestations de services.
»
Article 8
Le 1 de l’article 266 du code général des impôts est
complété par un g ainsi rédigé :
« g. – Pour les prestations d’un fiduciaire, par
la rémunération versée par le constituant ou retenue sur les recettes de
l’exploitation des droits en fiducie. »
Section 4 - Taxe
professionnelle
Article 9
L’article 1476 du code général des impôts est complété
par un alinéa ainsi rédigé :
« Les fiducies sont imposées distinctement au nom
du fiduciaire. »
Article 10
Le 2° de l’article 1467 du code général des impôts est
modifié ainsi qu’il suit :
« 2° Dans le cas des titulaires de bénéficies non
commerciaux, des agents d’affaires, des fiduciaires pour l’accomplissement de
leur mission et des intermédiaires de commerce, employant moins de cinq
salariés … (le reste sans changement). »
Article 11
Le code général des impôts est complété par un article
« Art. 1518 C – Les transferts et transmissions
résultant de l’exécution d’un contrat de fiducie sont sans incidence sur la
valeur locative des biens concernés. »
Section 5 - Dispositions
communes
Article 12
La transmission définitive au créancier, par
défaillance du débiteur, de droits constitués en fiducie à fins de garantie
entraîne la perception des impôts et taxes exigibles en cas de cession à titre
onéreux.
Article 13
I. Le constituant acquitte les droits de mutation dus
lors de la formation du contrat de fiducie.
II. Le fiduciaire est solidairement tenu au paiement
des impôts dus par le constituant qui correspondent aux droits en fiducie et à
leurs fruits ainsi qu’au paiement des impôts de toute nature dus par le
constituant au titre d’une période antérieure à la formation de la fiducie.
III. La solidarité du fiduciaire s’étend à l’ensemble
des dettes fiscales du constituant.
IV. La solidarité du fiduciaire est limitée à la
valeur des droits faisant l’objet du contrat de fiducie et aux droits acquis en
cours de fiducie ainsi qu’à leurs fruits en sa possession.
Article 14
Le constituant ou ses ayants cause sont solidairement
tenus au paiement des dettes fiscales dues par le fiduciaire au titre des
droits en fiducie.
Article 15
Lorsque le recouvrement des impositions de toute
nature et des pénalités fiscales dues par le fiduciaire au titre des droits en
fiducie a été rendu impossible par des manœuvres frauduleuses ou
l’inobservation grave et répétée de ses obligations fiscales, le fiduciaire
peut être déclaré personnellement tenu au paiement de ces impositions et
pénalités.
À cette fin, le comptable du Trésor ou le comptable de
la direction générale des impôts assigne le fiduciaire devant le président du
tribunal de grande instance dans le ressort duquel se trouve le service où
doivent être acquittés lesdits impôts et pénalités, qui statue selon la
procédure à jour fixe.
Les voies de recours qui peuvent être exercées contre
la décision du président du tribunal de grande instance ne font pas obstacle à
ce que le comptable prenne des mesures conservatoires en vue de préserver le
recouvrement de la créance du Trésor.
Article 16
Le fiduciaire domicilié ou établi hors de France est
tenu de faire accréditer, au moment de l’enregistrement des actes ou du dépôt
des déclarations énumérées à l’article 249 D du code général des impôts, un
représentant domicilié en France qui s’engage personnellement à remplir les
formalités incombant au fiduciaire et à acquitter pour le compte de ce dernier
toutes les impositions et pénalités dues par celui-ci. Cette personne doit alors
justifier qu’elle est en mesure de prendre cet engagement.
À défaut de désignation d’un représentant dûment
accrédité, les impositions en pénalités sont dues par le constituant.
Article 17
I. Le fiduciaire qui n’a pas soumis à l’enregistrement
les actes et déclarations visés à l’article 249 D du code général des impôts ou
qui n’a pas désigné de représentant en France conformément aux dispositions de
l’article 16 de la présente loi est personnellement passible d’une amende égale
à 6 % de la valeur du patrimoine fiduciaire par période de douze mois
écoulée de la date de conclusion du contrat à la date de constatation de
l’infraction.
Pour le calcul de l’amende, la valeur du patrimoine
fiduciaire est appréciée au jour de la transmission des droits ou, si celle-ci
n’est pas intervenue, au jour de la constatation de l’infraction.
II. Le taux de l’amende prévue au I est ramené à
1 %, sans que son montant puisse être inférieur à 3 000 € ni
supérieur à 7 500 €, lorsque le fiduciaire ou son représentant en
France ont accompli dans les délais prescrits les obligations déclaratives qui
leur incombent en application du I de l’article 249 D du code général des
impôts.
Article 18
En cas de non-respect des obligations déclaratives
prévues au I de l’article 249 D du code général des impôts, le fiduciaire est redevable
d’une amende égale à 6 % de la valeur du patrimoine fiduciaire appréciée selon
les termes du deuxième alinéa de l’article 18 de la présente loi.
Le taux de cette amende est ramené à 1 %, sans que
son montant puisse être inférieur à 1 500 € ni supérieur à
4 500 €, lorsque le fiduciaire apporte la preuve que le redevable
désigné à l’article
L’amende prévue au présent article ne peut être
cumulée avec celle prévue au I de l’article 17 de la présente loi.
Article 19
I. Pour l’application des amendes prévues à l’article
18 de la présente loi, le délai de prescription prévu au deuxième alinéa de
l’article L. 188 du Livre des procédures fiscales court à compter du terme
du contrat de fiducie, à moins que le fiduciaire apporte la preuve de la date à
laquelle l’administration a eu connaissance certaine de l’existence de la
fiducie. Le délai court alors à compter de cette date.
II. L’application des amendes prévues au I est
indépendante de l’exercice du droit de reprise par l’administration à l’égard
des redevables légaux des impôts et taxes dus au titre du contrat de fiducie,
des droits en fiducie et de leurs fruits.
Toutefois, lorsque l’administration a eu connaissance
de l’infraction au plus tard un an avant l’expiration du délai de reprise prévu
aux articles L. 169 et suivants du Livre des procédures fiscales, le taux
des amendes est fixé à 1 % par année non prescrite, dans les limites
mentionnées aux articles 17 et 18 de la présente loi.
III. Les amendes applicables sont notifiées au
fiduciaire dans les conditions prévues par la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979
relative à la motivation des actes administratifs. Leur mise en recouvrement ne
peut intervenir avant l’expiration d’un délai de trente jours pendant lequel le
fiduciaire peut présenter ses observations.
Elles sont recouvrées et le contentieux est assuré
selon les règles applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires.
Article 20
Pour l’application des dispositions de l’article 2069
du code civil, les opérations se rapportant aux droits en fiducie doivent être
enregistrées sur des comptes financiers distincts et ne pouvant être rattachés
à aucun autre compte professionnel ou privé ouvert au nom du fiduciaire ou
d’une autre fiducie. L’intitulé du compte mentionne l’appellation définie à
l’article 249 D du code général des impôts.
Article 21
I. Le code général des impôts est complété par un
article 242 ter B ainsi rédigé :
« Art. 242 ter B – Lorsque les personnes définies
aux articles 240 à 242 ter versent les sommes à une fiducie ou
interviennent à un acte auquel est partie un fiduciaire, elles doivent porter
sur les déclarations prévues à ces articles l’appellation mentionnée au I de
l’article 249 D. »
II. Le premier alinéa de l’article
« Les comptes d’une fiducie et ceux qui sont
utilisés pour sa gestion doivent porter l’appellation mentionnée au I de
l’article 249 D du présent code. »
III. Le début du deuxième alinéa du même article est
modifié comme suit :
« Les personnes physiques, les associations, les
fiduciaires … (le reste sans changement). »
Article 22
Le Livre de procédures fiscales est complété et
modifié comme suit :
I. Le troisième alinéa de l’article L. 10 est complété
par une phrase ainsi rédigée :
« Les mêmes demandes peuvent être adressées au
fiduciaire pour le contrôle des déclarations prévues à l’article 249 D du code général
des impôts. »
II. L’article L. 12 est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Lorsqu’un contrat de fiducie ou les actes le
modifiant n’ont pas été enregistrés dans les conditions prévues à l’article 249
D du code général des impôts, ou révélés à l’administration fiscale avant
l’engagement de l’examen contradictoire de l’ensemble de la situation fiscale
personnelle d’un contribuable qui y est partie ou en tient des droits, la durée
d’un an est décomptée à partir de l’enregistrement des actes. »
III. Il est inséré un article L. 14 A ainsi rédigé :
« Art. L. 14 A – Pour l’application des
dispositions du présent livre, les procédures applicables à une fiducie, à
chaque partie à un contrat de fiducie et à toute personne en tenant des droits
sont indépendantes.
« Pour la vérification de tout ou partie des
revenus ou résultats d’une fiducie, l’administration procède au contrôle des
déclarations des fiduciaires prévues à l’article 249 D du code général des
impôts, des comptes financiers en fiducie et des états et comptes prévus aux
articles 20 et 23 de la présente loi dans les conditions prévues à l’article L.
13.
Les dispositions de l’article L. 48 ne sont pas
applicables à ces vérifications.
« Les dispositions des articles L. 50 et L. 51 ne
font pas obstacle, pour une même période et un même impôt, au contrôle des
revenus ou des résultats :
« 1° d’une ou plusieurs fiducies, puis de toute
personne partie au contrat ou en tirant des droits ;
« 2° de l’une ou plusieurs de ces personnes, puis
d’une ou plusieurs fiducies. »
IV. Il est inséré un article L. 54 A bis ainsi rédigé
:
« Art. L. 54 A bis – Les procédures de contrôle
et de redressement des actes et déclarations incombant au fiduciaire sont
suivies entre l’administration et le fiduciaire.
« Les conséquences des redressements sont
notifiées dans les conditions de droit commun au constituant ou au redevable de
l’impôt désigné à l’article 249 A du Code général des impôts. »
V. L’article L. 73 est modifié comme suit :
1° Il est ajouté, avant le dernier alinéa, un 5° ainsi
rédigé :
« 5° Les résultats des fiducies, lorsque la
déclaration prévue au I de l’article 249 D n’a pas été déposée dans le délai
légal. »
2° Au dernier alinéa du même article, la mention : «
1° et 2° » est remplacée par la mention : « 1°, 2° et 5° ».
VI. Il est inséré un article L. 85 B ainsi rédigé :
« Art. L. 85 B – Le fiduciaire communique à
l’administration, sur la demande de celle-ci, tous documents relatifs aux
droits en fiducie. »
Article 23
La perte de recettes résultant pour l’État des dispositions
fiscales des articles 3 à 22 de la présente loi est compensée à due concurrence
par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et
Chapitre IV
Dispositions comptables
Article 24
Le fiduciaire établit pour chaque fiducie :
1° Un état des droits ainsi que des créances et des
dettes, concernant l’exécution du contrat. Cet état décrit séparément les
éléments actifs et passifs du patrimoine fiduciaire ;
2° Un état des produits et des charges afférents au
contrat de fiducie sans qu’il soit tenu compte de leur date d’encaissement ou
de paiement. Cet état fait apparaître, par différence après déduction des
amortissements et des provisions, le résultat du patrimoine fiduciaire.
Ces états sont établis conformément aux règles
définies par les articles L. 123-13 et suivants du code de commerce pour le
bilan et le compte de résultat, et communiqués dans le délai de deux mois
suivant la clôture de l’exercice ou, le cas échéant, de l’année civile, au constituant
et au bénéficiaire.
Il ne peut être procédé à aucune réévaluation des
éléments du patrimoine fiduciaire.
Article 25
Les états prévus à l’article 23 de la présente loi
sont communiqués une fois par an au constituant et au bénéficiaire lorsque le
fiduciaire leur rend compte de l’état de la réalisation de l’objet de la
fiducie.
Article 26
Les personnes qui réalisent des opérations en qualité
de fiduciaires, même à titre non habituel, sont soumises aux dispositions des
articles L. 123-12 et suivants du code de commerce.
Le fiduciaire procède de manière autonome à
l’enregistrement comptable des mouvements affectant le patrimoine fiduciaire.
Article 27
Lorsque le constituant est soumis aux dispositions des
articles L. 123-12 et suivants du code de commerce, il constate une créance à
l’égard du fiduciaire lors du transfert des droits à celui-ci. Le bilan fait
apparaître distinctement, à la date du transfert, la valeur brute de la
créance, égale à la valeur que les droits avaient à l’origine ou après réévaluation,
et les amortissements et provisions de toute nature afférents à ces droits,
tels qu’ils figuraient dans les comptes annuels du constituant.
Le fiduciaire inscrit sur les états mentionnés à
l’article 23 de la présente loi les droits transférés ainsi que les
amortissements et provisions de toute nature y afférents tels qu’ils figuraient
dans les comptes annuels du constituant.
En cas d’absorption du fiduciaire ou d’opération
assimilée, les droits en fiducie sont transférés à leur valeur dans les écritures
du fiduciaire en mentionnant la valeur brute et les amortissements ou
provisions de toute nature pratiqués à raison de ces droits.
Article 28
Le bénéficiaire des droits en fiducie, sauf le cas
échéant en vertu de l’article 26, ne peut constater de créance à l’égard du
fiduciaire ou du constituant.
Chapitre V
Dispositions diverses
Article 29
I. La première phrase du deuxième alinéa de l’article
220-1 du code civil est ainsi rédigée :
« Il peut notamment interdire à cet époux de
faire, sans le consentement de l’autre, des actes de disposition, même à titre
fiduciaire, sur ses propres biens… (le reste sans changement). »
II. La première phrase du troisième alinéa de
l’article 389-5 du code civil est ainsi rédigée :
« Même d’un commun accord, les parents ne peuvent ni
vendre de gré à gré, ni transférer à titre fiduciaire, ni apporter en société
un immeuble… (le reste sans changement). »
III. Le début du deuxième alinéa de l’article 457 du code
civil est ainsi rédigé :
« Sans cette autorisation, il ne peut, notamment,
emprunter pour le pupille, ni aliéner, même à titre fiduciaire, ou grever de
droits réels les immeubles… (le reste sans changement). »
IV. Le début de l’article 1424 du code civil est ainsi
rédigé :
« Les époux ne peuvent l’un sans l’autre,
aliéner, même à titre fiduciaire, ou grever de droits réels les immeubles… (le
reste sans changement). »
V. Le premier alinéa de l’article 1432 du code civil
est complété par les mots suivants :
« ni les transferts à titre fiduciaire ».
VI. Le premier alinéa de l’article 1540 du code civil
est complété par les mots suivants :
« ni les transferts à titre fiduciaire ».
VII. L’article 1596 du code civil est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« Les fiduciaires, des droits composants le
patrimoine fiduciaire, sans préjudice de la faculté pour les fiduciaires d’être
bénéficiaires ».
Article 30
Le début du premier alinéa de l’article 314-1 du code pénal
est ainsi rédigé :
« L’abus de confiance est le fait par une personne,
y compris un fiduciaire, … (le reste sans changement). »
Article 31
Le I de l’article L. 233-10 du code de commerce est
complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Entre le fiduciaire et l’un des
bénéficiaires, s’il est le constituant, d’un contrat de fiducie lorsque des
actions ou droits de vote de la société, objet de la prise de participation,
ont été transférés à ce fiduciaire ».
II- Le 6° du I de l’article L. 621-107 du code de
commerce est ainsi modifié :
« 6° Toute hypothèque conventionnelle, toute
hypothèque judiciaire ainsi que l’hypothèque légale des époux et tout droit de
nantissement constitués sur les biens du débiteur pour dettes antérieurement
contractées, tout contrat de fiducie conclu par le débiteur à des fins de
garantie pour des dettes antérieurement contractées ; ».
Article 32
I. Il est inséré, au 1° de l’article 28 du décret n°
55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière, un d)
ainsi rédigé :
« d) constitution, modification ou extinction de
fiducie. ».
II. Il est inséré, à l’article 38 de la loi du 1er
juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les
départements du Bas‑Rhin, du Haut-Rhin et de
« l) La constitution, modification ou extinction
de fiducie. ».
Article 33
La présente loi, à l’exception
du chapitre III et du I de l’article 32, est applicable dans les territoires
d’outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.