UNION INTERNATIONALE DES MAGISTRATS

2EME COMMISSION D’ETUDES

Réunion de Valle de Bravo (Mexique) – Novembre 2004

 

Rapport italien sur le thème

 

 

POUVOIRS DU JUGE EN DROIT DE FAMILLE

(AFFAIRES CIVILES CONCERNANT LES ENFANTS, A L’EXCLUSION DE L’ADOPTION) :

LE DROIT ITALIEN

 

 

Réponses au questionnaire

 

(I)

1.                   Dans votre système de droit, les affaires concernant les enfants sont-elles portées devant des tribunaux spécialisés en droit familial ou devant des juges ayant reçus une formation spécifique en droit familial ?

 

        Dans le système juridique italien les affaires concernant les enfants sont traitées soit par les tribunaux des mineurs, soit par les tribunaux ordinaires, selon un partage des compétences qui donne parfois lieu à des véritables casse-têtes.

        Les tribunaux ordinaires sont ordinairement compétents par rapport aux litiges de séparation de corps et de divorce (pour tous les mariages : civils et concordataires), ainsi que pour l’annulation des mariages civiles. Au cours de ces différends le Président, au début de la procédure, ou bien le juge chargé de la mise en état, pendant le déroulement du procès, ou encore la formation collégiale (trois magistrats), au moment où le litige est tranché, sont appelés à statuer sur la garde des enfants mineurs, sur la pension alimentaire due à l’époux qui a la garde des enfants pour l’entretien de ceux-ci, ainsi que sur les droits de visite de l’époux auquel la garde des enfants n’a pas été confiée (cf. les articles 706 et suivants du Code de procédure civile italien, 156 du Code civil italien et 38 des dispositions transitoires et finales du même code, pour ce qui est de la séparation de corps ; 4 et 5 de la loi n° 898 du 1er décembre 1970 en matière de divorce ; 126 du Code civil italien pour ce qui est de l’annulation du mariage civil).

        Les tribunaux des mineurs, par contre, sont compétents, en général, sur tous les aspects de la procédure d’adoption (soit « interne », soit « internationale » : cf. les lois n° 184 du 4 mai 1983 et n° 149 du 28 mars 2001), ainsi que sur les procédures visant à limiter ou à exclure l’exercice de la responsabilité parentale, en dehors des situations de crise du couple (cf. les articles 330 et suivants du Code civil italien).

        En plus, les tribunaux des mineurs sont compétents pour ce qui est des aspects « personnels » (droit de garde, droit de visite) sur les enfants naturels : cela veut dire, par exemple, qu’un litige en matière de « séparation » d’un ménage de fait relèvera – mais seulement pour ce qui est des problèmes touchant à la garde des enfants et aux droits de visite – de la compétence du tribunal des mineurs. Cette solution particulière, qui n’est pourtant pas réglée clairement par la loi, peut être tirée de l’art. 317-bis du Code civil italien. En effet, la réforme du droit de la famille, réalisée par une loi de 1975, a garanti une même dignité à l’enfant né hors du mariage, même si elle n’a pas créé un statut comparable à celui de l’enfant légitime. Cette loi a introduit dans le Code civil italien l’article qu’on vient de mentionner, aux termes duquel « au parent qui a reconnu l’enfant naturel revient l’autorité parentale sur ce dernier. Si la reconnaissance est faite par les deux parents, l’exercice de l’autorité parentale revient conjointement aux deux, pourvu qu’ils vivent ensemble. On applique dans ce cas les dispositions de l’article 316 [qui réglemente l’exercice de l’autorité parentale des pères et mères légitimes]. Si les parents ne vivent pas ensemble l’exercice de l’autorité parentale revient à celui des parents avec lequel l’enfant vit, ou bien, si ce dernier ne vit avec aucun d’entre eux, au premier qui l’a reconnu. Le juge, dans intérêt exclusif de l’enfant, peut en disposer autrement (...) ».

        L’introduction de l’article 317-bis du Code civil a donc signifié, pour une partie de la doctrine, la consécration du phénomène de la famille de fait dans le système juridique. Toutefois, il ne faut pas oublier que la règle susdite ne réglemente pas les rapports familiaux, mais uniquement le rapport de filiation ; elle ne crée ni des droits ni des devoirs entre les conjoints, mais seulement des pouvoirs et des devoirs à l’égard des éventuels enfants naturels. Elle reproduit à leur égard une protection équivalente (et parallèle) à celle des enfants légitimes. Il y a cependant encore cette disparité de traitement entre enfants qui si trouvent au milieu d’un conflit familial, selon qu’ils soient légitimes ou naturels : les questions (personnelles) touchant les premiers seront tranchées par les tribunaux ordinaires, celle touchants les autres, par les tribunaux des mineurs.

        Ainsi, compétent pour tous les autres aspects en matière de rapports entre concubins (ou ex concubins) est le tribunal ordinaire. Cela veut dire que, par exemple, le tribunal des mineurs ne pourra pas statuer sur le droit à une pension alimentaire à la charge d’un des parents naturels. Sur ce point le parent auquel la garde sur l’enfant naturel a été attribuée devra s’adresser au tribunal ordinaire. Néanmoins les juges des mineurs accompagnent parfois la mesure sur la garde (et l’autorité parentale qui en découle) d’une décision de nature pécuniaire, avec l’attribution d’une pension pour l’entretien de l’enfant, qu’un des parents est obligé de verser à l’autre parent qui a la garde de l’enfant. Souvent les tribunaux des mineurs essayent de dépasser l’impasse en « obligeant » (ou en essayant de convaincre) les parents à signer un accord (souvent on peut parler ici d’un accord de « séparation amiable » entre ex concubins), par lequel le parent n’ayant pas la garde des enfants s’oblige à payer une pension à l’autre. Cet accord n’a pas pourtant la force d’un titre exécutoire. Il pourra par contre être soumis au tribunal ordinaire pour l’octroi d’une injonction de payer.

        Les tribunaux des mineurs sont des juridictions spécialisées disciplinées par le R.D. (décret royal) n° 104 du 20 juillet 1934, par la suite amendé et modifié. Ils sont institués dans chacune des vingt-six cours d’appel et dans chacune des trois sections détachées des cours d’appel ; ils sont donc vingt-neuf au total. Ils ont leur siège dans les chefs-lieux de région et dans certaines autres villes particulièrement importantes. Le tribunal pour les mineurs est un organisme spécialisé pour sa composition (il décide avec un collège formé par deux juges professionnels et deux juges honoraires experts en sciences humaines) et pour ses compétences civiles, pénales et administratives. Dans le domaine civil ses attributions concernent – comme on vient de le voir – la protection de la personne du mineur dans des situations potentielles de préjudice ou d’abandon, et les dispositions correspondantes portant des limitations à l’exercice de l’autorité parentale, l’adoption et la discipline de la garde des enfants disputés entre parents non mariés. Dans le domaine administratif il assume des mesures à contenu rééducatif à l’égard des mineurs qui font preuve d’une conduite irrégulière (y compris les mineurs qui exercent la prostitution). Enfin, dans le domaine pénal il juge les personnes pour des délits commis avant dix-huit ans. Les recours contre les jugements du tribunal des mineurs sont portés à la section pour les mineurs de la cour d’appel, avec un collège spécialisé formé de trois juges professionnels et de deux juges honoraires.

        Pour ce qui est du secteur spécifique de la formation en droit de la famille, le Conseil Supérieur de la Magistrature, dans le cadre de son activité de formation initiale et continue des magistrats italiens, organise périodiquement des activités dans les différents domaines relatifs à ces sujets. A titre d’exemple on pourra citer les cours spéciaux d’auto-formation pour les juges des tribunaux des mineurs (y compris les membres non magistrats), organisées avec la coopération de l’association des juges des mineurs. Ces mêmes magistrats participent aussi à des formations communes avec les juges qui traitent les affaires familiales au sein des tribunaux ordinaires. Toujours à titre d’exemple on pourra citer le premier cours entièrement consacré aux questions liées au rapports personnels et patrimoniaux au sein du concubinage en droit italien (eu aussi égard à l’expérience d’autres pays et systèmes européens), qui s’est tenu à Rome du 26 au 28 janvier 2004.

 

 

2.             Quels jugements une juridiction peut-elle rendre en prenant en considération l’intérêt des enfants?

                (a)           Jugement statuant avec quel parent (ou autre personne) l’enfant doit vivre,

(b)           Jugement statuant sur la nature du contact que l’enfant doit établir avec le parent qui n’a pas le droit de garde,

(c)            Jugement statuant sur le paiement d’une pension alimentaire par un des parents,

(d)           Jugement concernant l’éducation en général, l’éducation religieuse et l’état de santé y compris les soins médicaux de l’enfant,

(e)           Jugement concernant l’administration des biens mobiliers et immobiliers de l’enfant,

(f)           Jugement statuant sur la déchéance de l’autorité parentale.

 

        Toutes les mesures mentionnées par la question peuvent être adoptées par le juge. Le vrai problème, dans le système juridique italien, est de comprendre qui est le juge autorisé à les adopter. Comme on vient de le dire dans le cadre de la réponse au point précédent, il faut distinguer entre enfants légitimes et enfants naturels.

        Pour les enfants issus d’un mariage, le tribunal ordinaire est compétent sur les points suivants : (a), (b), (c) et (e). Pour ce qui est du point (d), si le problème se pose au sein d’un couple en instance de séparation ou divorce c’est au tribunal (ordinaire) statuant sur la séparation ou sur le divorce de trancher la question. Si le problème se pose en dehors d’une instance de séparation de corps ou de divorce, et si les parents n’arrivent pas à s’accorder, c’est au tribunal des mineurs qui revient la tâche de décider qui sera le parent autorisé à prendre la décision la plus conforme à l’intérêt du mineur (cf. l’article 316 du Code civil italien). Sur ce point il faut encore ajouter que, si les parents n’arrivent pas à s’accorder sur une intervention urgente et il y a un danger imminent d’un grave préjudice pour l’enfant (on peut penser ici à une opération chirurgicale), le père est autorisé, même avant avoir saisi le tribunal des mineurs, à adopter toute décision urgente dans l’intérêt de l’enfant.

        Pour les enfants naturels, le tribunal ordinaire n’est compétent que sur les points (c) et (e), tandis que le tribunal des mineurs est compétent sur les autres points.

        Le tribunal des mineurs est aussi toujours compétent (enfants légitimes et naturels) pour ce qui est des questions relatives au point (f).

        Pour ce qui est en particulier du point (e) il faut ajouter qu’ici les compétences ne sont pas partagées entre les tribunaux des mineurs et les tribunaux ordinaires, mais entre ces derniers et les juges des tutelles. Avant une réforme entrée en vigueur en 1999 le juge des tutelles était un prêteur, juge unique compétent en matière civile pour toutes les affaires dont le montant était inférieur à une certaine somme. A partir du 2 juin 1999, la distinction entre le prêteur et le tribunal (juge qui était normalement collégial) a été supprimée et a été institué un juge unique de premier degré (qui laisse cependant subsister le juge civil de paix et la cour d’assises). La création du « juge unique de première instance », dont le but est de réduire les temps et de simplifier les procédures des procès, a réuni les compétences des preture et des tribunaux ordinaires et en introduisant le principe du jugement à juge unique des affaires en première instance, tout en réservant un certain nombre d’hypothèses qui, à titre d’exception, demeurent attribuées à la connaissance d’une formation collégiale. Il s’agit de toutes les procédures dans lesquelles l’intervention du ministère public est obligatoire et notamment de la matière du droit des personnes et de la famille. Maintenant le juge des tutelles n’est rien d’autres qu’un juge du tribunal, qui pourtant a une série de compétences pour ce qui est de la gestion des patrimoines des mineurs et des sujets « faibles » (il doit, par exemple, autoriser toute aliénation des biens appartenant aux enfants).

 

 

3.             Quand la juridiction statue, applique-t-elle comme critère déterminant celui du meilleur intérêt de l’enfant?

 

          Le critère de l’intérêt de l’enfant  – souvent mentionné comme celui de l’« intérêt exclusif » de l’enfant – est le seul critère qui doit inspirer tout accord entre les parties, ainsi que toute décision de justice sur le mineur. Plusieurs dispositions font expresse référence à cette règle, qui est assurément l’un des plus importants principes généraux du droit de la famille. Ainsi, par exemple, l’article 158 du Code civil italien prévoit que le tribunal (ordinaire) doit refuser l’homologation des accords de séparation de corps consensuelle, lorsqu’ils sont contraires à l’intérêt des enfants mineurs, tandis que l’article 317-bis, qu’on a déjà mentionné, renvoie au même critère pour ce qui est des décisions sur les enfants naturels. De même l’article 4, alinéa 13, de la loi sur le divorce (n° 898 du 1er décembre 1970, modifiée par la loi n° 74 du 6 mars 1987) empêche au tribunal de prononcer le divorce sur demande conjointe, lorsque les conditions relatives aux enfants mineurs sont contraires à leurs intérêts.

        Dans les cas de séparation de corps et de divorce contentieux les articles 155 du Code civil et 5 de la loi sur le divorce (n° 898 du 1er décembre 1970, modifiée par la loi n° 74 du 6 mars 1987) font référence à l’ « intérêt exclusif moral et matériel », comme le seul qui doit guider le juge dans sa décision. D’autre côté, les articles 250, 252, 273 et 279 du même code appliquent le principe de l’intérêt des mineurs au domaine de la reconnaissance des enfants naturels et de la déclaration déclaration par voie judiciaire de la maternité (et/ou de la paternité).

        Tout cela ne veut pas dire, bien entendu, que le juge ait toujours le monopole des décisions en matière d’enfants. La jurisprudence de la Cour de cassation a plusieurs fois décidé que les parents exerçant l’autorité parentale peuvent s’accorder sur la gestion de cette autorité, même en cas de rupture de l’union (légitime ou naturelle), pourvu que le critère de l’ « exclusif intérêt du mineur » soit respecté. Ainsi, par exemple, tout accord et toute décision en matière de rapport personnels et patrimoniaux entre époux et sur les enfants de parents séparés de corps ou divorcés pourra toujours être modifié selon la volonté des parties, pourvu que ces ententes respectent le critère qu’on vient de mentionner, sans aucune homologation de la part du tribunal (cf. Cass., 24 février 1993, n° 2270 ; Cass., 22 janvier 1994, n° 657). Il en est de même pour ce qui est des accords entre parents naturels : là aussi l’intervention du juge n’a qu’un caractère « éventuel » et « successif », si ces ententes sont contraires à l’intérêt des mineurs (cf. Cass., 25 mai 1993, n° 5847).

 

 

4.             Dans quelle mesure un juge peut - il être proactif dans une affaire impliquant des enfants?  En particulier:

(a)       Un juge peut-il prendre une mesure dans l’intérêt de l’enfant, même si cette mesure n’a pas été demandée par aucun des parents (ou une autre partie au litige)?  Un juge peut-il ouvrir, de sa propre initiative (ex proprio motu,) une enquête sur l’environnement de l’enfant et de ses parents?

(b)           Le juge peut-il faire appel à des experts, par exemple, un psychologue pour enfants?

(c)            Le juge peut-il exiger la présence des deux parents à une audience?

Un juge dispose-t-il d’autres procédures d’investigation ou d’ instruction dans des affaires impliquant des enfants?

 

        La matière en examen est l’une des rares matières dans lesquelles le juge (soit le tribunal ordinaire, soit le tribunal des mineurs, comme on vient de le voir dans la réponse à la question n° 1) a le droit et le devoir d’intervenir – même ex officio – au cours d’une procédure. Bien entendu, cela ne veut pas dire qu’un tribunal ordinaire pourra, par exemple, ordonner l’ouverture d’un procès de séparation ou de divorce. Le juge ne pourra pas non plus se saisir par lui-même d’une affaire sur la garde des enfants. Une fois pourtant que le tribunal a été investi d’une procédure de séparation ou de divorce, le juge ne pourra que se référer – comme on vient de le dire – au critère de l’intérêt des mineurs. Cela veut dire que, par exemple, tout accord entre époux (ou entre concubins ou parents naturels, soumis à la compétence du tribunal des mineurs) que le juge estime contraire à l’intérêt des mineurs concernés pourra être mis au néant. Ainsi, par exemple, lorsque – au cours d’une procédure contentieuse – le juge estime que la pension demandée par l’un des parents pour l’entretien de l’enfant qui lui a été confié n’est pas suffisante, il pourra ordonner le paiement d’un montant plus élevé, même au défaut d’une demande sur ce point (cf. l’article 6, alinéa 9, de la loi n° 898 du 1er décembre 1970 en matière de divorce).

        D’ailleurs, les procédures visant à la limitation ou à l’exclusion de la puissance parentale peuvent être mises en mouvement aussi par le parquet auprès du tribunal des mineurs (cf. l’article 336 du Code civil italien).

        Le juge, dans le domaine des décisions sur la garde des enfants et les droits de visite,  peut toujours faire appel à des experts : il s’agit là surtout de psychologues pour enfants, qui vont mener une véritable enquête sur l’enfant et sur son milieu familial et de vie (école, sport, amis, grands-parents, etc.). Leur tâche est aussi, bien entendu, celle d’aider le juge dans le choix (parfois terriblement difficile) du parent le plus adapte à assumer la garde de l’enfant. Une autre question à laquelle l’expert devra répondre concerne les conditions dans lesquelles le contact avec l’autre parent doit avoir lieu, dans le respect du critère de l’intérêt de l’enfant. Le rôle de ces experts est d’une importance cruciale surtout lorsque les parents choisissent la voie de se lancer des accusations très graves, telles que, par exemple, celles d’abus sexuels sur les enfants.

        La matière est réglée, pour ce qui est de la procédure ordinaire, par les articles 191 et suivants du Code de procédure civile italien. La décision de faire appel à un expert (selon une règle qui vaut pour toute procédure civile) peut être prise soit sur la demande des parties (ou d’une d’elles), soit ex officio par le juge. L’avis exprimé par l’expert n’est jamais contraignant pour le juge, suivant la règle selon laquelle le juge est le peritus peritorum (l’expert des experts).

        Si les parents ont le statut de parties dans le procès, ils ont toujours le droit d’assister aux audiences, sauf que le juge estime devoir effectuer l’audition d’un mineur à l’audience et en absence des parents. Par contre il n’y a pas de moyen pour contraindre une partie qui ne veut pas participer à une audience à y assister : il s’agit là d’une règle tout à fait générale pour toute procédure civile.

        Selon les règles de la procédure civile le juge peut à tout moment ordonner la comparution personnelles des parties pour leur demander des éclaircissements et/ou pour essayer de les concilier (cf. l’article 185 du Code de procédure civil italien) ; suite à la reforme de la procédure civile italienne approuvée en 1990 cette comparution est prévue comme obligatoire toujours au début de chaque procédure par devant le juge chargé de la mise en état du dossier (cf. l’article 183 du Code de procédure civil italien). Dans la matière spécifique de la séparation et du divorce, les parties doivent avant tout comparaître devant le Président du Tribunal, qui doit essayer de les concilier avant de prononcer les mesures provisoires (cf. les articles 706 et suivants du Code de procédure civile italien).

Un rôle assez important dans les procédures en examen est joué par les services des assistants sociaux. Dans toute procédure concernant des mineurs le juge (tribunal ordinaire ou  tribunal des mineurs) peut demander aux services des assistants sociaux compétents par territoire de mener une enquête sur les mineurs et sur l’ « environnement » social dans lequel ils se situent.

 

 

5.             Existe t-il dans votre pays un service de médiation de famille?  Si un tel service existe, le juge peut il faire appel à la médiation ou est-il obligé de le faire?

 

        Depuis quelques années même l’Italie a assisté à la naissance de plusieurs centres de médiation familiale. Les avocats spécialisés en droit de la famille tendent à considérer ces centres comme une sorte d’activité « concurrentielle » : c’est pour cela que la pratique du recours à la médiation ne s’est pas encore répandue. Plusieurs projets de loi y font référence, mais pour l’instant – pour ce qui est de la législation en vigueur – on ne peut trouver qu’une référence parmi les dispositions sur la violence dans les relations familiales. Selon l’article 342-ter du Code civil, introduit par la loi n° 154 du 4 avril 2001, le juge – dans le cas où il vérifie l’existence d’une situation de grave préjudice à l’intégrité physique ou psychique ou à la liberté de l’un des membres de la famille – peut ordonner l’éloignement forcé du membre de la famille responsable et l’intervention non seulement des services sociaux, mais aussi d’un centre de médiation familiale.

        Même en l’absence d’un tableau de référence au niveau législatif les juges du fond ont parfois fait recours aux centres de médiation. Ainsi, par exemple, le Tribunal de Bari a statué qu’il est conforme au système législatif en vigueur le fait que le juge, dans une situation de crise d’un couple renvoie les époux (ou les concubins) devant un médiateur spécialisé dans la matière familiale afin de poursuivre les tentatives de conciliation que le  Code de procédure civile confie au juge (cf. Trib. Bari, 21 novembre 2000, in Dir. fam. pers., 2001, I, p. 1501).

 

 

6.             Le juge est-il obligé, lors d’une audience dans des affaires impliquant des enfants, de donner aux enfants le droit de s’exprimer ?  Quelles sont les méthodes utilisées dans votre système de droit pour vérifier le point de vue de l’enfant ?

 

        L’Italie a ratifié par la loi n° 176 du 27 mai 1991 la Convention de New York relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989, dont l’article 12 prévoit ce qu’il suit : « Les États parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. A cette fin, on donnera notamment à l’enfant la possibilité d’être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l’intéressant, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un représentant ou d’un organisme approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale ».

La Cour constitutionnelle italienne, par son arrêt n° 1 du 30 janvier 2002, a statué que cette disposition est d’application immédiate au niveau national, sans aucune nécessité d’une loi interne d’application de la convention, soit pour ce qui est de l’écoute direct, soit pour ce qui concerne l’écoute indirect. Les dispositions en examen ont implicitement abrogé les normes contenues dans la loi sur le divorce (cf. les articles 4, alinéa 8, et 6, alinéa 9, de la loi n° 898 du 1er décembre 1970), qui ne prévoyaient l’audition des mineurs que lorsque cela était strictement nécessaire eu égard à son âge. On estime pourtant que cette écoute peut se faire aux termes de la convention, même de façon indirecte, par le biais des parents (bien entendu, lorsqu’ils sont d’accord), ou des services sociaux, qui pourront dire que le mineur a été informé de la procédure et communiquer au juge son opinion sur les questions qui le concernent.

 

        Il faudra encore dire que l’Italie a ratifié la Convention de la Haye du 29 mai 1993 par la loi n° 476 du 31 décembre 1998. Aux termes de cette Convention le mineur doit être écouté au cours d’une procédure d’adoption, et même après celle-ci (cf. les articles 4 d. et 21, alinéa 2).

 

Finalement le 1er novembre 2003 est entrée en vigueur en Italie la Convention Européenne sur l’exercice des droits des enfants, faite à Strasbourg le 25 janvier 1996, après sa ratification par la loi n° 77 du 20 mars 2003, dont les articles 4, 5 et 6 prévoient respectivement ce qu’il suit.

        « Article 3 – Droit d’être informé et d’exprimer son opinion dans les procédures

        Un enfant qui est considéré par le droit interne comme ayant un discernement suffisant, dans les procédures l’intéressant devant une autorité judiciaire, se voit conférer les droits suivants, dont il peut lui-même demander à bénéficier:

a.    recevoir toute information pertinente;

b.   être consulté et exprimer son opinion;

c.    être informé des conséquences éventuelles de la mise en pratique de son opinion et des conséquences éventuelles de toute décision.

        Article 4 – Droit de demander la désignation d’un représentant spécial

1.   Sous réserve de l’article 9, l’enfant a le droit de demander, personnellement ou par l’intermédiaire d’autres personnes ou organes, la désignation d’un représentant spécial dans les procédures l’intéressant devant une autorité judiciaire, lorsque le droit interne prive les détenteurs des responsabilités parentales de la faculté de représenter l’enfant en raison d’un conflit d’intérêts avec celui-là.

2.   Les Etats sont libres de prévoir que le droit visé au paragraphe 1 ne s’applique qu’aux seuls enfants considérés par le droit interne comme ayant un discernement suffisant.

        Article 5 – Autres droits procéduraux possibles

        Les Parties examinent l’opportunité de reconnaître aux enfants des droits procéduraux supplémentaires dans les procédures intéressant les enfants devant une autorité judiciaire, en particulier:

a.    le droit de demander à être assistés par une personne appropriée de leur choix afin de les aider à exprimer leur opinion;

b.   le droit de demander eux-mêmes, ou par l’intermédiaire d’autres personnes ou organes, la désignation d’un représentant distinct, dans les cas appropriés, un avocat;

c.    le droit de désigner leur propre représentant;

d.   le droit d’exercer tout ou partie des prérogatives d’une partie à de telles procédures ».

 

        Malheureusement la Convention ne s’applique en Italie qu’à un nombre très limité de procédures concernant les mineurs : plus exactement il s’agit des procès envisagés par les articles 145 (intervention du juge dans le cas de désaccord des parents sur une décision fondamentale de la vie familiale) ; 244, dernier alinéa (action en désaveu de paternité initiée par un mineur qui soit âgé de plus de 16 ans) ; 247 (action en désaveu de paternité en cas de décès du mari, de la mère ou de l’enfant) ; 264, alinéa 2 (autorisation pour l’enfant mineur qui soit âgé de plus de 16 ans à contester sa reconnaissance comme enfant naturel) ; 274 (jugement sur l’admissibilité de l’action en déclaration par voie judiciaire de la paternité ou maternité naturelles) ;  322 (annulation des actes accomplis par les parents au nom des enfants mineurs sans l’autorisation du juge) ; 322 (action en nullité des actes que les parents ne peuvent pas accomplir sur le patrimoine de leurs enfants) du Code civil italien.

 

        Pour ce qui est des méthodes utilisées dans le système italien pour vérifier le point de vue de l’enfant on pourra mentionner – aux termes des dispositions qu’on vient de citer – l’audition directe (lorsque l’enfant apparaît capable de discernement et suivant les modalités conseillées par les spécialistes) et l’audition indirecte par le biais d’un expert ou des services sociaux. L’avis des mineurs pourra aussi être présenté par les parents, en tant que sujets exerçant l’autorité parentale, mais seulement dans le cadre d’une procédure consensuelle, ou bien lorsqu’il sont d’accord sur le contenu de la volonté du mineur à soumettre au juge. Bien entendu le juge pourra toujours ordonner l’audition directe du mineur (soit par le biais des services sociaux, soit par lui-même), lorsqu’il estime cela nécessaire.

 

 

7.             Dans votre système de droit, par quels moyens une décision judiciaire concernant un enfant, en particulier le droit de garde et les droits d’accès ou de visite, peut-elle être exécutée ?  Le juge peut-il faire appel à l’assistance d’organismes non judiciaires comme la police ou les autorités des services sociaux ?

           

            Ce sujet très délicat a formé l’objet de plusieurs discussions, du moment que l’exécution de tout jugement civil doit suivre des règles de procédure qui ne tiennent normalement pas compte des exigences relatives à la situation particulière des mineurs. A ce propos on pourra citer les articles 605 et suivants du Code de procédure civile italien, qui règlent l’exécution forcée des obligations de livrer une chose, tandis que les articles 612 et suivants règlent l’exécution des obligations de faire ou de ne pas faire. Dans le premier type d’exécution le créancier peut s’adresser directement à l’huissier, en lui livrant le titre exécutoire. L’huissier pourra se faire aider par la force publique et/ou par les services sociaux. Dans le deuxième cas la partie doit s’adresser d’abord au tribunal (avant 1999 c’était le pretore), afin que celui-ci détermine par une ordonnance les modalités concrètes d’exécution (y compris, bien entendu, l’intervention de la force publique et des services sociaux). La Cour de cassation, par un arrêt de 1979, eu égard au fait que la « livraison » d’un enfant n’a rien à avoir avec la livraison d’une chose, a décidé que toute décision en matière de droit de garde et de visite doit être exécutée selon la procédure des articles 612 et suivants du Code (cfr. Cass., 15 janvier 1979, n° 292 ; Cass., 7 octobre 1980, n° 5374). Par ailleurs, plusieurs juges et experts pensent que c’est au juge des tutelle que reviendrait la tâche de veiller à l’exécution de ce genre de mesures (cfr. par exemple Pret. Roma, 5 août 1981, in Giur. it., 1982, I, 1, c. 302 ; Pret. Genova, 20 mai 1986, in C.E.D.-Corte di cassazione, Arch. MERITO, PD.326287).

        Un projet de loi visant à rationaliser tout ce complexe système a été récemment rejeté par le Parlement italien. Il faut ajouter pourtant que ce projet n’avait de positif que l’élimination des différentes compétences en matière de mineurs « éparpillées » (comme on vient de le voir) entre tribunal ordinaire, tribunal des mineurs, juge des tutelles. Pour le reste, le projet prévoyait l’élimination des compétences civiles des tribunaux des mineurs et la suppression des juges non professionnels (qui pourtant ont toujours fait preuve d’un grand professionnalisme).

 

 

8.             Dans votre système de droit, dans quelle mesure une juridiction peut-elle exécuter des décisions judiciaires prononcées dans un autre pays ?  Quels traités internationaux s’appliquent dans votre pays pour la mise en exécution des décisions prises dans les pays étrangers ou pour le retour d’un enfant illégalement substitué à la justice d’un pays étranger ?

 

(A) Reconnaissance mutuelle et exécution des décisions en matière de droit de la famille au sein des pays de l’UE : le règlement n° 1347/2000 du Conseil (« Bruxelles II »).

 

        Le premier instrument communautaire dans le domaine de la coopération juridique dans le domaine spécifique du droit de la famille a été le règlement dit « Bruxelles II » : il s’agit, plus exactement, du Règlement (CE) nº 1347/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale des enfants communs.

        Le règlement couvre le sujet des affaires civiles concernant le divorce, la séparation légale de corps et l’annulation du mariage, aussi bien que la matière de la responsabilité parentale sur les enfants des deux conjoints, quand la crise du mariage a lieu. La juridiction dans les procédures concernant le divorce, la séparation légale ou l’annulation du mariage est déterminée selon le pays de la résidence d’un ou des deux conjoints ou selon leur nationalité. La cour compétente est également compétente dans toutes les matières touchant à la responsabilité parentale sur les enfants des deux conjoints, si l’enfant est résident dans cet Etat membre. Si cela n’est pas le cas, la même cour peut avoir la juridiction dans certaines circonstances. Si une affaire est portée dans un Etat membre, la cour concernée détermine si elle a la juridiction en se référant aux critères prévus par le règlement. Là où des cas parallèles sont apportés dans différents Etats membres, la deuxième cour saisie doit attendre que la première affirme sa juridiction. Dans ce cas elle devra accepter la juridiction de la cour qui a été saisie en première, mais, dans des cas d’urgence, elle peut prendre des mesures de sauvegarde temporaires.

        Les jugements dans les matières matrimoniales ou sur la responsabilité parentale émis dans un Etat membre sont reconnus dans les autres Etats membres sans aucune formalité particulière ; aucune procédure n’est exigée pour la mise à jour des documents de l’état civil. Le règlement interdit la reconnaissance d’un jugement dans les sujets matrimoniaux ou dans les sujets de la responsabilité parentale pour certaines raisons, mais un jugement ne pourra pas être revu quant à sa substance dans aucun cas. Reconnaissance automatique ne signifie pourtant pas exécution automatique. Par conséquent, un jugement sur l’exercice de la responsabilité parentale sur un enfant des deux parties doit être déclaré exécutoire dans un Etat membre sur demande d’un sujet ayant droit qui veut l’exécuter dans un état différent de celui dans lequel la décision a été rendue. Contre une décision sur une demande autorisant l’exécution on pourra faire recours. Au moment de son entrée en vigueur, ce règlement a remplacé les conventions existantes entre les Etats membres et a eu la priorité sur les conventions internationales sur le même sujet. Le règlement est entré en vigueur le 1er mars 2001.

 

(B) Reconnaissance mutuelle et exécution des décisions en matière de droit de la famille au sein des pays de l’UE : le nouveau règlement n° 2201/2003 du Conseil (« Bruxelles II-bis »).

 

        Le règlement appelé « Bruxelles II » a subi plusieurs critiques, particulièrement en ce qui concerne les décisions concernant la responsabilité parentale. En effet le règlement exige toujours un procédé d’exequatur pour ce genre de jugements. Une proposition française a été présentée le 3 juillet 2000, visant à éliminer la nécessité d’un exequatur par rapport aux décisions judiciaires au sujet des droits d’accès et de visite des mineurs. Une autre limite du règlement dérive du fait que celui-ci ne traite pas de la responsabilité parentale que dans les cas où il y a une procédure de divorce, de séparation légale de corps ou d’annulation de mariage. Par conséquent, il ne s’applique pas aux enfants issus hors du mariage. Ce champ a été couvert par une proposition de la Commission présentée le 6 septembre 2001. Ces deux propositions pour la modification du règlement « Bruxelles II » ont été fusionnées dans une nouvelle proposition de la Commission, en date du 3 mai 2002. Le 3 octobre 2003 le Conseil a conclu un accord sur le nouveau Règlement (CE) No 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) no 1347/2000.

        Ce nouveau règlement se base sur deux éléments fondamentaux. D’abord, il renferme en soi et garde telles qu’elles sont les dispositions sur le divorce (comme sur la séparation légales de corps et l’annulation du mariage) déjà contenues dans le  règlement n° 1347/2000. En deuxième lieu, il intègre dans un système complet les règles sur la responsabilité parentale du règlement n° 1347/2000, la proposition de la Commission sur la responsabilité parentale et l’initiative française sur les droits d’accès et de visite.

        Par conséquent, le règlement n°1347/2000 du Conseil est abrogé, ses dispositions ayant été reprises dans leur intégralité dans le nouveau règlement. Le Conseil a opté pour un instrument simple sur le divorce (aussi bien que sur la séparation et l’annulation du mariage) et la responsabilité parentale en vue de faciliter le travail des juges et des praticiens en traitant les questions sur la responsabilité parentale qui se posent souvent dans le contexte des affaires matrimoniales. L’alternative aurait été celle d’abroger seulement les dispositions sur la responsabilité parentale du règlement n° 1347/2000 et de donner lieu à un règlement différent seulement sur cette dernière question. Le résultat aurait été celui de deux instruments séparés, traitant des sujets très étroitement liés (le divorce et la responsabilité parentale). Cette alternative n’a pas été considérée satisfaisante ni pour faciliter l’application de la loi par les juges et les praticiens, ni pour favoriser la simplification et la concordance de la législation communautaire.

        Pour ce qui est des matières matrimoniales, les dispositions du nouveau règlement sont les mêmes que celles du règlement n° 1347/2000, comme on vient de le dire. En ce qui concerne les sujets de la responsabilité parentale, une « large » définition de ce concept est donnée par l’article 2, selon lequel « responsabilité parentale » est l’ensemble des droits et obligations conférés à une personne physique ou une personne morale sur la base d’une décision judiciaire, d’une attribution de plein droit ou d’un accord en vigueur, à l’égard de la personne ou des biens d’un enfant. Il comprend notamment le droit de garde et le droit de visite ». C’est donc clair que le nouveau règlement concerne soit les enfants légitimes soit les enfants naturels.  

        Le nouveau règlement ne couvre pourtant pas la matière des pensions alimentaires entre les conjoints et/ou entre les parents et les enfants, car tels aspects sont réglés par le règlement « Bruxelles I », exigeant toujours un procédé d’exequatur pour l’exécution transfrontalière des jugements dans ces domaines. La réunion du Conseil européen à Tampere en octobre 1999 (point 34) a identifié le secteur des droits de visite comme une priorité pour la coopération juridique, comme réponse à un besoin social réel, surtout lorsque les gens se déplacent de plus en plus d’un Etat membre à l’autre, et les familles se brisent et se recomposent. L’objectif de ce nouvel instrument est celui de mieux protéger les intérêts de l’enfant.

        À cet effet, le nouveau règlement : (a) prévoit que « les juridictions de l’État membre dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour illicites conservent leur compétence jusqu’au moment où l’enfant a acquis une résidence habituelle dans un autre État membre et qu’il ait la possibilité d’être entendu au cours de la procédure, à moins que cela n’apparaisse inapproprié eu égard à son âge ou à son degré de maturité » (cf. l’article 10) ; (b) intègre les dispositions de la convention du 1980 de la Haye sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants (cf. les articles 11 à 15) ; (c) prévoit l’exécution transfrontalière (non seulement des jugements, mais aussi bien) des accords entre les parties (cf. l’article 46) ; (d) étend le principe de la reconnaissance mutuelle à toutes les décisions sur la responsabilité parentale (ceci correspond à la proposition de la Commission sur la responsabilité parentale) ; (e) supprime l’exequatur pour les droits de visite (ceci correspond à l’initiative française sur les droits de visite ; la solution est conforme aussi bien à une initiative par laquelle la Commission propose la suppression de l’exequatur pour certains jugements dans le secteur du droit commercial en vue de la création d’un titre exécutoire européen pour les créances non contestées) ; et (f) élabore une solution pour le retour de l’enfant dans les cas de son enlèvement : ici, en effet, le juge de l’Etat membre où l’enfant se trouve pourra prendre une mesure de sauvegarde temporaire empêchant le retour de l’enfant ; cette décision pourra par la suite être remplacée par un jugement sur la garde rendue par les cours de l’Etat membre où se trouve la résidence habituelle de l’enfant. En outre, si le juge compétent ordonne le retour de l’enfant, ce jugement ne nécessitera plus d’aucun exequatur pour son exécution forcée. Les dispositions du nouveau règlement font ici une référence claire aux dispositions de la convention de la Haye et les intègrent (voir les articles 11 à 15).

        L’Etat membre indiquera au moins une autorité centrale, qui jouera un rôle essentiel pour l’application du nouveau règlement dit « Bruxelles II-bis ». Les autorités centrales seront efficacement intégrées dans le réseau judiciaire européen et serviront de lien entre les cours nationales et les autorités centrales d’autres Etats membres. Le règlement entrera en vigueur le 1er mars 2005, c’est-à-dire exactement 4 ans après le premier règlement (« Bruxelles II »).

        Il faut encore ajouter que la Commission a mis sur pied un Réseau Judiciaire Européen en matière civile et commerciale, dont l’adresse web est la suivante : http://europa.eu.int/comm/justice_home/ejn/. Le principal objectif du réseau est de faciliter la vie des personnes qui sont confrontées à toutes sortes de litiges qui ont des aspects « transfrontaliers ». Les professionnels du droit trouveront ce site assez utile pour avoir accès à la connaissance des divers systèmes nationaux des instruments législatifs de l’union européenne et d’autres organismes internationaux comprenant les Nations Unies, la conférence de la Haye et le Conseil de l’Europe. Un vade-mecum à l’usage des juges et d’autres praticiens sera rédigé sur l’application du nouveau règlement « Bruxelles II-bis ».

 

(C) Le rôle de la conférence de la Haye et du Conseil de l’Europe dans le domaine de la coopération judiciaire en matière de droit de la  famille.

 

        Un rôle crucial dans cette matière est aussi joué par la Conférence de la Haye de droit international privé et par le Conseil de l’Europe. En ce qui concerne le premier institut on pourra rappeler, entre autres, La Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale de 1993, la Convention de La Haye du 19 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants. Un résultat important de l’activité de la Conférence de la Haye dans ce domaine est l’établissement d’une base de données internationale sur les décisions prises par les cours nationales sur l’enlèvement international d’enfants, connue sous le nom de « Incadat » (http://212.206.44.26/index.cfm ; d’autres informations sur ce sujet sont disponibles au site web suivant : http://www.hcch.net/).

        En ce qui concerne le Conseil de l’Europe, cet organisme a développé une activité intense en fixant des normes communes dans un certain nombre de recommandations et de conventions ad hoc, visant, entre autres, à assurer une meilleure protection des enfants, élaborant un grand nombre d’instruments internationaux à ce sujet. Le résultat principal du grand travail qui a été effectué à Strasbourg est représenté par cinq conventions spécifiquement consacrées aux enfants, aussi bien que par plusieurs recommandations du Comité des ministres du Conseil de l’Europe.

        Ici on ne pourra que faire mention des cinq conventions, qui sont : la Convention européenne en matière d’adoption des enfants (1967) ; la Convention européenne sur le statut juridique des enfants nés hors mariage (1975) ; la Convention européenne sur la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière de garde des enfants et le rétablissement de la garde des enfants (1980) ; la Convention européenne sur l’exercice des droits des enfants (1996) ; la Convention sur les relations personnelles concernant les enfants (2003) (cf. la page web suivante :

http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/ListeTraites.asp?CM=8&CL=FRE ; pour une étude complète sur la matière des conventions internationales dans des sujets du droit de la famille je renvoie à mon étude International Conventions in the Field of Family Law, disponible depuis le 24 janvier 2000 au site web suivant :

https://www.giacomooberto.com/conventions/report.htm ; cf. aussi l’article Judicial Co-operation in Cross-Border Family Law Matters, depuis le dal 23 octobre 2003 au site web suivant :

https://www.giacomooberto.com/lecco/reportonlecco.htm).

 

 

9.             Dans votre système de droit, le juge traitant des affaires concernant des enfants dispose-t-il de pouvoirs suffisants lui permettant d’adopter une attitude proactive ?

 

        On peut renvoyer ici à la réponse donnée à la question n° 4. Les pouvoirs d’intervention ex officio du juge sont assez amples. Ce qu’il faut reprocher à la législation c’est le fait que les procédures d’exécution des jugements dans ces matières sont trop longues et complexes. Encore une fois, le manque d’un instrument tel que le contempt of court, connu par les cours d’Outre-manche, ou les astreintes du droit français, empêche aux parties d’exécuter de façon rapide et efficace les décisions rendues dans un domaine si délicat.

 

 

II

Quels points désirez-vous discuter en détail?

 

        Les points n° 1, 5 et 8.

 

III

(Pour préparer les conclusions)

Dans quelle mesure, considérez-vous qu’un juge saisi d’une affaire impliquant des enfants puisse adopter une attitude proactive ?

            Comment ce rôle du juge peut-il être réglé ?

 

        Lorsqu’il s’agit des intérêts personnels et patrimoniaux des enfants aucune limitation ne devrait pouvoir être apportée au pouvoir du juge de prendre, même en l’absence d’une demande à cet égard (ou en allant au delà de la demande posée par les parties), toutes les mesures qu’il estime les plus efficaces pour la sauvegarde de ces intérêts.

        Cependant ce rôle devrait entrer en jeu seulement si les parents n’arrivent pas à trouver un accord sur ces points, ou bien si le juge estime que l’accord des parents ne correspond pas, eu égard à toutes les circonstances, aux intérêts de l’enfant.

 

 

IV

Quelles sont vos suggestions concernant le thème à aborder l’année prochaine ?

 

·       Accords prématrimoniaux en vue de la séparation de corps ou du divorce (Premarital Agreements in Contemplation of Separation or Divorce), ou

·       Les contrats de concubinage (Cohabitation agreements), ou

·       Les nouvelles familles (The New Families), ou

·       Les régimes matrimoniaux (Matrimonial Property Law).

 

Turin, le 3 mai 2004.

 

 

Giacomo Oberto

Secrétaire Général Adjoint

de l’Union Internationale des Magistrats

 

 

 

 

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