9. La formation continue dans les " domaines sensibles " des relations directes avec les citoyens : accès à la justice, règlement des conflits, loyauté du procès ; justice et politique, justice et média (comparaison entre France et Italie).

Le sujet de la formation dans les domaines de l'accès à la justice, de l'aide juridictionnel et des modes alternatifs de règlements des conflits (arbitrage, médiation, conciliation) est traité conjointement par l'Ecole française et le Conseil Supérieur de la Magistrature, dans le cadre du réseau européen des responsables de la formation des magistrats. C'est un thème qui se prête à une comparation entre les différents systèmes nationaux, eu égard à certaines matières spécifiquement repérées, telles que la famille, les mineurs, la protection des consommateurs, le droit commercial, le droit du travail, le droit social, l'application des peines, sans oublier qu'aussi dans ce champ certains organismes internationaux (Union Européenne, Conseil de l'Europe) sont intervenus à plusieurs reprises.

L'atelier sur la " loyauté du procès et comportements professionnels ", proposé par l'Ecole française, s'inscrit dans le cadre des formations dans le domaine procédural visant à approfondir le sujet des rapports avec cette particulière catégorie de justiciable qui est l'avocat. Rendre la justice est une ouvre collective du parquet, de la défense et du juge. Les comportements professionnels des uns et des autres sont déterminants quant à la qualité de la justice rendue au justiciable. Seul un fonctionnement centré sur l'éthique du procès entre professionnels (respect du contradictoire, égalité des armes, impartialité du juge, correction, intégrité et civilité de l'avocat) peut permettre à l'ouvre de justice de trouver son ampleur réelle.

Aux rapports entre justice et politique l'Ecole française consacre une importante session de formation. Nous assistons depuis quelques années partout en Europe à une montée en puissance du droit sous la pression d'une société civile plus active et de la justice qui contraint le politique à lui donner plus de place. Par contre, on constate en Italie, après la saison caractérisée par l'enquête " mains propres ", le désir, au sein de plusieurs formations politiques et même de couches de plus en plus importantes de citoyens, d'un désir de " vengeance " contre la magistrature et de retour aux systèmes du " bon vieux temps ".

C'est sans doute pour cela que les relations entre le monde politique et le monde judiciaire sont, des deux côtés des Alpes, très tendues. Les politiciens considèrent les juges comme des freins à leur action, tandis que les juges vivent les politiciens comme les asservissant et voulant les cantonner à un rôle mineur. La défiance latente explose en crise récurrente. Comment sortir de cet état de fait ? Tout en accompagnant le débat en cours sur la réforme de la justice, la session française voudrait cerner la singularité française au regard des autres expériences démocratiques européennes et des principes affichés dans les textes français, européens et internationaux.

Sur le front des rapports avec un autre " pouvoir ", de nos jours de plus en plus important, se situe la formation française sur le thème " Justice et média, connivence ou concurrence ", organisée en coopération avec le centre de formation professionnel des journalistes. Les rapports entre justice et médias sont au centre de la vie publique depuis quelques années. On reproche à l'institution judiciaire de parler trop ou pas assez. Partant de ce constat, ce cycle propose trois axes de réflexion :

Aussi le Conseil Supérieur de la Magistrature italien a essayé de traiter le sujet des rapports avec les journalistes et les média dans le cadre de rencontres particulières, tels que, par exemple, celles consacrées aux juges des mineurs, une catégorie qui, particulièrement dans mon pays, est trop souvent confrontée à une forme d'information incomplète et incorrecte, parfois même dénigrante (45).
 
 
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(45) On pourra encore ajouter que le sujet des rapports avec les média est aussi traité par le code éthique des magistrats italiens (approuvé par le Comité Directeur Central de l'Association des Magistrats Italiens le 7 mai 1994), qui, d'après l'article 6, stipule ce qu'il suit :

" Art. 6 - Relations avec la presse et les autres médias

Dans ses contacts avec la presse et les autres moyens de communication, le magistrat ne doit pas solliciter la publication de nouvelles touchant à l'activité de son service.

Quand il n'est pas astreint au secret ou à l'obligation de réserve sur l'information dont il a connaissance en raison de ses fonctions, et qu'il considère opportun de donner des informations sur l'activité judiciaire dans le but de garantir une information correcte des citoyens, le magistrat doit éviter la constitution ou l'utilisation de réseaux d'informations personnels, réservés ou privilégiés.

Tout en respectant le principe de la liberté d'expression de sa pensée, le magistrat doit s'inspirer de critères d'équilibre et de mesure lorsqu'il fait des déclarations ou reçoit les divers représentants des moyens de communication de masse ".

Le thème de l'utilisation de la presse a été abordé aussi par la Cour Européenne des Droits de l'Homme dans son arrêt du 16 septembre 1999 (Affaire Buscemi c. Italie, req. n° 29569/95), qu'on a déjà mentionné (cf. supra, note 31).

Dans ce domaine il faudra signaler enfin l'activité de formation de l'Académie Européenne de Droit de Trèves (pour des renseignements à ce sujet cf. le site web suivant : <http://www.era.int/public/francais/index.htm>). 1