LES CONTRATS PRENUPTIAUX
EN PREVISION D’UN EVENTUEL DIVORCE
ET LE ROLE DU NOTAIRE
DANS LA PREDETERMINATION DES CONSEQUENCES DE LA CRISE
DU COUPLE
“To leave poor me thou hast
the strength of laws,
Since why to love I can allege no cause.”
(Shakespeare, Sonnet 49)
Sommaire : 1. Contrats prénuptiaux en prévision d’un
éventuel divorce : un aperçu historique. – 2. Les contrats prénuptiaux en prévision du
divorce aux Etats-Unis. – 3.
Les contrats prénuptiaux en prévision du divorce au Royaume-Uni. – 4. Contrats prénuptiaux en
prévision du divorce dans l’Europe continentale : Catalogne et Allemagne. – 5. Le cas de la France. – 6. Les contrats
prénuptiaux en prévision du divorce en Italie. |
1. Contrats prénuptiaux en prévision
d’un éventuel divorce : un aperçu historique.
Dans le milieu culturel anglo-saxon, un
contrat prénuptial (prenuptial agreement, ou premarital agreement),
est en principe un contrat conclu avant le mariage par deux sujets ayant
l’intention de se marier [1]. Le contenu d’une entente prénuptiale
peut varier considérablement, mais comprend généralement des dispositions sur
la répartition des biens et la pension alimentaire des époux en cas de divorce
ou de séparation de corps. Ils peuvent également inclure des dispositions pour
l’allocation des biens à la suite d’un divorce, ainsi que des règles sur la
garde des enfants. On parle aussi de contrats « postnuptiaux »,
lesquels ne sont que des accords prénuptiaux conclus après la célébration du
mariage, ayant trait aux conséquences d’une éventuelle rupture.
Pour en venir à l’histoire de ces
contrats, je dois souligner que l’idée répandue, selon laquelle il s’agirait
ici de quelque chose de « nouveau » et d’étranger à notre tradition
juridique, n’est pas tout à fait vraie. Je ne citerai ici que quelques
exemples.
De nombreuses règles du droit romain se
référaient aux accords entre les futurs conjoints (ou leurs familles), appelés pacta
nuptialia (contrats de mariage), très souvent nommés aussi pacta
antenuptialia, ou pacta ante nuptias, avec une terminologie très
semblable à certaines expressions courantes, encore en usage de nos jours dans
les systèmes de Common Law, comme antenuptial agreements. L’un
des éléments les plus récurrents de ces contrats était l’obligation du mari
d’effectuer la restitution de la dot. La dot consistait dans le transfert d’une
somme d’argent ou de certains biens déterminés (meubles, biens immobiliers,
etc.) de la mariée (ou, plus souvent, de sa famille) à son époux, au moment du
mariage, afin de contribuer aux frais liés à la création d’un nouveau ménage (ad
onera matrimonii ferenda). Le mari avait le droit de gérer ces biens, de
percevoir leurs fruits et les intérêts (pour les utiliser dans l’intérêt de la
famille), mais il n’était pas leur propriétaire légal, du moins dans le plein
sens du mot, puisqu’à la dissolution du mariage, il était obligé (lui ou ses
héritiers) d’effectuer la restitution de l’apport dotal [2].
Le concept de pacta nuptialia
pouvait donc inclure des accords concernant, entre autres choses, la personne à
qui la dot devait être rendue (soit l’épouse, soit sa famille : père, frères,
héritiers, etc.). Les motifs de dissolution du mariage en droit romain
n’étaient pas seulement constitué par la mort ou par la capitis deminutio
maxima (par exemple si le conjoint était fait prisonnier de guerre et vendu
comme esclave), mais aussi le divorce. C’est pourquoi les sources romaines nous
informent abondamment sur ce sujet et nous pouvons y trouver de nombreuses
règles sur comment, à qui, à quel moment, etc. la dot aurait dû être restituée
en cas de divorce. De plus, de nombreuses lois du Digeste et du Code de
Justinien montrent que le scénario de dissolution du mariage envisagé
« par excellence » était le divorce : celui-ci, en fait, était
l’événement que, dans la plupart des cas, les juristes romains avaient à
l’esprit au moment de la conclusion d’un accord sur les conséquences
patrimoniales d’un mariage qui allait se célébrer [3].
Nous trouvons également dans les siècles
suivants (moyen-âge, renaissance, âge de la contre-réforme) des preuves
d’accords prénuptiaux visant à établir des règles patrimoniales sur les biens
des parties en cas de crise matrimoniale (séparation de corps, puisqu’à
l’époque le divorce n’était pas autorisé par l’Église catholique et, par
conséquence, par l’Etat).
Le premier cas que je voudrais
mentionner concerne une décision rendue à la fin du XVIe siècle par
la Rota Romana sur la validité d’un contrat de mariage que nous
pourrions sûrement décrire, en termes modernes, comme un contrat prénuptial en
vue d’une éventuelle crise du mariage. En l’espèce, la Rota Romana
(deuxième instance et Cour Suprême des États pontificaux) confirma la décision
du tribunal de première instance, rendue par la Rota de Bologne, qui
avait déclaré valable et exécutoire l’accord conclu avant le mariage par un
couple de cette ville. Selon ce contrat prénuptial, le mari avait promis de
payer à sa femme chaque année une certaine somme d’argent en cas de séparation
de corps. Il avait également promis que, s’il ne s’acquittait pas de cette
obligation une seule année, sa femme pourrait le poursuivre en justice et
demander la restitution de toute sa dot. Comme il n’avait pas payé la pension
alimentaire pour l’année 1589, le mari fut condamné à rendre la dot [4].
Encore plus intéressant est un cas
décidé le 20 juin 1612 par la Cour suprême de Sicile. Ici, dans un curieux
mélange d’italien et de latin, le notaire sicilien avait prévu dans le contrat
de mariage qu’en cas de séparation de corps, le régime de la communauté
coutumière des biens (cette forme de copropriété générale de tous les biens
étant le système par défaut des rapports patrimoniaux entre mari et femme dans
la ville sicilienne de Messine à cette époque là) serait considérée comme
n’ayant jamais existé pour ce couple [5].
Ce n’est pas le seul exemple d’un accord
de ce type en Europe. La tradition française connaît très bien la « clause
alsacienne », selon laquelle un couple peut choisir le système de la
communauté universelle de biens (comprenant aussi les biens immobiliers et les
biens acquis par chacun des époux avant le mariage) ; le régime
communautaire est pourtant soumis à une condition résolutoire, correspondant
justement à l’hypothèse du divorce.
Le résultat final est donc que, si le couple
ne se sépare pas et le mariage prend fin par le décès de l’un des époux, les
règles de la copropriété s’appliqueront et le conjoint survivant conservera sa
part (et bien sûr il y ajoutera la part provenant de l’héritage du conjoint
prédécédé). Si, au contraire, le mariage se révèle un « échec », le système de
la communauté (qui présuppose logiquement un couple dans lequel mari et femme
ne sont pas en désaccord ...) sera « annulé » et remplacé rétroactivement par
un régime de séparation de biens, comme si les deux n’avaient jamais été mariés
: ce qui renferme bien entendu un principe de bon sens [6].
2. Les contrats prénuptiaux en prévision du divorce
aux Etats-Unis.
Pour en venir à l’état actuel de la situation, nous
savons que de tels accords sont largement connus et pratiqués aux États-Unis.
Cependant, les juges américains ont pendant longtemps
exprimé l’avis que les accords prénuptiaux « corrompaient » l’essence
même du mariage, et donc ils ne les considéraient pas valables. En fait, ce
n’est qu’en 1976 que deux Cours Suprêmes ont décidé pour la première fois de
valider deux contrats de mariage de ce type [7]. En fait, cela ne s’est produit qu’après que les
législations des différents États faisant partie des États-Unis se furent
débarrassés de l’ancienne règle du divorce fondé sur la faute de l’un des
époux. Avant ces réformes, qui ont eu lieu au milieu des années soixante-dix du
XXe siècle, les accords prénuptiaux en vue d’un divorce étaient
considérés comme un moyen pour le mari « to buy himself out the marriage,
regardless of the circumstances of the divorce » (de s’acheter une voie
d’issue de secours du mariage, indépendamment des circonstances du divorce) [8].
Actuellement, les contrats prénuptiaux en prévision
d’un éventuel divorce sont reconnus, bien qu’ils ne soient pas toujours
considérés valables. A cette fin les deux parties doivent avoir reçu
préalablement (et séparément) conseil de la part de deux avocats indépendants
sur le contenu de l’accord. Certains avocats recommandent aussi de filmer le
moment de la signature, bien que cela soit facultatif. Certains États, comme la
Californie, exigent que les parties soient représentées par un avocat au moment
de la signature du contrat, si celui-ci exclut ou limite la pension alimentaire
en cas d’un éventuel divorce.
Les accords prénuptiaux sont, au mieux, une solution
partielle pour éviter certains des risques de litiges matrimoniaux en cas de
divorce. Néanmoins, ils peuvent être très efficaces et limiter les droits de
propriété et la pension alimentaire des parties. Il faut ajouter que ce type de
contrat de mariage peut dicter non seulement ce qui arrivera en cas de divorce,
mais aussi ce qui se passera en cas de décès, car les systèmes de Common Law
ne connaissent pas le principe du Civil Law qui interdit les accords sur
la succession d’une personne vivante. Par conséquent, les prenups
américains peuvent agir comme des contrats pour faire valoir un testament et /
ou éliminer tous les droits de succession des époux.
Aux États-Unis, les contrats prénuptiaux
sont reconnus dans les cinquante États et dans le district de Columbia. De
même, dans la plupart des juridictions, certains éléments sont requis pour
qu’un accord de ce type soit censé être valable, à savoir :
1. l’accord doit être écrit ;
2. les deux époux doivent déclarer quels
sont leurs patrimoines et leurs revenus ;
3. le contrat ne doit pas être unconscionable :
il s’agit ici d’une expression qu’on pourrait traduire comme
« injuste » ; ce qui, évidemment laisse un pouvoir
discrétionnaire plutôt large aux juges dans l’appréciation des accords des
parties, compte tenu de leurs situations patrimoniales et personnelles respectives.
En Californie, les parties peuvent
renoncer à la déclaration de patrimoines et de revenus, et il n’y a aucune exigence
de notarisation, mais c’est une bonne pratique de la faire. Des règles
spéciales s’appliquent si les parties signent l’accord sans avocat, et les
parties doivent avoir reçu conseil séparément par un avocat si elles veulent
limiter le montant de la pension alimentaire. Les parties doivent attendre sept
jours après la première présentation du contrat prénuptial avant de le signer,
mais il n’est pas nécessaire d’attendre un certain nombre de jours avant le
mariage.
En Californie, les concubins
« pacsés » peuvent aussi conclure un contrat de ce genre. Ce type
d’accord entre concubins peut présenter des aspects de complexité, car le
traitement fiscal fédéral des partenaires non mariés diffère de celui des
couples mariés.
Une clause d’extinction (sunset provision)
peut être insérée dans un contrat prénuptial, spécifiant qu’après un certain
laps de temps, l’accord expirera. Dans quelques États, comme le Maine, l’accord
cessera automatiquement après la naissance d’un enfant, à moins que les parties
ne le renouvellent. Dans d’autres États, l’écoulement d’un certain nombre
d’années de mariage entraînera l’annulation d’un accord prénuptial. Dans les
États qui ont adopté l’UPAA (Uniform Premarital Agreement Act :
il s’agit d’un modèle de loi uniforme, proposé pour l’adoption de la part de
chaque Etat par un organisme fédéral appelé Uniform Law Commission dans
le but d’avoir une discipline uniforme sur le même sujet) [9], aucune clause d’extinction n’est
prévue par la loi, mais une disposition de ce genre pourrait être prévue par
les parties. A noter que les Etats ont adopté des versions plus ou moins
différentes de l’UPAA.
Dans la rédaction d’un accord de ce genre, il est
important de reconnaître qu’aux Etats-Unis il existe deux types de lois
étatiques qui régissent le divorce, à savoir : (a) - le système dit de
« répartition équitable » (equitable distribution), qui est en
vigueur dans 41 États et (b) la communauté des acquêts (community property),
qui est le système légal dans 9 Etats (anciennes colonies françaises ou
espagnoles). Un accord signé dans un État qui suit le système communautaire
pourrait donc ne pas être conçu pour régir ce qui se passe dans un système de
« répartition équitable » et vice versa. Il pourrait donc être
nécessaire de s’adresser à des avocats dans les deux États pour couvrir
l’éventualité que les parties puissent vivre dans un État autre que l’État où
elles se sont mariées. Il est donc important de tenir compte de cet aspect dans
le processus de rédaction des contrats prénuptiaux.
3. Les contrats prénuptiaux en prévision du divorce au
Royaume-Uni.
Du point de vue historique, les contrats
prénuptiaux n’ont pas été considérés juridiquement valables en Grande-Bretagne.
Du moins, cela fut le cas jusqu’à l’affaire Radmacher v. Granatino. Les arrêts
de la Cour d’appel et de la Cour suprême de Grande-Bretagne dans cette fameuse
affaire constituent un véritable jalon dans l’histoire du droit matrimonial et
du divorce en Angleterre [10]. Ils ont clairement établi que,
contrairement à la jurisprudence antérieure, selon laquelle les accords
prénuptiaux étaient contraires à l’ordre public, ils doivent maintenant être
considérés valables, pourvu qu’ils aient été conclus librement par les deux
parties et en pleine connaissance de leurs conséquences.
Les parties étaient toutes deux des
ressortissants étrangers : notamment l’épouse allemande (dont le
patrimoine était coté à environ £ 100 000 000) et le mari français. Le couple
avait signé un contrat prénuptial selon la loi allemande par-devant un notaire
allemand, puis ils avaient divorcé au Royaume-Uni. En première instance, la
Haute Cour de Londres avait alloué au mari le montant de 5,6 millions de
livres, même si l’accord prénuptial stipulait qu’aucune des deux parties
n’aurait à prétendre quoi que ce soit de l’autre en cas de divorce. L’épouse a
donc interjeté appel.
Dans la motivation du jugement de la
cour d’appel, le Lord Justice Thorpe a expliqué la décision de renverser
le premier jugement, en soulignant que le premier arrêt n’avait pas accordé
suffisamment de poids à l’existence de l’accord. Au paragraphe 53 de la
motivation, il exprime l’avis suivant : « dans les affaires futures qui seront
conformes à la présente sur les faits, le juge devrait accorder le poids voulu
au régime matrimonial que les parties ont librement choisi. Il ne s’agit pas
ici d’appliquer le droit étranger, ni de donner effet à un contrat étranger à
la tradition anglaise. À mon avis, il s’agit là d’un exercice légitime du très
large pouvoir discrétionnaire conféré aux juges d’assurer l’équité entre les
parties à la procédure sur les conséquences patrimoniales du divorce.
D’autres parties pertinentes du
raisonnement de Lord Justice Thorpe peuvent être ici citées : « Il existe de
nombreux cas où des couples matures, qui envisagent peut-être un second
mariage, souhaitent réglementer la jouissance future de leurs biens et
peut-être protéger les intérêts des enfants des liens antérieurs lors de la
dissolution d’un second mariage. Ils ne peuvent pas chercher cette clarté sans
raison avant de s’engager dans un second mariage. Le respect dû à l’autonomie
des adultes suggère que, sous réserve, bien sûr, de garanties appropriées, un
contrat soigneusement conçu devrait être disponible comme alternative au
stress, aux angoisses et aux dépenses dérivant du choix de se soumettre à
l’ampleur du pouvoir discrétionnaire du juge ».
« Je retiens aussi mon avis pour
les raisons suivantes : a) La règle selon laquelle ces contrats prénuptiaux
seraient invalides me semble de plus en plus irréaliste. Elle reflète les lois
et la morale des générations précédentes. Elle ne reconnaît pas suffisamment
les droits des personnes adultes et autonomes à régir leur futures relations
financières par un accord, à un âge où le mariage n’est généralement pas
considéré comme un sacrement et le divorce est un lieu commun
statistique ».
« En tant que société, nous
devrions chercher à réduire et à ne pas maintenir les règles de droit qui nous
séparent de la majorité des États membres de l’Europe. En dehors de l’Europe,
d’ailleurs nous risquons l’isolement dans le monde de Common Law, si
nous ne reconnaissons pas comme valables les contrats prénuptiaux ».
« Ce contrat a été conclu volontairement
et sciemment par des adultes responsables. Le mari avait une bonne
compréhension des conséquences de son accord. Il faut en déduire que, sans cet
accord, le mariage n’aurait eu lieu, et que le père de l’épouse ne lui aurait
pas fourni les ressources supplémentaires qui ont suivi son mariage. Les
parties ont conclu leur accord avec l’aide et les conseils d’un juriste
allemand, en vertu du droit allemand, en concluant un accord qui était reconnu
par la Civil Law sous lequel les deux parties et leurs familles avaient
grandi en Allemagne et en France ».
La décision de la Cour d’appel a été
confirmée par la Cour Suprême du Royaume-Uni en 2010 [11].
Voici quelques parties de la motivation
de ce jugement :
« Nous ferions valoir la
proposition suivante, à appliquer dans le cas des contrats prénuptiaux, ainsi
que postnuptiaux, plutôt que celle retenue auparavant dans l’affaire
MacLeod : ‘Le tribunal devrait donner effet à un contrat de mariage
librement conclu, chaque partie ayant pleinement conscience de ses
implications, à moins que, dans les circonstances du cas concret, il ne serait
pas équitable de tenir les parties à leur accord’ ».
« 91. Le 1er août 1998, les parties se sont
rendues au bureau du Dr Magis [Notaire], près de Düsseldorf. Leur rencontre
avec lui a duré entre deux et trois heures. Le mari a dit au Dr Magis qu’il
avait vu le projet d’accord mais qu’il n’en avait pas la traduction. Le Dr
Magis était en colère lorsqu’il a su de l’absence d’une traduction, qu’il
considérait comme importante pour s’assurer que le mari avait eu l’occasion
d’en examiner les termes. Le Dr Magis a indiqué qu’il était disposé à différer
la signature, mais, quand on lui a dit qu’il était improbable que les parties
soient de nouveau en Allemagne avant le mariage, il a été persuadé de
continuer. Le Dr Magis, parlant anglais, a ensuite expliqué en détail aux
parties les termes de l’accord et les a clairement expliqués ; mais il n’a pas
offert une traduction verbatim de chaque ligne. Les parties ont signé
l’accord (daté du 4 août 1998) en sa présence ».
« L’accord indiquait (au considérant nr. 2) que
(a) le mari était un ressortissant français et, selon sa propre déclaration, ne
maîtrisait pas bien l’allemand, mais qu’il maîtrisait suffisamment l’anglais,
selon sa propre déclaration et selon l’avis du notaire (Dr Magis) ; b) le
document a donc été lu par le notaire en allemand et ensuite traduit par lui en
anglais; c) les parties à l’accord ont déclaré vouloir renoncer à l’usage d’un
interprète ou d’un second notaire, ainsi qu’à une traduction écrite ; d) un
projet de texte de l’accord avait été soumis aux parties deux semaines avant la
signature du document ».
« L’article 1 énonçait l’intention des parties de
se marier à Londres et d’y établir leur première résidence matrimoniale. Aux
termes de l’article 2, les parties ont convenu que les effets de leur mariage
en général, de même que ceux des biens matrimoniaux et du droit des successions
seraient régis par le droit allemand. L’article 3 prévoyait le régime de la
séparation de biens, et les parties ont déclaré : ‘Malgré l’avis du
notaire, nous renonçons à la possibilité d’annexer un tableau de nos actifs
actuels respectifs à cet acte’ ».
« L’article 5 prévoyait la renonciation mutuelle
aux demandes de pension alimentaire de quelque nature que ce soit après un éventuel
divorce: ‘La renonciation s’applique dans toute la mesure permise par la loi,
même si l’un d’entre nous - qu’il s’agisse ou non de raisons imputables à une
faute de sa part - se trouvera dans une situation de grave difficulté’. Le
notaire nous a donné des conseils détaillés sur le droit à la pension
alimentaire entre conjoints divorcés et sur les conséquences de la renonciation
réciproque convenue ci-dessus. Chacun de nous est conscient qu’il peut y avoir
des conséquences négatives importantes à la suite de la renonciation
ci-dessus ».
La Cour Suprême a rejeté en outre
l’argument du juge de première instance, selon lequel les parties n’avaient pas
reçu un independent legal advice (information légale indépendante), en
faisant remarquer que le notaire avait fourni suffisamment d’informations sur
les conséquences de cet accord.
Après ce cas de référence, la Law
Commission (Commission des lois : un organisme statutaire indépendant
qui donne des avis sur les réformes législatives) [12], a recommandé que les contrats
prénuptiaux deviennent juridiquement contraignants sous réserve du respect de
certaines règles. Une exigence devrait être qu’au moment de la signature, les
deux parties se donnent des informations complètes sur leur situation
financière et reçoivent une information complète sur les conséquences de leur
accord. Une autre condition, selon les propositions de la commission, est que
les accords ne seraient valables « qu’après que les besoins financiers du
partenaire et les responsabilités financières envers les enfants aient été
satisfaits ». Introduire des accords prénuptiaux sans avoir égard aux
nécessités des parties « serait très nuisible », prévient la Commission.
La Commission a également demandé au Family
Justice Council (Conseil de justice de la famille), dont les membres
comprennent des juges et des avocats, de rédiger des « directives sur le thème
des nécessités financiers » pour permettre aux couples de conclure un accord
reconnaissant leurs responsabilités financières l’un envers l’autre. Le
gouvernement, a déclaré la Commission, devrait également financer une
« étude à long terme pour évaluer si une formule pratique et
non-statutaire pourrait être produite qui donnerait aux couples une idée plus
claire des montants qui pourraient devoir être payés pour satisfaire les
besoins ».
Les propositions de la Commission des
lois seront envoyées au ministère de la Justice, qui examinera s’il souhaite
élaborer une législation sur la base des suggestions, mais il faut ajouter que
les gouvernements précédents ont montré une certaine réticence à réviser les
lois sur le mariage.
La doctrine juridique a accueilli
favorablement ces recommandations, soulignant que les accords prénuptiaux
donneraient aux couples plus d’autonomie et de contrôle de leur situation, et
rendraient le résultat patrimonial de la séparation plus prévisible. On a
remarqué en outre que ces recommandations représentent une avancée bienvenue
vers plus d’autonomie et de certitude pour les couples. Cependant, il a été
remarqué qu’il ne sera pas possible d’éviter de répondre aux nécessités
financières des partenaires et des enfants et, comme toujours, la question est
de savoir ce qui relève de la définition de « nécessité ». En tout
cas, les universitaires et les praticiens s’accordent sur l’effet positif de
limiter le pouvoir discrétionnaire des juges et d’accorder aux couples une plus
grande certitude et un contrôle financier préalablement convenu, si leur
relation se désintègre.
Entre-temps, les cours britanniques
semblent suivre le précédent de Radmacher v Granatino, comme le montre,
par exemple, un arrêt de 2014 [13], dans lequel le mari (néerlandais) a
soutenu que les parties étaient liées par un accord prénuptial de droit
néerlandais, tandis que l’épouse (britannique) demandait une pension compensatoire
du fait qu’elle avait renoncé, pour se marier, à une carrière prestigieuse. La
Cour a confirmé l’accord (signé aux Pays-Bas par les deux parties devant un
notaire néerlandais) qui contenait des dispositions sur les biens des
conjoints, à l’exclusion du régime légal hollandais de la communauté immédiate
(copropriété) de tous les biens matrimoniaux. Le contrat n’avait pas de
dispositions sur la pension alimentaire, contrairement à l’accord allemand dans
le cas Granatino. En tout cas, la ratio decidendi de cet arrêt
est clairement la même que celle de ce précédent, car le « noyau » de cette
nouvelle décision contient la phrase suivante: « Le tribunal devrait donner
effet à un contrat de mariage librement conclu par des parties qui se rendent
pleinement compte de ses implications, à moins que, dans les circonstances du
cas concret, il ne serait pas juste de tenir les parties à leur accord ».
4. Contrats prénuptiaux en prévision du
divorce dans l’Europe continentale : Catalogne et Allemagne.
Nous avons vu que, dans la motivation du
jugement de la Cour d’appel dans l’affaire Radmacher v Granatino, il est
dit expressément que si un tel contrat prénuptial avait été présenté par-devant
un tribunal en France ou en Allemagne, il aurait été considéré comme valable.
Cette remarque est certainement vraie si l’on considère les contrats de mariage
que nous utilisons en Europe continentale pour effectuer le choix du régime
matrimonial, et en particulier le choix de la séparation de biens.
La réponse est différente si l’on se
réfère à la prédétermination de la pension alimentaire en cas de divorce ou de
séparation de corps. Cette possibilité est exclue actuellement dans des pays
tels que la France ou l’Italie (du moins, par la jurisprudence prépondérante),
alors que de plus en plus de pays d’Europe continentale autorisent de telles
dispositions.
On pourrait citer ici le cas du Code de
la famille de la Catalogne (Codi de familia), dont l’article 15 prévoyait
en 1998 la possibilité pour les époux de se mettre d’accord sur les questions
patrimoniales « àdhuc en previsió d’una ruptura matrimonial » (aussi en
prévision d’une rupture du mariage) [14]. Cette disposition a été remplacée en
2010 [15] par l’article 231-20 du Codi Civil
de Catalunya [16], qui dicte désormais des règles très
intéressantes sur la manière dont de tels accords doivent être conclus et
appliqués. Ici, il est important de remarquer que les mêmes règles sont à la
disposition des concubins, selon l’article 234-5 du même code [17].
Quant à l’Allemagne [18], il faut tenir compte du fait que
l’autonomie contractuelle des parties a toujours joué un rôle clé dans ce Pays,
ce qui reflète d’ailleurs la pensée des plus grands philosophes allemands. Je
pourrais citer par exemple Hegel [19], qui disait que les contrats de mariage
(Ehepakten) étaient destinés à réglementer les relations entre conjoints
« en cas de séparation du mariage pour cause de décès, de divorce ou
d’événements similaires » (gegen den Fall der Trennung der Ehe durch
natürlichen Tod, Scheidung u. dergl.).
Lorsque nous considérons le système
juridique allemand, nous devons toujours garder à l’esprit deux facteurs
principaux.
(a) Depuis le début du XVIème
siècle, l’Allemagne a connu l’avènement de la doctrine protestante, qui nie que
le mariage puisse être considéré comme un sacrement : il a été donc beaucoup
plus facile pour les juristes allemands des XVIème, XVIIème
et XVIIIème siècles (comme Thomasius, Struvius, Leyser, Lauterbach,
Boehmer, etc.) d’élaborer une nouvelle doctrine du mariage. Selon ce nouveau
point de vue, le mariage peut être vu comme un contrat qui, comme tout autre
contrat, peut être dissous par consentement mutuel, avec n’importe quel type
d’accord sur une telle dissolution.
(b) En outre, nous ne devons pas oublier
que dans de nombreuses régions d’Allemagne, le droit romain a été appliqué
jusqu’au 31 décembre 1899 ; dans le système juridique romain, comme je l’ai
déjà signalé, il était admis que les époux pouvaient prévoir les conséquences
patrimoniales d’un éventuel divorce depuis le moment même où ils se mariaient.
Par conséquent, la jurisprudence et la
doctrine juridique allemande ont toujours déclaré que de tels accords devaient
être considérés comme valables, même s’ils prévoyaient une renonciation
complète aux droits des conjoints en cas de divorce.
Par exemple, selon une décision de la
Cour Suprême d’Allemagne (BGH) de 1995 « pour les accords de
caractère patrimonial, que les conjoints stipulent prudemment pendant le mariage
ou même avant celui-ci en prévision d’un possible futur divorce, vaut le
principe de la pleine liberté contractuelle (§ 1408 alinéa 1 et alinéa 2 du
code civil allemand BGB). Aucun contrôle spécial sur le contenu de ces
accords ne doit avoir lieu, si la réglementation est appropriée.
L’applicabilité de l’accord ne dépend pas de conditions supplémentaires, comme
par ex. du fait que, pour l’exclusion de la pension alimentaire, une quelque
forme de compensation soit prévue » [20].
Aucun effet sur la validité et la force
exécutoire de l’accord n’est également joué par le fait que « dans un tel cas,
le choix du divorce pourrait s’avérer beaucoup plus difficile pour un conjoint
que pour l’autre pour des raisons économiques » [21].
Selon cette jurisprudence, les notaires
allemands ont développé différents modèles de contrats de mariage, que j’ai
décrit dans mon livre sur les « Contrats de la crise conjugale » [22]. Ils peuvent contenir des clauses dans
lesquelles une partie (ou les deux) renonce à tout droit à une pension
alimentaire, comme : « le mari [ou la femme, ou les deux] renonce à toute
prétention concernant la pension alimentaire en cas de divorce, même en
situation de besoin » [23]. Parmi les nombreuses autres
possibilités, nous pouvons trouver des accords dans lesquels la pension
alimentaire n’est pas exclue, mais elle est prédéterminée de manière précise [24], par exemple en fixant une limite (pas
plus de € ... pour chaque mois), ou en fixant le montant de la pension
alimentaire comme rapport du revenu de la partie la plus « riche » (par exemple
: 20% du revenu net de la partie qui aura le revenu le plus élevé), ou en
fixant un date limite (sunset provision) pour ces pensions (par exemple
: pas plus de 5 ans après la dissolution du mariage). Les contrats de mariage
allemands (Eheverträge) peuvent également contenir des dispositions en
cas de décès de l’un des époux [25].
Certaines modifications ont été
apportées par un arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale (Bundesverfassungsgericht)
en 2001 [26], suivie d’une décision de la Cour
fédérale de justice (Bundesgerichtshof) rendue en 2004 [27]. Ces deux jugements ont statué que les
accords prénuptiaux par acte notarié qui désavantagent sérieusement l’un des
deux époux par rapport à l’autre pourraient être considérés comme non valables.
Les juges ont déclaré que si, en principe, un contrat peut stipuler que l’un
des époux renonce à son droit de recevoir une pension alimentaire, si l’accord
est préjudiciable pour une partie, il serait moralement inacceptable et
pourrait donc être attaqué en justice. La Cour a également statué que le
conjoint est libre de contester le contrat dans les cas de déséquilibre – si le
revenu de son partenaire a augmenté de façon importante pendant le mariage –
parce que, par exemple, l’autre époux (épouse) était à la maison pour s’occuper
des enfants.
De nombreux juristes ont critiqué ce
point de vue, selon lequel la liberté traditionnelle des parties d’un contrat
est « chaperonnée » par les opinions personnelles de tel ou tel autre juge. De
plus, les pouvoirs des juges dans les systèmes de Civil Law n’autorisent
pas ce type d’intervention, qui est plutôt caractéristique d’un jugement en
« équité ». En effet, dans les systèmes continentaux, toute considération
de caractère équitable est exclue, si les parties ne violent pas les règles du
Code civil sur la validité et sur l’exécution des contrats, librement et
sciemment conclus ; par conséquent, les partie n’ont pas le pouvoir de se
débarrasser de leurs engagements contractuels, simplement parce que l’une
d’elles a changé d’avis.
En France aussi, comme dans tout autre
Pays d’Europe continentale, les époux ont la possibilité de signer un contrat de
mariage avant ou pendant le mariage. Un contrat de mariage français traite
(comme en Italie, en Espagne, en Allemagne etc.) des conséquences possibles du
mariage sur les biens des époux acquis avant ou pendant le mariage. C’est la
raison pour laquelle en droit français, comme en Italie, en Espagne ou au
Portugal, nous utilisons l’expression « régime matrimonial », le mot « régime »
signifiant « règle » dans les langues d’origine latine (en latin regimen
signifie « gouvernance », « gestion » ou « administration »). Un régime
matrimonial est donc un ensemble de règles sur l’effet du mariage en matière
d’administration, de jouissance et de pouvoir de disposition sur les biens des
conjoints.
En droit français (comme en droit
italien, espagnol, portugais, etc.), la portée d’un contrat de mariage est de
déterminer le régime matrimonial choisi par les époux, sans référence à la
pension alimentaire en cas de séparation de corps ou de divorce. Ainsi, les
contrats de mariage sont chez nous juridiquement valables et contraignants,
mais concernent le partage des biens et plus en général, le sort des
acquisitions faites par les époux, alors qu’en Angleterre (comme d’ailleurs
dans tous les pays de Common Law), ils sont essentiellement liés au
thème du divorce et tendent à éviter la equitable distribution qui
serait faite par le juge en cas de désaccord.
Selon de nombreux chercheurs, en droit
français, on ne peut pas exclure le droit à la pension alimentaire à l’occasion
d’un divorce, contrairement au droit allemand, où on peut y déroger (comme dans
l’affaire Radmacher v Granatino). En effet, la réforme relative au
divorce de
La profession notariale milite, par
contre, pour la transposition des prenuptial agreeements en droit
français, afin d’anticiper la fixation de la prestation compensatoire qu’elle
estime à juste titre imprévisible et source d’insécurité juridique. Les
notaires préconisent donc le recours systématique à l’acte notarié, ce qui
permettrait de s’assurer de la réalité du consentement de l’époux. En fait, la
tendance actuelle porte sur une plus grande autonomie des volontés. Si,
actuellement, le droit français prohibe de telles conventions, il pourrait être
amené à évoluer, puisque la conclusion d’un contrat prénuptial présente plusieurs
avantages. Il permet en effet de prévoir une grande flexibilité pour les époux,
de prévoir les sommes pouvant être allouées au titre des obligations
alimentaires entre époux en cas de séparation et les conséquences d’un divorce
avant qu’il ne se produise et de réduire en conséquence le contentieux du
divorce devant le juge, afin d’éviter de devoir négocier les conséquences
financières d’une telle procédure dans un climat de tension, devant le juge [28].
Il faut d’ailleurs souligner qu’à
la différence de ce qui se passe en Italie lors de la rédaction d’un contrat de
mariage, les notaires français ont le pouvoir de « personnaliser » le régime
matrimonial choisi par les époux en le façonnant sur mesure, compte tenu des
besoins, des souhaits et des attentes de leurs clients. Ainsi, juste pour faire
quelques exemples, les tribunaux français estiment que la « clause alsacienne »
– mentionnée précédemment – est parfaitement valable et contraignante ; les
parties peuvent en outre prévoir un régime de communauté dans lequel les parts
des époux ne sont pas égales (stipulation de parts inégales), ou dans lequel
les droits de l’une des parties peuvent être satisfaits avec le paiement d’une
somme forfaitaire (forfait de communauté), ou avec la cession de biens meubles
ou de biens immobiliers ou avec le droit de prélever avant tout partage, sur la
masse commune, lors de la dissolution de la communauté, un bien déterminé ou
une somme d’argent (préciput) : le résultat est donc celui d’un véritable
aménagement contractuel du régime légal, tout à fait inconnu en Italie [29].
Par ailleurs, certaines décisions
rendues dans des affaires concernant des couples internationaux prouvent que
les juges français ne sont pas opposés aux accords prénuptiaux étrangers, comme
le montre, par exemple, un arrêt de 2010 du Tribunal de Grande Instance de
Grasse [30]. En l’espèce, le juge confirma un
contrat prénuptial anglais, dans lequel les parties étaient convenues qu’en cas
de rupture du mariage, chaque conjoint conserverait ses biens, la femme
recevrait 50 000 livres sterling (indexées) pour chaque année de mariage
(jusqu’au dépôt de la demande de divorce) et ce montant devrait couvrir et
exclure toute prétention financière.
6. Les contrats prénuptiaux en prévision
du divorce en Italie.
En Italie [31], les contrats de mariage peuvent être
conclus avant ou pendant le mariage par acte notarié (cf. art. 162 du Code
civil italien).
Cependant, comme on l’a déjà expliqué,
de tels actes sont principalement conçus comme des instruments pour choisir un «
régime matrimonial » autre que celui prévu par la loi par défaut, qui est la comunione
legale (communauté d’acquêts). Cependant, le système optionnel de la separazione
dei beni (séparation de biens) peut être choisi au moment même de la
célébration du mariage avec une déclaration des conjoints au maire ou au curé
célébrant le mariage. Par acte notarié les époux peuvent également choisir un fondo
patrimoniale (un ou plusieurs biens de familles insaisissables, qui peuvent
être des biens immobiliers ou des instruments négociables, tels que des titres,
des obligations, des actions de société, etc., dont les revenus doivent être
affectés aux besoins de la famille).
Malgré tout cela, la liberté de
mouvement des parties dans la définition du régime de la communauté des acquêts
par défaut est très, très étroite, car aucune modification ne peut être
apportée au pouvoir de gérer et d’administrer l’actif de la communauté et les
parties ne peuvent pas déroger à la règle selon laquelle le partage de la
communauté doit être fait en parts égales, ce qui empêche tout type de clause,
tels que le préciput, ou le partage inégal, ou le forfait de communauté. En
tant qu’alternative aux régimes de communauté et de séparation de biens, les
époux peuvent choisir un système de communauté générale, étendu à (presque)
tous les biens qui leur appartiennent et acquis soit avant, soit après la
célébration du mariage (comunione convenzionale).
Or, comme nous l’avons déjà expliqué, le
Code civil italien ne mentionne pas la question de la pension alimentaire entre
époux parmi les thèmes pouvant faire l’objet d’un contrat de mariage. En outre,
la Cour suprême de cassation a toujours considéré comme contraire à l’ordre
public tout accord stipulé en prévision d’un divorce futur, qu’il soit conclu
au moment de la séparation de corps, ou même avant la séparation ou le mariage.
Afin de mieux comprendre la position de
la Cour, il faut garder à l’esprit que l’Italie est l’un des derniers pays au
monde à autoriser le divorce uniquement pour les couples qui ont déjà fait
l’objet d’une procédure judiciaire de séparation légale de corps. Jusqu’en
2015, trois ans devaient s’écouler après le début de la procédure judiciaire de
séparation légale de corps, avant d’entamer la procédure de divorce. En 2015, une
réforme a réduit ce délai à un an (en cas de séparation judiciaire
contentieuse), ou à six mois (en cas de séparation légale consensuelle); une
séparation formelle est donc toujours requise comme condition préalable
nécessaire au divorce.
Cela dit, il est facile de comprendre
que très souvent, les couples qui ont conclu un accord au cours du procès de
séparation légale de corps souhaitent éviter tout différend éventuel au cours
du procès (futur, mais désormais certain !) en divorce. Or, la plupart des
accords de ce type ont été déclarés invalides par la Cour suprême de cassation,
au moins dans la partie dans laquelle ils énoncent des dispositions applicables
en cas de divorce (par exemple : l’épouse reçoit, lors de la séparation de
corps, une somme d’argent ou le transfert d’un bien immobilier, mais elle
s’engage à ne pas réclamer des pensions alimentaires ou des sommes forfaitaires
pendant le futur procès de divorce). La raison de cette défaveur est que de
telles dispositions, selon les juges, pourraient nuire à la liberté des deux
parties de décider si elles doivent divorcer ou non. Selon cette jurisprudence
la crainte d’éventuelles conséquences pécuniaires exercerait une influence
néfaste sur la liberté « personnelle » dans le choix de divorcer (ou de ne pas
divorcer), ce qui rendrait l’accord contraire à l’ordre public et donc
invalide. Autrement dit, selon ce point de vue, par le biais de cet accord les
parties envisagent un contrat dont l’objet est leur statut même de personnes
mariées, alors que le statut juridique personnel n’est pas négociable (certains
érudits citent ici l’exemple biblique d’Ésaü, qui troqua son droit d’ainesse
avec son frère Jacob pour un plat de lentilles !).
J’ai dépensé beaucoup d’énergie et de
temps dans mes articles et mes livres pour essayer de prouver que cette idée
est fondamentalement fausse, car elle est fondée sur une confusion entre:
(a) ce qui est, d’un côté, un accord
dans lequel une partie s’engagerait théoriquement à ne pas divorcer (ou à ne
pas demander la séparation de corps), ou bien à divorcer (ou à demander la
séparation de corps), ce qui serait sûrement contraire à l’ordre public, et
(b) ce qui est, de l’autre côté, un
accord dans lequel les parties ne prévoient que les conséquences patrimoniales
d’une éventuelle décision de divorcer.
De plus, le système juridique italien
contient des exemples d’accords préventifs sur les conséquences patrimoniales
d’un changement de statut personnel. En effet, en Italie (comme partout dans le
monde), les contrats de mariage – lesquels, selon le Code civil, peuvent être
conclus avant le mariage – traitent des conséquences patrimoniales du nouveau
statut personnel des personnes mariées (répartition des biens acquis avant ou
après le mariage, opérant un choix parmi la communauté des acquêts, la
communauté générale de tous les biens, la séparation de biens, etc.). On se
demande alors pourquoi un accord sur les conséquences futures d’un autre
changement de statut personnel (c’est-à-dire celui entrainé par le divorce)
devrait être considéré comme illégal.
Un don entre futurs conjoints peut bien
être rendu dépendant du mariage éventuel (cf. art. 785 du Code civil
italien) : cela veut dire qu’un événement consistant dans la modification
d’un statut personnel (à savoir de la personne qui passe du statut personnel de
célibataire au statut de personne mariée) peut influencer les conséquences d’un
contrat tel que la donation. Pourquoi ne pas appliquer la même règle à la
situation, tout à fait identique à celle-ci, dans laquelle nous avons une autre
modification d’un statut personnel (de marié à divorcé) ?
J’ai plusieurs fois remarqué que la
jurisprudence de la Cour suprême italienne, que l’on vient de mentionner, est «
dangereuse sur le plan éducatif », car elle engendre la fausse idée que parmi
les conjoints pacta non sunt servanda (les accords peuvent ne pas être
respectés). En effet, il arrive très souvent qu’un conjoint « feigne » d’être
d’accord avec l’autre dans le cadre de la procédure en séparation de corps,
avec la réserve mentale de rouvrir la discussion (et de formuler de nouvelles
demandes) par la suite, lors de la procédure en divorce.
Cela dit, je voudrais conclure cette
présentation avec quelques notes plus optimistes.
Tout d’abord, nous devons considérer
que, depuis 1987, les époux peuvent divorcer sur la base d’un accord mutuel, qui doit également comprendre un accord sur les aspects
pécuniaires et la pension alimentaire : ce qui indique clairement que ce thème n’est pas « intouchable » par l’accord des parties.
Deuxièmement, en 2014, deux nouveaux types de divorce (et de séparation de
corps) ont été introduits, qui « sautent » complètement toute forme d’intervention
devant un tribunal. En cas d’accord,
les parties peuvent obtenir leur divorce par consentement mutuel en signant
simplement un document devant deux avocats, dans le cadre d’une procédure de « collaboration » (negoziazione assistita) ou, en
alternative, devant l’officier
d’état civil de la mairie : aucun jugement, ordre ou décret d’un tribunal n’est plus
nécessaire. En effet, dans le cas des négociations, l’accord entre conjoints doit être conclu avec la participation de l’avocat et chacun des conjoints doit être représenté par au moins un avocat.
L’accord est ensuite envoyé au
Procureur de la République, et s’il donne une opinion positive, l’entente doit être envoyée au
bureau de l’état civil compétent.
En fait, ces derniers temps, de nombreux
chercheurs ont déclaré souscrire à mon point de vue, estimant que les accords
prénuptiaux en vue d’une séparation et / ou d’un divorce sont valables, alors
que certaines décisions judiciaires commencent à renverser la jurisprudence
traditionnelle.
Par exemple, en 2012, une décision de
mon tribunal (la première de ce type en Italie) [32] a déclaré que les accords conclus par
les couples mariés au moment de leur séparation de corps sont valables, en ce
qui concerne leurs dispositions en vue du divorce à venir. Par conséquent, le
président du Tribunal de Grande Instance de Turin a refusé d’allouer une
pension alimentaire lite pendente à une femme qui avait réclamé cet
argent à son mari au moment du début d’un litige de divorce, alors qu’elle
avait renoncé à de telles prétentions (mentionnant explicitement le cas du
futur divorce) dans l’accord qu’elle avait conclu avec son mari lors du procès
en séparation légale de corps trois ans auparavant.
Mais il faut dire qu’un vent nouveau
souffle aussi à la Cour suprême.
Parmi les nombreux cas, je voudrais
faire référence ici à une décision dans laquelle, il y a déjà trente ans, la
Cour a décidé qu’un accord « postnuptial » d’un couple américain,
bien que contraire à l’ordre public interne italien, n’était pas contre l’ordre
public international italien ; il était donc valable et exécutoire en
Italie [33].
Plusieurs années plus tard, en 2012, la
Cour suprême de cassation italienne a jugé que la jurisprudence «
traditionnelle » ne s’appliquait pas à une situation dans laquelle un couple
italien avait stipulé par écrit un accord, juste un jour avant le mariage,
selon lequel en cas de divorce (ou de séparation de corps), l’épouse
transmettrait à son mari la propriété d’un de ses appartements, à titre de
compensation pour les dépenses qu’il avait faites afin de restaurer un autre
appartement de ladite femme [34].
En 2013, la même Cour a décidé que deux
fiancés peuvent convenir que la somme d’argent que l’un d’eux a prêtée à
l’autre ne pourra être réclamée que si son futur mariage se termine par une
séparation de corps ou par un divorce [35].
Dans ces deux affaires, la Cour a
soutenu que ces décisions ne renverseraient pas le point de vue « traditionnel
», car les « ententes prénuptiales en prévision d’un divorce » contraires à
l’ordre public ne seraient que celles concernant la pension alimentaire. Bien
sûr, ce raisonnement est erroné, car ce qui se rapporte à l’essence des
contrats prénuptiaux en vue du divorce est le fait de s’entendre sur les
conséquences pécuniaires du divorce, peu importe la nature et la portée de ces
effets : transfert de biens immobiliers ou toute autre sorte de biens,
restitution au conjoint prêteur d’une somme d’argent empruntée, remboursement
de dépenses, paiement de la pension alimentaire, ou bien d’une somme d’argent
forfaitaire, etc.
En 2015, la même Cour a statué sur une
affaire concernant un accord conclu par les parties au moment de leur
séparation et l’a jugé valable, même si l’entente avait été stipulée « à côté »
(a latere, selon l’expression latine qu’on emploie en Italie dans ce
cas) et donc elle n’avait pas été transposée dans l’accord soumis à la cour.
Rien de nouveau sous le soleil, puisque, d’ailleurs, ce principe a toujours été
affirmé par la Cour de cassation. Cet affaire ne faisait aucune référence à un
futur divorce. Cependant – dans la motivation
de leur jugement – les juges suprêmes ont ajouté (d’ailleurs, dans ce cas, pas
avec la force d’une vraie ratio decidendi) que les accords conclus avant
le divorce et en vue de celui-ci ne sont pas contre l’ordre public [36].
Tout au contraire, en 2017 deux
décisions de la même première chambre civile de la Cour ont réaffirmé le point
de vue « traditionnel », selon lequel la pension alimentaire en cas de divorce
formerait l’objet d’un droit non disponible par les conjoints et donc tout type
d’accord concernant ce droit, conclu avant le moment du divorce, serait nul,
car contraire à l’ordre public [37].
[1] Sur ce thème cf. Oberto,
I contratti della crisi coniugale, I, Milano, 1999, 387 et s., 483 et s.
; Id., «Prenuptial agreements
in contemplation of divorce» e disponibilità in via preventiva dei diritti
connessi alla crisi coniugale, Rivista di diritto civile, 1999, II,
171 et s. ; Id., Sulla natura
disponibile degli assegni di separazione e divorzio: tra autonomia privata e
intervento giudiziale, Famiglia e diritto, 2003, 389 et s., 495 et
s. ; Id., Contratto e famiglia,
in Trattato del contratto, a cura di Vincenzo Roppo, VI, Interferenze,
a cura di Vincenzo Roppo, Milano, 2006, 242 et s., 253 et s. ; Id., Gli accordi preventivi sulla
crisi coniugale, Familia, 2008, 25 et s. ; Id., Per un intervento normativo in
tema di accordi preventivi sulla crisi della famiglia, in Accordi in vista della crisi dei rapporti
familiari, a cura di Sara Landini e Massimo Palazzo, Biblioteca della
Fondazione Italiana del Notariato, n. 1-2018, Milano, 2018, 33 et s. ;
disponibile aussi à la page web suivante :
https://www.giacomooberto.com/Oberto_Per%20un%20intervento%20normativo%20in%20tema%20di%20accordi%20preventivi%20sulla%20crisi%20della%20famiglia.htm.
Cf. aussi Comporti, Autonomia privata e convenzioni preventive di separazione, di divorzio e di annullamento del matrimonio, Foro italiano, 1995, I, 105 et s., 113 et s. ; G. Gabrielli, Indisponibilità preventiva degli effetti patrimoniali del divorzio: in difesa dell’orientamento adottato dalla giurisprudenza, Rivista del diritto civile, 1996, I, 699 et s. ; Giaimo, I contratti paramatrimoniali in Common Law, Palermo, 1997, 31 et s. ; Balestra, Gli accordi in vista del divorzio: la Cassazione conferma il proprio orientamento, Corriere giuridico, 2000, 1023 et s. ; Angeloni, La cassazione attenua il proprio orientamento negativo nei confronti degli accordi preventivi di divorzio: distinguishing o perspective overruling?, Contratto e impresa, 2000, 1136 et s. ; Bargelli, L’autonomia privata nella famiglia legittima: il caso degli accordi in occasione o in vista del divorzio, Rivista critica di diritto privato, 2001, 303 et s. ; Di Gregorio, Divorzio e accordi patrimoniali tra coniugi, Notariato, 2001, 17 et s. ; Dellacasa, Accordi in previsione del divorzio, liceità e integrazione, Contratti, 2001, 46 et s. ; Ferrando, Crisi coniugale e accordi intesi a definire gli aspetti economici, Familia, 2001, 245 et s. ; Pazzaglia, Riflessioni sugli accordi economici preventivi di divorzio, Vita notarile, 2001, 1017 et s. ; Palmeri, Il contenuto atipico dei negozi familiari, Milano, 2001, 116 et s. ; Al Mureden, Le rinunce nell’interesse della famiglia e la tutela del coniuge debole tra legge e autonomia privata, Familia, 2002, 1014 et s. ; Id., I prenuptial agreements negli Stati Uniti e nella prospettiva del diritto italiano, Famiglia e diritto, 2005, 543 et s. ; Busacca, Autonomia privata dei coniugi ed accordi in vista del divorzio, Diritto & Formazione, 2002, 57 et s. ; Catanossi, Accordi in vista del divorzio e «ottica di genere». Uno sguardo oltre Cass. n. 8109/2000, Rivista critica di diritto privato, 2002, 169 et s. ; Marella, La contrattualizzazione delle relazioni di coppia. Appunti per una rilettura, Rivista critica di diritto privato, 2003, 95 et s. ; Coppola, Gli accordi in vista della pronunzia di divorzio, in G. Bonilini et F. Tommaseo, Lo scioglimento del matrimonio, Art. 149, Codice Civile. Commentario, a cura di P. Schlesinger, Milano, 2004, 643 et s. ; Ead., Le rinunzie preventive all’assegno post-matrimoniale, Famiglia, persone e successioni, 2005, 54 et s. ; Ruggiero, Gli accordi prematrimoniali, Napoli, 2005 et s. ; Quadri, Autonomia dei coniugi e intervento giudiziale nella disciplina della crisi familiare, Familia, 2005, 6 et s. ; Maietta, Gli accordi prematrimoniali e gli accordi di convivenza. nel diritto italiano e negli altri ordinamenti, http://www.uniese.it/pubblicazioni/gli-accordi-prematrimoniali-e-gli-accordi-di-convivenza-nel-diritto-italiano-e-negli-altri-ordinamenti.html ; M. Romano et Sgroi, Gli accordi preventivi in vista della crisi coniugale. Come disciplinare i rapporti patrimoniali tra le parti, Gli aspetti patrimoniali della famiglia. I rapporti patrimoniali tra coniugi e conviventi nella fase fisiologica ed in quella patologica, a cura di G. Oberto, Padova, 2011, 25 et s. ; Fusaro, Marital contracts, Ehevertraege, convenzioni e accordi prematrimoniali. Linee di una ricerca comparatistica, Nuove leggi civili commentate, 2012, 475 et s.
[2] Cf. Oberto, I contratti della crisi coniugale, I, Milano, 1999, 66 et s.
[3] Cf. D. 50, 16, 240 : « Cum quaerebatur,
an verbum: Soluto matrimonio dotem reddi, non tantum divortium, sed et
mortem contineret, hoc est, an de hoc quoque casu contrahentes sentiant? Et
multi putabant hoc sensisse ; et quibusdam aliis contra videbatur: secundum hoc
motus Imperator pronunciavit, id actum eo pacto, ut nullo casu remaneret dos
apud maritum.” (D. 50, 16, 240) »
(traduction : « Il a été demandé si l’expression ‘dot à restituer en cas
de dissolution du mariage’ devrait comprendre non seulement le divorce, mais
aussi le cas de la mort : à savoir, si les parties à un tel accord auraient
l’intention de considérer aussi cette situation [c’est-à-dire le décès d’un
conjoint et non seulement le divorce]. Beaucoup de juristes pensaient que
c’était le cas, mais d’autres avaient une idée divergente. L’Empereur décida
qu’en aucun cas la dot ne resterait auprès du mari »).
[4] Cf. Bononien. restitutionis dotis, 16 mai
[5] Cf. Giurba, Decisionum novissimarum Consistorii Sacrae Regiae Conscientiae Regni Siciliae, I, Panormi, 1621, 399 et s. : « Sanctorus Pagano matrimonium contraxit cum Cornelia de Pactis, Nullo expresso contrahendi more, Graecorum, vel Messanensium: Sed cum pacto, Item che lo presenti matrimonio si intenda con patto, che casu (quod absit) di separatione di matrimonio, tanto senza figli come nati figli, et quelli morti in minori età, vel maiori ab intestato, che ogni uno stia con le suoi doti, et beni, che ha portato, et non aliter, et detta sposa non possa disponere, nisi tantum di unzi trenta » (traduction : M. Santoro Pagano a épousé Mme Cornelia de Pactis, sans faire aucun choix pour le type de mariage, à savoir si le mariage était ‘à la grecque’ [donc comportant un régime de séparations de biens], ou bien ‘à la façon de Messine’ [comportant un régime de communauté universelle ; n’ayant pas fait ce choix, le mariage en question aurait dû être considéré comme régi par le système local de la communauté universelle de biens], mais avec la clause suivante : qu’en cas (que Dieu nous garde) de séparation de corps, sans enfants, ou, en cas de naissance d’enfants, s’ils seraient décédés en bas âge, ou, si majeurs, s’ils seraient morts sans avoir fait testament, chacun des époux restera avec les biens qu’il/elle aura apporté dans le mariage et rien de plus, et ladite épouse ne recevra que le montant de trente onces [unzo, onza, ou oncia était la monnaie d’or du Royaume de Sicile à l’époque, dont la valeur actuelle serait d’env. € 180,00] »).
[6] Pour d’autres informations sur la clause
alsacienne cf. Oberto, La
comunione legale tra coniugi, in Trattato di diritto civile e
commerciale Cicu-Messineo, I, Milano, 2010, 386, note 171 ; II, Milano, 2010,
1671, note 198 ; Id., Suggerimenti
per un intervento in tema di accordi preventivi sulla crisi coniugale, Famiglia
e diritto, 2014, 90, note 11. Cf. aussi Malaurie et Aynes, Les régimes matrimoniaux,
Paris, 2007, 89, 325 et s. Selon Brun-Wauthier, Régimes matrimoniaux et
régimes patrimoniaux des couples non mariés, Orléans, 2009, 267, « En
période de divortialité galopante, on peut comprendre la préoccupation des
époux de faire en sorte que le bénéfice susceptible d’être tiré du régime
matrimonial soit minimal en cas de divorce et maximal en cas de décès. La
clause de liquidation alternative répond à cette attente (également dénommée
clause alsacienne en raison de son développement par les praticiens alsaciens
en réponse à la fréquence de la communauté universelle dans cette région, pour
des raisons historiques). Elle consiste, dans le cas d’une communauté
universelle, à liquider celle-ci différemment selon la cause de dissolution. En
cas de dissolution par décès, les règles de la communauté universelle s’appliquent.
Au contraire, en cas de dissolution par divorce, la liquidation est réalisée
comme s’il s’agissait d’une communauté réduite aux acquêts, par la possibilité
offerte à chacun des époux de reprendre ses ‘apports’, c’est-à dire les biens
qui auraient été propres en régime légal ou les biens non constitutifs
d’acquêts ». Selon la jurisprudence française « Ne porte pas atteinte au
principe de l’immutabilité des conventions matrimoniales la clause par
laquelle, dans le cadre d’un régime de communauté universelle, chaque époux
reprendrait, en cas de dissolution de la communauté par divorce, les biens
tombés dans la communauté de son chef » : cf. App. Colmar, 16 mai 1990, Rép.
Defrénois, 1990, 1361, note Champenois;
JCP, 1991, éd. N., II, p. 17, note Simler ;
Cass. 1ère civ., 17 novembre 2010, n° 09-
[7] Californie : in Re Marriage of Dawley, 17
Cal. 3d 342, S.F. No. 23418, Cour Suprême de la Californie (29 juin 1976).
Connecticut : Parniawski v Parniawski, 33 Conn. Sup. 44,
[8] Cf. la décision de la Cour Suprême du Maryland in the
1956 case Cohn v Cohn ; pour d’autres informations cf. Oberto, I contratti della crisi
coniugale, Milano, 1999, 494 et s.
[10] Cf.
http://www.bailii.org/ew/cases/EWCA/Civ/2009/649.html (cfr. aussi : http://www.dailymail.co.uk/news/article-1322117/Judges-pre-nuptial-agreements-Britain-Katrin-Radmacher-wins-landmark-case.html) ; http://www.bailii.org/uk/cases/UKSC/2010/42.html.
[13] Cf. SA v PA [2014] EWHC 392 (Fam), http://www.familylawweek.co.uk/site.aspx?i=ed127807.
[14] Article 15 :
« Contingut.
1. En els capítols matrimonials, hom pot determinar el
règim econòmic matrimonial, convenir heretaments, fer donacions i establir les
estipulacions i els pactes lícits que es considerin convenients, àdhuc en
previsió d’una ruptura matrimonial.
2. Els capítols matrimonials
es poden atorgar abans o després del casament. Els atorgats abans només produeixen efectes a partir de la celebració del
matrimoni ».
[15] See Llei 25/2010, del 29 de juliol, del llibre segon del Codi civil de Catalunya, relatiu a la persona i la família.
[16] Article 231-20 :
« Pactes en previsió d’una ruptura matrimonial
1. Els pactes en previsió d’una ruptura matrimonial es
poden atorgar en capítols matrimonials o en una escriptura pública. En cas que
siguin avantnupcials, només són vàlids si s’atorguen abans dels trenta dies
anteriors a la data de celebració del matrimoni.
2. El notari, abans d’autoritzar l’escriptura a què fa
referència l’apartat
3. Els pactes d’exclusió o limitació de drets han de
tenir caràcter recíproc i precisar amb claredat els drets que limiten o als
quals es renuncia.
4. El cònjuge que pretengui fer valer un pacte en
previsió d’una ruptura matrimonial té la càrrega d’acreditar que l’altra part
disposava, en el moment de signar-lo, d’informació suficient sobre el seu
patrimoni, els seus ingressos i les seves expectatives econòmiques, sempre que
aquesta informació fos rellevant amb relació al contingut del pacte.
5. Els pactes en previsió de ruptura que en el moment
en què se’n pretén el compliment siguin greument perjudicials per a un cònjuge
no són eficaços si aquest acredita que han sobrevingut circumstàncies
rellevants que no es van preveure ni es podien raonablement preveure en el
moment en què es van atorgar ».
[17] Article 234-5 :
« Pactes en previsió del cessament de la
convivència
En previsió del cessament de la convivència, els convivents poden pactar en escriptura pública els efectes de l’extinció de la parella estable. A aquests pactes se’ls aplica l’article 231-20 ».
[18] Cf. Oberto,
I contratti della crisi coniugale, I, Milano, 1999, 529 et s. ; Id., «Prenuptial agreements in
contemplation of divorce» e disponibilità in via preventiva dei diritti
connessi alla crisi coniugale, Rivista di diritto civile, 1999, II,
171 et s. ; Id., Gli accordi
preventivi sulla crisi coniugale, Familia, 2008, 25 et s. ; Id., Il futuro europeo del diritto
patrimoniale della famiglia (Conferenza in lingua italiana). Prenuptial Agreements in
Contemplation of Divorce (Presentation in English). Eheverträge anlässlich der
Scheidung nach deutschem Recht (Bericht auf Deutsch), Paragraphes 9-11, http://giacomooberto.com/Bozen2012/traccia.htm#para9.
[19] Cf. Hegel,
Grundlinien der Philosophie des Rechts, Leipzig, 1930, 147.
[20] Cf. BGH 27.9.1995, http://giacomooberto.com/prenuptial/bgh_27_9_1995.htm.
[21] Cf. BGH 19.12.1989, FamRZ
1990, 372 ; cf. aussi BGH 2.10.1996,
[22] Cf. Oberto, I contratti della crisi coniugale, Milano,
1999 (une présentation de l’ouvrage est disponible à l’adresse web suivante : http://giacomooberto.com/crisi/indice.htm).
[23] « III.
Nachehelicher Unterhalt
1.
Der Ehemann verzichtet
gegenüber seiner Ehefrau vollständig auf die Gewährung nachehelichen Unterhalts
(auch für den Fall der Not).
2.
Für den Unterhaltsanspruch der
Ehefrau verbleibt es bei der gesetzlichen Regelung, jedoch mit folgenden
Maßgaben:
a) Der Anspruch auf Unterhalt
wird auf höchstens ... DM monatlich begrenzt. Die Ehefrau verzichtet auf einen
etwa weitergehenden Unterhaltsanspruch.
b) Die Ehefrau ist verpflichtet,
die zu einem Steuervorteil für ihren Ehemann erforderlichen Erklärungen
abzugeben, wenn ihr die hieraus entstehenden Nachteile ersetzt werden. Der
obige Höchstbetrag ist also immer als Nettobetrag zu verstehen.
c) Der Höchstbetrag ist nach
den heutigen Lebenshaltungskosten festgelegt. Wir vereinbaren deshalb, daß der
Höchstbetrag noch oben oder nach unten im gleichen prozentualen Verhältnis
verändert, wie sich der von statistischen Bundesamt festgestellte Preisindex
für die Lebenshaltung aller privaten Haushalte nach oben oder unten verändert.
Die erste Anpassung erfolgt nach Rechtskraft der Ehescheidung durch Vergleich
des für den Monat des Vertragsschlusses festgestellten Preisindex mit dem dann
festgestellten Preisindex. Jede weitere Anpassung erfolgt dann jeweils für den
Januar eines Jahres.
d) Durch die Vereinbarung
einer Höchstgrenze bleiben die gesetzlichen Vorschriften über den nachehelichen
Unterhalt im übrigen unberührt » (modèle de Ehevertrag rédigé par
le notaire Dr. Reimann : cf. Oberto,
I contratti della crisi coniugale, Milano, 1999, 540).
[24] « III.
Nachehelicher Unterhalt
1.
Für den Fall der Scheidung der
von uns beabsichtigten Ehe vereinbaren wir in Bezug auf den nachehelichen
Unterhalt:
a) Der Unterhaltsanspruch wird
insgesamt ausgeschlossen, wenn die Ehe nicht länger als fünf Jahre Bestand
hatte.
b) Dieser Ausschluß gilt
jedoch nicht, wenn und soweit der Unterhaltstatbestand des § 1570 BGB (Pflege
oder Erziehung eines gemeinschaftlichen Kindes) vorliegt.
c) Im übrigen verbleibt es bei
den gesetzlichen Bestimmungen.
2.
Der Unterhaltsanspruch wird,
sofern er gemäß den vorstehenden Vereinbarungen besteht, der Höhe nach wie
folgt begrenzt:
a) Für den Eheteil, der ein
gemeinschaftliches Kind betreut, beträgt der Unterhaltsanspruch höchstens pro
Monat DM 1.800,--.
b) In allen anderen Fällen, in
denen ein Unterhaltsanspruch kraft Gesetzes nach Maßgabe der vorstehend
vorgenommenen Beschränkungen besteht, beträgt der Unterhaltsanspruch die Hälfte
des vorgenannten Betrages.
c) Tritt eine Änderung in der
Höhe des Lebensbedarfs infolge der allgemeinen wirtschaftlichen Verhältnisse
ein, so ist der genannte Betrag entsprechend zu ändern. Er soll sich dabei im
gleichen Prozentverhältnis erhöhen oder vermindern, in dem sich der vom
Statistischen Bundesamt festgestellte durchschnittliche jährliche Preisindex
für die Gesamtlebenshaltung aller privaten Haushalte – berechnet auf der Basis
1980 = 100 – im Vergleich zu demselben Index für den Monat des Vertragsabschlusses
erhöht oder vermindert. Die Neufestsetzung findet jeweils im April eines
Kalenderjahres statt, wobei dann jeweils der Index für das vergangene
Kalenderjahr mit dem Index für den Monat des Vertragsabschlusses verglichen
wird.
Die Beträge gelten in ihrer
veränderten Höhe jeweils vom ersten Januar an als geschuldet, der dem Monat der
planmäßigen Neufeststellung vorangegangen ist. Bei einer Umstellung auf eine
neue Indexbasis gilt die neue Indexreihe von ihrer amtlichen Veröffentlichung
an.
Die Vertragsteile beantragen
die Genehmigung dieser Wertsicherungsvereinbarung gemäß § 3 des Währungsgesetzes
durch die Landeszentralbank.
d) Die Anwendung der
Vorschrift des 323 ZPO wird im übrigen ausgeschlossen.
3.
Für den Fall, daß ein
Unterhaltsanspruch nach den vorstehenden Vereinbarungen besteht, gelten im übrigen
die gesetzlichen Bestimmungen » (modèle de Ehevertrag rédigé par le
notaire Dr. Reimann : cf. Oberto, I
contratti della crisi coniugale, Milano, 1999, 541).
[25] « IV.
Erbrechtliche Regelungen
Die Vertragsteile verzichten hiermit
gegenseitig auf Pflichtteils und
Pflichtteilsergänzungsansprüche, die ihnen beim Ableben des jeweils anderen
Eheteils zustehen könnten. Der Verzicht ist jedoch gegen¬ständlich beschränkt
und bezieht sich nur auf
a) das jeweilige voreheliche
Vermögen der Vertrags¬teile,
b) dasjenige Vermögen, daß ein
Vertragsteil während der Ehe durch Erbschaft, Schenkung oder vorweggenommene
Erbfolge erhält,
c) die Surrogate der vorgenannten
Gegenstände.
Der vorstehend erklärte Verzicht der
Ehefrau gilt aber nur für den Fall abgegeben, daß durch ihn ein gemeinsamer
Abkömmling der Vertragsteile begünstigt wird.
Der vorstehend erklärte Verzicht gilt
nur für den Fall als abgegeben, daß durch ihn ein gemeinsamer Abkömmling der
Vertragsteile, die Eltern der Ehefrau oder deren Geschwister begünstigt werden.
Im letztgenannten Fall Begünstigung der
Eltern bzw. der Geschwister der Ehefrau durch den Pflichtteilsverzicht gilt der Verzicht auch nur als abgegeben,
wenn dem Ehemann, solange er nicht wieder verheiratet ist, ein unentgeltlicher
Nießbrauch an dem Hause ... in ... eingeräumt wird, das die Ehefrau von ihren
Eltern übergeben erhalten hat » (modèle de Ehevertrag
rédigé par le notaire Dr. Reimann : cf. Oberto,
I contratti della crisi coniugale, Milano,
1999, 545).
[26] BVerfG 6.2.2001, https://www.bundesverfassungsgericht.de/entscheidungen/rs20010206_1bvr001292.html.
[27] BGH 11.2.2004,
[28] Cf. Thuegaz, Le
« contrat prénuptial », bientôt en France ?, 2017,
https://www.village-justice.com/articles/contrat-prenuptial-bientot-France,24630.html.
[29] Cf. Oberto, La comunione legale tra coniugi, I, 385 et s. ; Id., Contratti prematrimoniali e accordi preventivi sulla crisi coniugale, Famiglia e diritto, 2012, 69, en particulier les notes 42-47.
[30] Cf.
http://villardcornec.files.wordpress.com/2010/05/article-cornec-bull-family-law.pdf ; http://villardcornec.wordpress.com/tag/enforcement-of-foreign-judgments.
[31] Cf. Oberto,
Contratti prematrimoniali e accordi preventivi sulla crisi coniugale,
http://giacomooberto.com/pollenzo2011/Oberto_Contratti_Prematrimoniali_e_Accordi_Preventivi.htm.
[32] Trib. Torino, 20 aprile 2012, Famiglia e diritto, 2012, 803.
[33] Cass., 3 maggio 1984, n° 2682, Rivista di diritto internazionale privato e processuale, 1985, 579 ; Il diritto di famiglia e delle persone, 1984, 521 : « L’accordo, rivolto a regolamentare, in previsione di futuro divorzio, i rapporti patrimoniali fra coniugi, che sia stato stipulato fra cittadini stranieri (nella specie, statunitensi) sposati all’estero e residenti in Italia, e che risulti valido secondo la legge nazionale dei medesimi (applicabile ai sensi degli artt. 19 e 20 delle disposizioni sulla legge in generale), è operante in Italia, senza necessità di omologazione o recepimento delle sue clausole in un provvedimento giurisdizionale, tenuto conto che l’ordine pubblico, posto dall’art. 31 delle citate disposizioni come limite all’efficacia delle convenzioni fra stranieri, riguarda l’ordine pubblico cosiddetto internazionale, e che in tale nozione non può essere incluso il principio dell’ordinamento italiano, circa l’invalidità di un accordo di tipo preventivo fra i coniugi sui rapporti patrimoniali successivi al divorzio, il quale attiene all’ordine pubblico interno e trova conseguente applicazione solo per il matrimonio celebrato secondo l’ordinamento italiano e fra cittadini italiani ».
[34] Cass., 21 décembre 2012, n° 23713, http://giacomooberto.com/cass_n_23713_2012.htm.
[35] Cass., 21 août 2013, n° 19304 : « l’inderogabilità dei diritti e dei doveri che scaturiscono dal matrimonio non viene meno per il fatto che uno dei coniugi, avendo ricevuto un prestito dall’altro, si impegni a restituirlo per il caso della separazione. Che poi l’esistenza di un simile accordo si possa tradurre in una pressione psicologica sul coniuge debitore al fine di scoraggiarne la libertà di scelta per la separazione è questione che nel caso specifico non ha trovato alcun riscontro probatorio ; e che comunque, ove pure sussistesse, non si tradurrebbe di per sé nella nullità di un contratto come quello in esame ».
[36] Cass., 3 décembre 2015, n° 24621.
[37] Cass., 13 janvier 2017, n° 788 et Cass., 30 janvier 2017, n° 2224.