UNION INTERNATIONALE DES
MAGISTRATS
2EME COMMISSION D'ETUDES
Réunion de Taïwan
- 14-18 novembre 1999
Communication
du Secrétariat Général
de l'U.I.M. sur le Thème :
LES CONSÉQUENCES
DE LA VIOLATION OU DE L'INEXÉCUTION D'UN CONTRAT EN DROIT ITALIEN
(*)
I)
1) Dans votre système
juridique les conséquences de la violation ou de l'inexécution
d'un contrat sont-elles réglées de par la loi ou d'une autre
manière ?
Le système juridique italien règle la matière
concernée, principalement, dans le code civil. Il faut ajouter tout
de suite que l'Italie n'a plus, depuis soixante ans, un code de commerce
et que, suite au " fusionnement " des droits civil et commercial dans le
code civil entré en vigueur en 1942, la matière commerciale
est contenue dans le code civil, ainsi que dans de nombreuses lois spéciales.
Bien entendu, tout contrat peut régler aussi une ou plusieurs conséquences
de son inexécution. C'est le cas, par exemple, des clauses pénales
(articles 1382 et s. du code civil italien, dorénavant abrégé
comme il suit : c.c. it.), qui sont très souvent prévues
soit pour l'inexécution - totale ou partielle - soit pour le retard
dans l'exécution d'une ou de plusieurs obligations d'un contrat.
En ce qui concerne, spécialement, le code civil,
l'inexécution des obligations est traitée dans les articles
de 1218 à 1229. Ces douze articles contiennent la discipline générale
de la responsabilité du débiteur pour inexécution
d'une obligation ; d'une obligation, il faut préciser, et non pas
d'un contrat, puisque - dans le système italien - le contrat n'est
qu'une des sources des obligations, qui peuvent aussi être engendrées
par le délit, ainsi que par une des autres situations qui peuvent
donner lieu à un lien d'obligation selon notre droit (il s'agit
ici des variae causarum figurae du droit romain et des situations
définies par nombre de codes étrangers comme de quasi-contrats
et de quasi-délits). Cette forme de responsabilité est appelée
responsabilité contractuelle (même si l'obligation dont l'inexécution
est concernée est issue d'un rapport non contractuel) ou pour inexécution
d'une obligation. Elle se différencie donc de la responsabilité
dite délictuelle, du fait que celle-ci est engendrée par
la violation du principe général du neminem laedere
et non pas d'une obligation, c'est-à-dire d'un lien de droit engageant
deux ou plusieurs sujets bien déterminés.
D'autres dispositions du même code dictent des règles
particulières en ce qui concerne la résolution d'un contrat
pour inexécution d'une ou de plusieurs des obligations issues de
celui-ci (articles 1453-1462 c.c. it.), ainsi que les conséquences
de l'inexécution de nombreux contrats spéciaux, tels que
la vente (art. 1478-1497, 1515-1519, 1525, 1536 c.c. it.), le report (article
1551 c.c. it.), le louage et les baux (articles 1578, 1588, 1611, 1618
c.c. it.), le contrat de construction (articles 1667 et 1668 c.c. it.),
le transport (articles 1681, 1682 et 1692 et s. c.c. it.), le mandat (article
1710 c.c. it.), le dépôt (articles 1768, 1785 et 1787 c.c.
it.), le prêt à usage (articles 1804 et s. c.c. it.), le prêt
de consommation (article 1821 c.c. it.), le dépôt bancaire
(article 1836 c.c. it.), la transaction (article 1976 c.c. it.), le louage
d'ouvrage et d'industrie (article 2236 c.c. it.), la gestion des sociétés
(articles 2392 et s. c.c. it.).
Enfin plusieurs lois spéciales contiennent des
dispositions touchant à la responsabilité pour inexécution
d'obligations issues de tel ou de tel autre contrat. On pourra ici rappeler,
à titre d'exemple, l'art. 79 de la Convention de Vienne du 11 avril
1980 sur les contrats de vente internationale de marchandises (ratifiée
par l'Italie par la loi n. 765 du 11 décembre 1985, entrée
en vigueur le 1er janvier 1988) ; les articles 17 - 30 de la
Convention de Varsovie du 12 octobre 1929 (ratifiée par l'Italie
par la loi n. 841 du 19 mai 1932), concernant la responsabilité
du transporteur aérien ; les articles 409 et 422 du code de la navigation,
en ce qui concerne la responsabilité du transporteur maritime ;
les articles 17 - 33 de la convention de Genève du 19 mai 1956 (ratifiée
par l'Italie par la loi n. 1621 du 6 décembre 1960), sur la responsabilité
du transporteur de marchandises par route ; l'article 11 du décret
législatif n. 50 du 15 janvier 1992, en matière de vente
à domicile ; les articles 13 - 18 du décret législatif
n. 111 du 17 mars 1995, en matière de responsabilité des
agences de voyages (inclusive tours ; la loi citée a donné
exécution à la directive européenne n. 90/314/CEE).
2) Quelles conséquences
de la violation ou de l'inexécution d'un contrat sont prévues
par votre système juridique ?
L'inexécution d'un contrat donne lieu à
de nombreuses conséquences, qui peuvent varier selon le type du
contrat considéré.
-
Dans les contrats synallagmatiques (ou bilatéraux,
c'est-à-dire lorsque les contractants s'obligent réciproquement
les uns envers les autres), la partie qui a exécuté son obligation
peut choisir parmi plusieurs alternatives et notamment : la résolution
par la voie judiciaire, la résolution par la voie extrajudiciaire
et la condamnation de la contrepartie à remplir son obligation.
Plus précisément, cela veut dire que :
1a) par la voie judiciaire elle peut demander que le
contrat soit résolu par le juge (art. 1453 c.c. it.) ;
1b) par la voie extrajudiciaire elle peut provoquer elle-même
la résolution du contrat, sans l'intermédiaire d'aucune décision
de justice (celle-ci sera pourtant nécessaire en cas de contestation,
mais elle n'aura qu'une valeur déclarative et non pas constitutive)
; la résolution par voie extrajudiciaire n'est possible que dans
les cas suivants :
-
1b a) clause résolutoire (les
parties ont prévu que l'inexécution d'une obligation - spécifiquement
indiquée dans le contrat - entraînera automatiquement la résolution
de celui-ci ; le créancier de l'obligation non exécutée
doit néanmoins communiquer au débiteur son intention de se
prévaloir de la clause : cf. article 1456 c.c. it.),
-
1b b) délai " essentiel "
(les parties ont prévu un délai pour l'exécution d'une
certaine obligation et ce délai doit être considéré
comme primordial dans l'intérêt du créancier ; dans
ce cas le créancier peut encore demander au débiteur - dans
les trois jours qui suivent l'échéance du délai -
l'exécution de l'obligation ; faute de quoi le contrat est résolu
: cf. article 1457 c.c. it.),
-
1b
g) sommation d'exécuter le contrat (la partie qui veut provoquer
la résolution du contrat peut sommer par écrit le débiteur
de remplir son engagement, en lui fixant un délai qui normalement
ne peut être inférieur à 15 jours ; si le contrat n'est
pas exécuté dans ce délai le contrat est résolu
de plein droit: cf. article 1454 c.c. it.) ;
-
elle peut cependant demander au juge de condamner la contrepartie
à exécuter la convention (art. 1453 c.c. it.) ;
-
indépendamment des choix parmi les alternatives qu'on
vient de mentionner, le créancier peut toujours demander que le
débiteur soit condamné au paiement des dommages et intérêts
causés par l'inexécution de l'obligation, aux termes de l'article
1218 c.c. it. (voir infra, sub n. 3) ;
-
chacun des deux contractants peut refuser de satisfaire à
son engagement, lorsque l'autre n'a pas exécuté son obligation
ou qu'il ne s'est pas offert de l'exécuter.
-
Dans les contrats multilatéraux (caractérisés
par la présence de plusieurs parties : cf. article 1420 c.c. it.)
l'inexécution d'une des parties n'entraîne pas la résolution
du contrat vis-à-vis des autres parties, à moins que la prestation
inexécutée doive être
considérée comme essentielle (article 1459 c.c. it.).
3) Quelles conséquences
se rattachent
-
au retard du créancier dans
l'exécution du contrat
Il peut arriver que le créancier refuse de recevoir
l'exécution de l'obligation qui lui est due par son débiteur.
Dans ce cas le code civil prévoit un remède, dit " mise en
demeure du créancier " (articles 1206 - 1217 c.c. it.), qui permet
au créancier d'éviter les conséquences négatives
de son inexécution : ainsi, p. ex., le risque d'une impossibilité
survenue de l'obligation (p. ex. : perte de la chose) sera à la
charge du créancier, le débiteur ne devra plus payer les
intérêts sur les sommes d'argent dues et le créancier
sera responsable des dommages-intérêts que son débiteur
a subi à cause de la mise en demeure du premier (cf. article 1207
c.c. it.). Afin de mettre le créancier en demeure le débiteur
doit lui offrir l'exécution de l'obligation, selon une procédure
formelle qui normalement est exécutée par l'intermédiaire
d'un huissier (cf. les articles 1209 et s. c.c. it.).
-
au retard du débiteur dans
l'exécution du contrat
Le retard du débiteur dans l'exécution
de son obligation est considéré comme une forme particulière
d'inexécution de celle-ci. Elle est appelée " demeure du
débiteur " (cf. les articles 1219 et s. c.c. it.). Normalement le
débiteur est mis en demeure par une sommation écrite à
exécuter provenant de la part du créancier. La mise en demeure
n'est pas nécessaire :
-
lorsqu'il s'agit d'une dette causée par une responsabilité
délictuelle,
-
ou bien lorsque le débiteur a déclaré
par écrit qu'il ne veut pas satisfaire à son engagement,
-
ou enfin lorsque le contrat prévoyait un délai
et que celui-ci a échoué, si la prestation aurait dû
être exécutée au domicile du créancier (article
1219 c.c. it.).
Le débiteur mis en demeure est responsable du préjudice
subi par le créancier. Le débiteur demeure responsable même
si l'obligation devient impossible sans aucune faute de sa part, à
moins qu'il arrive à prouver que la chose aurait également
péri, même si elle avait été livrée au
créancier (article 1221 c.c. it.). Dans les obligations qui se bornent
au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant
du retard dans l'exécution consistent normalement dans la condamnation
aux intérêts. Ceux-ci sont dus au taux légal, sauf
les règles particulières fixées par les parties mêmes
lors de la convention. Si les intérêts n'ont pas été
fixés par les parties (et donc ils correspondent au taux légal)
le créancier peut néanmoins prouver d'avoir subi un préjudice
plus élevé (p. ex. lorsque le taux d'inflation a été
supérieur au taux légal des intérêts, ou bien
si le créancier prouve que s'il aurait reçu la somme due
en temps il aurait pu l'investir dans une affaire qui lui aurait permis
d'avoir des profits plus élevés que les intérêts
au taux légal : cf. l'article 1224 c.c. it.).
-
à la mauvaise exécution
du contrat
Les dispositions spéciales en matière de
certains contrats (tels que la vente, le louage, le contrat de construction,
etc. : cf. les articles 1490 et s., 1578 et s., 1667 et s. c.c. it.) règlent
de façon assez détaillée les conséquences de
la présence de vices cachés dans la chose (vendue, loué,
construite, etc.). A ce propos le code civil stipule une garantie qui touche
de plein droit la partie qui s'est engagée à fournir la chose
(vendeur, locateur, constructeur, etc.), pourvu que la contrepartie respecte
des prescriptions assez complexes.
Si l'on prend l'exemple du contrat de vente, on constate
que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts
cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage
auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur
ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix,
s'il les avait connus (article 1490 c.c. it.). Dans ce cas l'acheteur a
normalement le choix entre la résolution du contrat et la réduction
du prix convenu, sauf les dommages-intérêts (articles 1492-1494
c.c. it.) ; cependant l'acquéreur doit dénoncer les vices
rédhibitoires au vendeur dans le délai de huit jours à
partir du moment où il a découvert les défauts, à
peine de forclusion. L'action résultant des vices doit être
intentée, à peine de prescription, dans un délai d'un
an à partir du jour de la livraison de la chose (article 1495 c.c.
it.).
-
à l'inexécution du
contrat
L'article 1218 du code civil stipule que le débiteur
qui n'exécute pas (ou qui n'exécute pas exactement) l'obligation
à laquelle il est astreint est responsable du préjudice subi
par son créancier (responsabilité contractuelle), toutes
les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution ou le retard provient
d'une situation d'impossibilité d'exécution de l'obligation
qui soit due à une cause étrangère qui ne peut lui
être imputée (bien entendu cette impossibilité doit
être survenue après la naissance de l'obligation même
; p. ex. : après la conclusion du contrat).
Cette disposition a donné lieu à pas mal
de discussions sur la nature de la responsabilité contractuelle
dans le système juridique italien. Notamment deux théories
ont été présentées : celle de la responsabilité
par faute et celle de la responsabilité sans faute. Selon la première
thèse l'article 1218 c.c. it. doit être interprété
en corrélation avec l'article 1176 du même code, selon lequel
le débiteur doit satisfaire à son engagement " avec la diligence
du bon père de famille ". Cela voudrait dire, donc, que l'exécution
de l'obligation est " impossible " lorsque des difficultés survenues
dans l'exécution demandent au débiteur un effort supérieur
à celui qu'on peut exiger d'un " bon père de famille ". Le
manque de " diligence du bon père de famille " (et donc la négligence)
étant à la base du concept de faute, le débiteur ne
serait responsable que pour faute. La faute serait cependant présumée
en matière contractuelle (contrairement à la responsabilité
délictuelle), puisque aux termes de l'article 1218 c.c. it. c'est
au débiteur de prouver " l'impossibilité survenue de l'exécution,
due à une cause étrangère qui ne peut lui être
imputée " (cette expression est erronément interprétée
par une partie de la doctrine et de la jurisprudence comme si elle était
équivalente à la preuve de s'être conduit " en bon
père de famille ").
Par contre, selon les partisans de la théorie
de la responsabilité sans faute, " impossible " n'est que l'événement
qui rend absolument irréalisable l'accomplissement de l'engagement
qui forme l'objet de l'obligation (force majeure, cas fortuit) : le débiteur
est donc obligé d'exécuter son obligation même si -
après la conclusion du contrat - des circonstances survenues exigent
de lui un effort bien supérieur à celui qu'on pourrait exiger
d'un " bon père de famille ". Selon l'avis d'une opinion minoritaire
l'article 1176 du code ne serai applicable qu'aux obligations " de moyens
" (ou " de diligence " : on peut penser aux obligations des médecins,
des avocats, des ingénieurs, des exerçants des professions
libérales en général, etc.), où le créditeur
devrait prouver la négligence du débiteur.
Il faut encore ajouter à ce sujet que, dans une
série de dispositions spécialement dictées pour des
contrats particuliers, le code semble envisager des règles différentes
: ainsi dans les articles 1588, 1768, 1780, 1812, 1821, 1836, 2236, 2030
c.c. it. la loi emploie des expressions qui font plutôt penser à
une responsabilité contractuelle basée sur la faute. Dans
d'autres cas, par contre, la responsabilité est sûrement fondée
sur une règle plus sévère. On peut citer ici les cas
de la responsabilité du transporteur de personnes ou de choses (articles
1681 et 1693 c.c. it.), la responsabilité des aubergistes et des
hôteliers (articles 1785 et s. c.c. it.), ainsi que des dépositaires
des magasins généraux (article 1787 c.c. it.) ou celle des
banques pour les coffres (articles 1839 c.c. it.). Les articles qu'on vient
de citer esquissent une forme particulière de responsabilité
(dite " responsabilité ex recepto " du receptum nautarum,
cauponum et stabulariorum du droit romain) qui ne peut être exclue
que par un événement absolument exceptionnel, tel que le
cas fortuit, la force majeure, etc. La jurisprudence tend à appliquer
ces mêmes règles a tous les cas de dépôt nécessaire
(on peut penser au cas du vol d'une voiture confiée à un
garagiste pour une réparation, ou à la perte d'une fourrure
confiée à une teinturerie, etc.).
-
à la fourniture d'une autre
prestation que celle due selon le contrat (aliud)
La théorie de l'aliud pro alio a
été élaborée par rapport au contrat de vente.
Comme on vient de dire (cf. supra, n. 3c), les droits de l'acheteur
pour les éventuels vices cachés de la chose sont soumis à
une double forme de forclusion : celui-ci doit d'abord dénoncer
au vendeur les vices dans le délai de huit jours à partir
du moment où il les a découverts et, en tout cas, il doit
entamer son action en justice dans le délai d'un an à partir
du moment de la livraison de la chose. Cela peut - bien entendu - emmener
parfois à des conséquences très injustes. Jurisprudence
et doctrine ont alors énoncé le principe selon lequel, lorsque
la chose achetée (non seulement présente des vices ou des
défauts, mais) peut être considérée comme une
chose tout à fait différente par rapport à celle qui
formait l'objet du contrat, le vendeur est responsable de l'inexécution
de l'effet principal du contrat de vente, c'est-à-dire la transmission
à l'acheteur de la propriété de la chose sur laquelle
l'accord des parties s'est formé. S'agissant alors d'une inexécution
" ordinaire " aucune dénonciation des vices sera requise et le délai
de prescription sera le délai ordinaire de dix ans (art. 2946 c.c.
it.).
-
à l'impossibilité
totale ou partielle, survenue après la stipulation du contrat, d'exécuter
celui-ci (p. ex. endommagement ou perte de l'objet contractuel) ?
L'impossibilité d'exécution de l'obligation,
survenue à la stipulation du contrat, entraîne - comme on
vient de le voir (cf. supra, n. 3d) - la libération du débiteur
de toute responsabilité contractuelle (art. 1218 c.c. it.). Elle
détermine aussi, de plein droit, l'extinction de l'obligation (art.
1256 c.c. it.) et la résolution du contrat (articles 1463 et s.
c.c. it.). L'obligation dont l'exécution est devenue partiellement
impossible doit être remplie pour la partie qui peut être encore
exécutée (art. 1258 c.c. it.). Le créancier est de
plein droit subrogé dans les droits du débiteur vis-à-vis
des tiers qui ont provoqué l'impossibilité (p. ex.: envers
les tiers qui auraient causé la perte - totale ou partielle - de
la chose due : cf. article 1259 c.c. it.). En ce qui concerne les contrats,
l'impossibilité partielle donne lieu à une réduction
correspondante de la contre-prestation ; la partie qui aurait dû
recevoir l'objet de l'obligation a cependant le droit de résilier
le contrat, lorsqu'elle n'a plus aucun intérêt à l'exécution
de celui-ci (article 1464 c.c. it.).
4) Y-a-t-il des délais à
respecter en faisant valoir les vices dans l'exécution du contrat?
Dans l'affirmative, quelles sont les conséquences en cas d'inobservation
de ces délais?
Selon le droit italien le délai de prescription
ordinaire est de dix ans. Il s'applique à toute action judiciaire
en matière d'inexécution des obligations, y compris les demandes
en dommages-intérêts (contrairement à l'action en dommages-intérêts
de la responsabilité délictuelle, qui est soumise à
des délais plus courts). Des règles spéciales concernent
par contre la matière des vices cachés, suivant les dispositions
de certains contrats spéciaux, tels que, p. ex. la vente, le louage
ou le contrat de construction (v. supra, n. 3c). Comme on l'a déjà
remarqué, la règle générale veut ici que les
vices soient dénoncés au vendeur (locateur, constructeur,
etc.) dans un délai très bref, a peine de forclusion (normalement
le délai est déterminé à partir de la date
de découverte des vices) ; en plus un autre délai (cette
foi à peine de prescription), normalement plus court que le délai
ordinaire de dix ans, est prévu pour le déclenchement de
l'action en justice ; ce dernier délai est d'habitude rattaché
à la livraison de la chose (donc, si, p. ex., l'acheteur découvre
le vice après un an et demi à partir du moment où
la chose lui a été livrée, il ne pourra pas porter
plainte contre le vendeur, son action en justice étant désormais
prescrite).
5) Qui est responsable, si la
violation du contrat n'a pas été commise par le débiteur
lui-même, mais par un préposé dont il s'est servi pour
l'exécution du contrat ?
L'art. 1228 c.c. it. stipule que le débiteur qui,
pour l'exécution de son obligation, se sert de la coopération
d'un tiers (ouvrier, employé, mais aussi professionnel ou entrepreneur
indépendant) est aussi responsable des faits commis par celui-ci
par dol ou faute. Cette responsabilité peut être cependant
exclue par le parties. Il faudra encore ajouter que, dans certaines matières
spéciales (comme p. ex. dans le cas de la responsabilité
des agences de voyages) la loi défend aux parties d'exclure cette
forme de responsabilité contractuelle du fait d'autrui.
6) Peut-on exclure la responsabilité
d'une partie contractante pour les cas de violation ou d'inexécution
du contrat ?
L'article 1229 c.c. it. italien stipule que tout accord
visant à exclure ou à limiter la responsabilité du
débiteur pour dol ou faute lourde est nul. Aux termes de l'article
1469-bis c.c. it. (ajouté par la loi n. 52 du 6 février
1996, qui a donné exécution à la directive européenne
en matière de clauses abusives) dans les contrats conclus entre
professionnels et non-professionnels ou consommateurs sont présumées
abusives - entre autres - les " Clauses ayant pour objet ou pour effet
:
a) D'exclure ou de limiter la responsabilité
légale du professionnel en cas de mort d'un consommateur ou de dommages
corporels causés à celui-ci, résultant d'un acte ou
d'une omission de ce professionnel ;
b) D'exclure ou de limiter de façon inappropriée
les droits légaux du consommateur vis-à-vis du professionnel
ou d'une autre partie en cas de non-exécution totale ou partielle
ou d'exécution défectueuse par le professionnel d'une quelconque
des obligations contractuelles, y compris la possibilité de compenser
une dette envers le professionnel avec une créance qu'il aurait
contre lui ".
7) Quels sont les effets des
promesses de garantie d'une partie contractante en ce qui concerne l'exécution
du contrat ?
On a déjà expliqué quelles sont les
garanties en cas de vente, de louage et de contrat de construction, pour
ce qui est des vices cachés. Une autre forme de garantie connue
dans le contrat de vente (mais aussi dans d'autres contrats : donations,
partage, échange, société) touche à la responsabilité
pour éviction de la chose vendue, lorsqu'un tiers prétend
avoir des droits sur celle-ci (articles 1483 et s. c.c. it.).
Une forme tout à fait particulière de garantie
est celle ayant pour objet le bon fonctionnement de la chose vendue (articles
1512 et suivant c.c. it.). Cette garantie diffère de la garantie
pour les vices cachés d'abord en ce qu'elle n'est pas due par le
vendeur, mais peut être contractée par les parties. Ensuite
elle offre à l'acheteur l'avantage de le libérer de la charge
de repérer et de prouver la cause du mauvais fonctionnement de la
chose (et donc les vices dont la chose serait atteinte). L'acheteur doit
cependant dénoncer au vendeur le mauvais fonctionnement dans le
délai de trente jour à partir du jour où il l'a découvert,
sous peine de forclusion. L'action en justice doit être entamée,
sous peine de prescription, dans le délai de six mois à partir
de la découverte du mauvais fonctionnement.
II)
Quel(s) point(s) voulez-vous
discuter en détail ?
-
Quelles sont les conditions sous lesquelles la partie qui
n'a pas rempli son obligation peut être considérée
non responsable du préjudice qu'il a provoqué au créancier
[points n. 3 d et 3f] ?
-
Votre système est-il fondé sur la règle
de la responsabilité pour faute ou bien sur celle de la responsabilité
sans faute ?
-
Votre système connaît-il la distinction entre
" obligations de moyens " et " obligations de résultat " (et, dans
le cas de réponse affirmative, le régime de responsabilité
contractuelle, ainsi que la charge de la preuve, dans quelle mesure varient-ils)
?
III)
Les conséquences de la
violation ou de l'inexécution d'un contrat sont-elles réglées
de façon satisfaisante dans votre système juridique ? Dans
la négative, quelles modifications seraient nécessaires ?
Est-ce que des réformes sont envisagées ?
La législation italienne, en essayant de mélanger
- d'un coté - le système français basé sur
la " cause étrangère qui ne peut être imputée
au débiteur ", la force majeure et le cas fortuit (articles 1147
et 1148 Code Napoléon) et - de l'autre - le principe allemand de
l'impossibilité survenue de l'exécution de l'obligation (nicht
zu vertretende Unmöglichkeit der Leistung : cf. § 275 BGB)
a donné lieu à une profonde incertitude sur le fondement
même de la responsabilité contractuelle. En effet le problème
qui reste ouvert, depuis plus qu'un demi-siècle de l'entrée
en vigueur de l'actuel code civil, est de savoir si cette forme de responsabilité
se base ou non sur la faute du débiteur (cf. supra, n. 3d).
Les différentes formes de responsabilité " spéciales
", dont on a aussi parlé (cf. supra, n. 3d) ne font que rendre
encore plus flou le tableau général. Finalement il faut tenir
compte - de plus en plus - de l'influence directe et indirecte que sur
cette matière exercent les directives de l'Union Européenne
(surtout dans la matière de la protection des consommateurs) et
les conventions internationales réglant des domaines spécifiques
(vente, transport, dépôt, contrat de voyage, etc.). Hélas
le résultat est une augmentation de la fragmentation des différents
systèmes nationaux. Toute la matière devrait être donc
révisée, en dressant des principes généraux
plus claires et en spécifiant les éventuelles exceptions,
mais il est sûr que cette ouvre ne pourra être désormais
entamée qu'au niveau européen.
Turin, le 12 juin 1999.
Dr Giacomo OBERTO
|
Juge au Tribunal de Turin
|
Secrétaire Général Adjoint de
l'U.I.M.
|
(*) L'Association Nationale des Magistrats
Italiens n'ayant pas encore nommé un délegué pour
la 2e Commission d'Etudes de l'U.I.M. à la date du 12 juin 1999,
le Secrétariat Général a décidé de confier
à M. Giacomo Oberto la tâche de rédiger cette sommaire
illustration des conséquences de la violation ou de l'inexécution
d'un contrat en droit italien. Cela permet ainsi de respecter le délai
du 30 juin 1999 fixé par le Président de la Commission en
lui donnant la possibilité de rédiger un rapport de synthèse
qui tienne compte aussi du système juridique italien.